dimanche 25 mai 2008

LAETICIA et SABINE : JOIE et COLERE


LAETICIA et SABINE : JOIE et COLERE

« UNE » de LA MEUSE du samedi 17 août

Folle joie à Bertrix et à Kain, mais aussi une question qui révolte tout le monde : Pourquoi avait-on rendu la liberté au pervers de Marcinelle ?

En 1998, Marc Dutroux avait déjà commis cinq rapt et viols de gamines avec la complicité de sa femme Michelle Martin.

Huit ans plus tard, malgré de lourdes condamnations,le couple de prédateurs a repris la « chasse aux fillettes » en suivant exactement le même scénario
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BERTRIX

Joie et colère

LA MEUSE du samedi 17 août ,page 9

Les cloches de l'église se mettent à sonner

Jeudi, vers 18 h 30 ,il y a peu de monde sur la place de Bertrix. Une personne âgée Sur un banc, sur l'autre quatre jeunes écoutant de la musique. Tout à coup une mobylette arrive plein gaz. Son conducteur révèle presque anodinement : « Ils ont retrouvé Laeticia On vient de prévenir la famille. » Et comme il est arrivé le jeune homme repart.

Il ne faut alors que quelques secondes pour que klaxons, sirènes, cloches de l'église se mettent à résonner. Immédiatement les affiches utilisées pour les recherches sont arrachées et les automobilistes les brandissent en hurlant


"On !es a retrouvées !"

Devant le syndicat d'initiative, la population arrivant de partout ne comprend pas!

Pourquoi dit-on "On les a retrouvée ?„ De qui parle-ton ?


Je croyais qu'il n'y avait qu'une gamine de disparue a Bertrix

C'est la joie,la folie lorsqu'on apprend que non seulement Laeticia va revenir mais que Sabine,-disparue depuis deux mois et demi -est, elle aussi sauvée toutes les lèvres:"Elles sont vivantes?"


Dés qu'ils obtiennent confirmation, les gens rient, pleurent de joie, sautent, s’embrassent:"C'est formidable c'est magnifique ! On ne sait plus quoi dire !

Au bout d'un quart d’heure, l’euphorie et l'émotion depuis le domicile de Laeticia jusqu'à la Grand' place n'est toujours pas retombée et cela va durer pendant une grande partie de la nuit. La rue Dr Liffrange ne connaîtra plus jamais ça Ouf !

Pour qu'elle ne voit pas ça

En attendant le retour de la petite, prévu le soir même,l'asbl "Marc et Corine" au comble de la joie., se charge de faire enlever le maximum d'avis de disparition d'avis de disparition

"Pour qu'elle ne voit pas ça" et d'organiser un grand feu avec ces milliers d'affiches désormais inutiles !

Et là,vers 22hr,les langues commencent à se délier et la colère,envers les ravisseurs, gronde: "Des pareils on devrait les pendre sur la place publique!"


Quand on pense qu'ils ont déjà été condamnés pour la même chose, c'est révoltant ! Et en plus ils ont des petits enfants, c’est honteux ! Espérons que ces monstres vont finir leurs jours en prison ».

A tous les coins de rue, on parlait de peine incompressible,de la loi Lejeune (Qui permet la libération anticipée des condamnés).Autre commentaire des habitants émus :

« Quelle déception cela doit être pour les parents de Julie et Mélissa ! Ici on fait la fête et pendant ce temps là ,les pauvres pleurent.Pourvu qu’on les retrouve aussi. Après tout,Sabine est bien revenue avec Laeticia,alors pourquoi ne pas y croire.Ce serait génial ! »

Après une semaine sans sommeil pour toute la famille,l’émotion prend tout le monde à la gorge. On pleure plus qu’on ne rit,mais le bonheur et la fatigue mélangés donnent le frisson.

Vers minuit, alors que la foule est maintenue sur la grand ‘place où a lieu le feu de joie ,on annonce l’arrivée de la petite. Des véhicules de gendarmerie-combis et voitures banalisées- prennent la rue Dr Liffrange suivis d’une autre voiture,celle du parrain de la fillette.


Laeticia, visiblement affaiblie et en état de choc,en sort et se précipite dans les bras de sa mère ,avant de s’engouffrer dans la maison,sous les cris de joie.

Martinne Piette

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« Ma maison ! Pour toujours !... »

LA MEUSE du samedi 17 août 1996 page 9

Sabine a fondu en larmes dans les bras de sa grand-mère

La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre dans le quartier résidentiel de la résidence du Renard, à Kain.


L'information passait de maison en maison: « Sabine a été retrouvée ....Elle est vivante »
La joie de tous ceux qui la connaissaient à dépassé en intensité l'angoisse vécue depuis presque trois mois.Guy Dardenne ,son père,est parti dans un véhicule de la gendarmerie pour aller la retrouver au district de Charleroi

« Rien qu'a voir les yeux du premier chef Decray lorsqu’il est venu me chercher ,j’ai compris qu’elle était vivante »expliquait hier le père de Sabine.


Il m’a demandé de prendre quelques habits et nous sommes partis vers Charleroi .Une longue route pendant laquelle on se repasse tout le film de ces dernières semaines:Les heures d'angoisse, les moments d'espoir qui pouvaient laisser la place à une profonde déprime ,cinq minutes plus tard….
Je tiens à rendre hommage au travail des bénévoles qui se sont démenés pour Sabine,que ce soit à l’asbl Marc et Corinne où d’autres anonymes. Nous devons également un grand coup de chapeau aux enquêteurs qui ont fait leur travaille en nous soutenant moralement et en prenant garde de ne jamais nous donner de faux espoirs.

Un nouveau vélo

Ils étaient des dizaines à l’attendre en face de chez elle,jeudi soir,pour la voir , l’entendre où simplement lui manifester un signe d’encouragement.
Les copains de Sabine s’étaient organisé aussi vite que lors de sa disparition : En quelques heures une grande banderole « Bienvenue Sabine » avait été déroulée dans le jardin ,des petits ballons accrochés un peu partout, et comme pour conjurer le sort ,un grand feu de joie a été allumé avec les avis de recherche qui concernait la jeune fille.Et dans le quartier on parle de lancer une souscription pour que Sabine puisse très vite recevoir un nouveau vélo,puisque qu’elle a perdu le sien dans son épouvantable mésaventure.
Quand elle est arrivée à bord d’un véhicule de la gendarmerie,ce fut une énorme explosion de joie.

Une bonne nuit

Epuisée,Sabine à adressé un petit signe de la main à ceux qui l’attendait.Elle est tombée en larme dans les bras de sa grand-mère en bredouillant à sa mère et à ses deux sœurs :

« Ma maison ….Vous êtes à moi pour toujours… » Elle fut très vite emmenée à l’intérieur, pour retrouver le calme et l’intimité dont elle a été privée depuis le 28 mai dernier.

Hier matin,Guy Dardenne répondais aux questions des journalistes en face de son domicile, parfois interrompu par une livraison de fleurs. Il montre ses rosiers, agressés par des dizaines de pied, pour mieux faire comprendre l’ambiance qui régnait la veille au soir.

« Oui Sabine a bien dormi, sa sœur nous a dit qu’elle n’avait pas fait de cauchemar et elle a mangé de bonne appétit ce matin. Physiquement elle a l’air bien.


Psychologiquement elle est très forte.Nous allons l’aider en la laissant retrouver son milieu de vie.Elle nous diras ce qu’elle voudra,quand elle le voudra et nous seront près à l’écouter. Mais je suis confiant pour l’avenir parce qu’elle voudra conserver son tempérament. Je sais que nous pourront revivre comme avant. C’est une question de temps…. »
Le père de la jeune fille parle d’une chape de plomb qui vient de s’envoler de ses épaules.

Mais son visage devient grave lorsque il pense aux parents de Julie et Mélissa,avec lesquels il a eu de fréquents contacts téléphoniques ces dernières semaines.

« Ce qu’ils ont fait pour leur enfant ils l’ont fait pour Sabine aussi….Il faut que cela cesse.
Aujourd’hui j’ai confiance en la justice. Mais je ne peut pas cacher la haine que j’ai en moi à l’égard de ces trois personnes. Ce qu’il faut en faire ? J’ai choisi de garder mes convictions pour moi…

David Flament

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JULIE ET MELISSA

Un espoir pour les parents des deux petites Liégeoises



LA MEUSE samedi 17 aoùt 1996


Presque automatiquement après l'annonce de la libération de Laetitia et de Sabine, toutes les pensées se sont tournées vers les parents des deux petites Liégeoises, Julie et Mélisse, disparues, elles, depuis un an et deux mois.
Hier matin, le téléphone n'arrêtait pas de sonner chez Gino et Carine Russo. Avec le papa de Julie, Jean-Louis Lejeune, ils étaient réunis, comme à accoutumée, pour affronter ce nouveau rebondissement de l'enquête. La maman de Julie, elle, était au travail.

Le téléphone sonne tout le temps, nous confirme Carine Russo, la maman de Melissa. Pour nous encourager, pour nous soutenir, des mots pleins de gentillesse qui font plaisir a entendre. On avait les larmes aux yeux jeudi soir, en regardant la télévision.


Tous ces gens que nous ne connaissions pas, heureux des retrouvailles de Laetitia et Sabine, mais gardant toujours une pensée pour Julie et Melissa.

Ce sentiment ambigu, les parents des deux fillettes l'ont aussi ressenti à l'annonce de la bonne nouvelle. Les autorités judiciaires avaient eu la délicatesse de dépêcher un ancien inspecteur de la BSR de Seraing, une heure avant le dénouement, afin de les prévenir de l'imminence de la libération de Marcinelle et de leur confirmer que tout était fait pour essayer d'établir un lien avec leurs enfants.

En l'apprenant, nous avons éprouvé un sentiment fort ambigu, reprend Carine Russo. Nous étions tous à la joie pour ces deux parents. Qui, mieux que nous, pouvaient comprendre ce qu'ils ressentaient? Mais aussi la douleur de savoir que nos filles n'avaient pas été retrouvées avec les leurs.

Par contre, les deux couples pouvaient légitimement être fiers d'avoir été un peu pour quelque chose dans ce dénouement heureux. « C'est la preuve notre combat a porté ses fruits.
Dès le début, nous avons dit que nos filles avaient pu être enlevées par des pédophiles et les enquêteurs liégeois ne voulaient pas entendre parler de réseau.
Ceux de Tournai et de Neufchâteau, eux, ont directement démarré sur cette piste avec ce formidable résultat.
C'est la preuve que ce que nous présumions existe bel et bien. La preuve aussi que l'on peut encore retrouver nos enfants vivants. »

Les tient-on désormais au courant de l'enquête?

«Non. Nous savons juste que tout est mis en oeuvre pour trouver de nouveaux indices. Nous espérons seulement cette fois que tous les efforts seront mis sur l'hypothèse de l'enlèvement.

Nous avons fait le compte en heures: aujourd'hui midi, il y a exactement 10.032 heures d'attente pour nous et surtout pour nos petites. Vous vous imaginez ce qu'elles peuvent souffrir ?

Luc Gochel

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Le trio cache t’il un réseau

"UNE" du journal "LE SOIR"Vendredi 16 août 1996

Le trio qui détenait les deux jeunes filles dans une cave de Marcinelle cache-t-il un réseau ? Le remarquable travail des enquêteurs va en ce sens.

Marc Dutroux, Michelle Martin et un homme, un certain N. , ont comparu, aujourd'hui en fin de matinée, devant la Chambre du Conseil de Neufchâteau. Une foule les a hués et leur a adressé des bordées d'injures lors de l'arrivée de leurs fourgons au Palais de Justice où l'on devait renouveler les mandats décernés contre eux pour enlèvement et séquestration.

Une quinzaine d'heures plus tôt, soit vers 18 h 40 jeudi, les deux victimes du trio, Sabine et Laetitia avaient été délivrées de leur geôle, dans une cave de Marcinelle. Laetitia Delhez, 14 ans, avait disparu de Bertrix depuis vendredi dernier. En la libérant, on a aussi découvert et délivré Sabine Dardenne, 12 ans, qui avait disparu le 28 mai à Kain, près de Tournai, alors qu'elle se rendait en classe à vélo.

L'enquête est partie de la piscine de Bertrix. Laetitia en était sortie avec une amie, en début de soirée, vendredi dernier, disant qu'elle rentrait chez elle. Elle n'y arriva pas.

Deux témoins se sont présentés à la gendarmerie. L'un signalait une camionnette blanche suspecte qui avait stationné devant la piscine, l'autre avait noté une partie de la plaque.

La gendarmerie confia ces éléments à son ordinateur doté d'un système d'analyse sophistiqué, qui sortit le nom d'un suspect théorique, Marc Dutroux, âgé de 40 ans.

Celui-ci avait été condamné en 1989 à neuf ans de prison pour le viol (et la séquestration), perpétrés en 1985, de deux mineures, qu'il avait ensuite libérées : il avait abusé d'elles plusieurs fois après leur avoir plaqué du sparadrap sur la bouche et les yeux. L'homme avait été libéré en avril 1992.

La camionnette correspondait, la plaque aussi. Cet homme devenait le suspect n° 1. On le retrouva dans la région de Charleroi.

Il possède six maisons avec son amie, Michèle Martin (36 ans), qui a déjà été détenue pendant six ans. On surveilla toutes ces maisons. Et, mardi matin, la gendarmerie appréhenda le couple à Sars-la-Buissière, près de Thuin, où ils vivent avec leurs trois enfants. Elle perquisitionna aussi les six maisons, dont certaines étaient vides. Sans rien trouver.

L'interrogatoire donna plus de résultat. Le suspect n° 1 finit par avouer et lança : Je vais vous donner deux filles...

C'est dans une des maisons déjà perquisitionnées qu'on découvrit Laetitia et Sabine, hier, au 128 de l'avenue de Philippeville, à Marcinelle. L'entrée du réduit minable dans lequel leurs ravisseurs les avaient enfermées était dissimulée par une armoire métallique, qui coulissait sur des rails, ce que les enquêteurs n'avaient pas remarqué au cours de leur première visite.

Dans le réduit, deux lits superposés : Sabine et Laetitia s'y trouvaient.
Trois personnes ont donc été arrêtées : le couple Dutroux-Martin et ce N. dont on sait peu de choses.

Deux autres suspects sont encore recherchés.

Lors d'une conférence de presse tenue hier à 21 heures au district de gendarmerie de Charleroi, en présence du magistrat national André Van Dooren et du juge d'instruction Jean-Marc Connerotte, le procureur du Roi de Neufchâteau, Michel Bourlet, a exprimé sa double joie d'avoir retrouvé Laetitia et Sabine, et a remercié tous ceux qui ont aidé les services d'enquête : l'ASBL " Marc et Corine ", la population et la presse.

Les deux fillettes sont maintenant rentrées chez elles. Elles sont en bonne santé physique mais elles sont toutes deux sous le choc.
À Kain comme à Bertrix, la nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre hier soir. Dans le lotissement où habitent les parents de Sabine Dardenne, tout le monde était dans la rue. On se congratulait, on s'interpellait de porte à fenêtre, tous communiaient dans le bonheur des parents.

A Bertrix, c'est sur la grand-place que curieux et proches de Laetitia se sont réunis. Un grand feu de joie a illuminé la place, alimenté par les affiches signalant la disparition... (On lira par ailleurs le récit de ces heures de joie et d'émotion dans les deux localités.)

Mais on doit aussi penser aux deux fillettes qui ont subi cette séquestration longue de près d'une semaine pour Laetitia et de deux mois et demi pour Sabine, dont on craint qu'elles aient eu à subir des sévices sexuels. Elles auront sans aucun doute, toutes deux, besoin de beaucoup de réconfort, d'aide, de patience et d'amour pour surmonter leurs drames.

Et les autres fillettes enlevées ? L'espoir renaît soudain de les retrouver.

Les enquêteurs pensent de plus en plus sérieusement qu'ils ont mis la main sur une bande - un réseau - de pédophiles dont Sabine et Laetitia ne seraient pas les seules victimes. Bien des indices leur permettent de le croire; des noms, des lieux circulent déjà. On évoque même une filière de trafic d'enfants passant par la Hollande et la Slovénie.

Le procureur du Roi Bourlet ne nie pas l'existence de cette théorie mais, prudent, il assure que rien n'en démontre encore la véracité.


ALAIN GUILLAUME (avec S. D. et J.-L. B.)


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Sabine et Laetitia l’angoisse, l’espoir la fête

LE SOIR Page 14 Vendredi 16 août 1996

On les croyait mortes. Aujourd'hui l'hypothèse d'un réseau pédophile - que les enquêteurs travaillent - relance les espoirs.

Depuis mardi, les gendarmes du Bureau central de renseignements et de la Cellule disparitions et enlèvements, étaient persuadés que Dutroux était bien le ravisseur Laetitia.
Les planques qu'ils avaient organisées pendant la nuit suivante avaient renforcé cette conviction... mais aussi celle que la fillette avait peut-être déjà perdu la vie.

Arrêté à plusieurs reprises, Dutroux abusait de ses victimes en les bâillonnant, en leur fermant les paupières avec du sparadrap. Mais chaque fois, ils les avait libérées vivantes, en les jetant de sa voiture sur une route. " S'il a appris une chose depuis son arrestation "pensaient les gendarmes " c'est peut-être qu'il ne peut plus laisser ses victimes en vie ". Pendant des heures, les craintes des enquêteurs furent grandes.

Il n'y eut cependant plus aucun doute quant à la lourdeur des soupçons pesant sur l'homme quand on découvrit dans sa camionnette des traces de cheveux et de sang. Dutroux ne résista pas longtemps à l'interrogatoire... et conduisit les enquêteurs à Marcinelle où il leur montra comment on accédait à la prison des fillettes.

Je vais vous donner deux filles, avoua-t-il... comme s'il y en avait d'autres. On découvrit donc l'infâme réduit; les deux lits métalliques superposés; les cassettes vidéo pornographiques et un équipement dont les enquêteurs ne veulent encore rien dire.

Mais cette prison si soigneusement équipée ne devait-elle servir qu'à la détention de deux fillettes ? Un pervers, ou un couple de pervers... mais cinq ? Et d'où le couple Dutroux-Martin tirait-il ses revenus ?

Et les enquêteurs d'envisager sérieusement l'hypothèse du réseau pédophile. Plus précisément même, une filière de trafic d'enfants passant par la Hollande et la Slovénie.

Espoir ? Peut-être. Mais le procureur du Roi Bourlet reste prudent : rien, dit-il, ne démontre encore la crédibilité de cette hypothèse et de ces espoirs.

ALAIN GUILLAUME


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Laeticia,de Bertrix, et Sabine ,de Kain, retrouvée vivantes !


Laeticia,de Bertrix, et Sabine ,de Kain, retrouvée vivantes !

LA MEUSE du vendredi 16 août 1996 page 10

Elles auraient été victimes d'un réseau de pédophiles

COUP de théâtre, hier vers 19 h 30. On apprenait que la petite Laetitia Delhez (14 ans), disparue depuis vendredi en début de soirée de Bertrix (province de Luxembourg), avait été retrouvée vivante dans la région de Charleroi. Mieux, la jeune Sabine Dardenne (12 ans), disparue de Kain (Tournai), le 28 mai dernier, à également été retrouvée saine et sauve. Les deux fillettes ont vraisemblablement été victimes d'une bande de malfaiteurs belges utilisant des enfants afin d'assouvir certaines perversités sexuelles.

Depuis trois jours, l'enquête sur la disparition de Laetitia avait progressé à grands pas. Elle s'était orientée dans la région de Charleroi, où mardi soir, le procureur du Roi de Neufchâteau, M. Bourelet, tenait une conférence de presse pour demander à l'ensemble des médias de ne rien révéler qui pourrait mettre la vie de l'enfant en danger. La plupart des journaux, dont le nôtre, ont «joué le jeu ».

A ce moment, trois personnes étaient déjà placées sous mandat d'arrêt et, semble-t-il, des aveux sur l'enlèvement de Laetitia, avaient été recueillis. On croît savoir que les ravisseurs auraient alors déclaré avoir relâché Laetitia. Mais les enquêteurs n'avaient toujours pas retrouvé la fillette. Raison pour laquelle le silence était demandé.

Selon nos informations, parmi les trois personnes arrêtées se trouverait un couple de Sars-la Buissière (région de Thuin),

Marc Dutroux et son épouse née Martin. Ceux-ci auraient déjà été condamnés à de lourdes peines, il y a quelques années, pour des faits de moeurs concernant des enfants. Quant à la troisième personne arrêtée, il s'agirait d'un pédophile. Les trois personnes ont été placées sous mandat d'arrêt pour enlèvement et séquestration d'enfants.

Une camionnette blanche

Des perquisitions auraient été opérées au domicile des époux Dutroux, où des véhicules auraient été saisis. Notamment,une camionnette blanche qui aurait servi à l'enlèvement de Laetitia.

Selon certaines sources, une tache de sang aurait été retrouvée dans ce véhicule.
C'est, semble-t-il, grâce à ce véhicule que les enquêteurs ont pu remonter jusqu'au couple
Dutroux.

La camionnette blanche aurait été vue, par deux personnes, aux abords du complexe sportif de Bertrix

-là où l'on a perdu la trace de Laetitia-, vers 21 h, vendredi dernier. L'un des témoins aurait même pu donner des éléments du numéro minéralogique de ce véhicule...

Sur base des interrogatoires et des indices recueillis, les enquêteurs ont, semble-t-il, perquisitionné une dizaine de maisons,souvent insalubres, maisons qui appartiennent aux personnes interpellées ou qui ont été louées par elles.

Mercredi déjà, des recherches avaient été entreprises, notamment grâce à un hélicoptère, à Sars-la-Buissière et aux environs de Marcinelle où le couple Dutroux aurait également une maison. Les recherches se sont poursuivies durant la journée d'hier.

C'est d'ailleurs à Marcinelle, au 138 avenue de Philippeville, que l'opération finale a été menée, hier vers 18 h. Ce qui a permis, environ une heure plus tard, d'annoncer la formidable nouvelle: les deux fillettes étaient retrouvées en vie.


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L’arrestation de Dutroux et de sa femme à Sart la Buissière

LA MEUSE vendredi 16 août 1996 page 10

Mardi, la piste aboutissait chez le ferrailleur

MARDI, Sars-la-Buissière (Lobbes) était le théâtre d'un important déploiement de forces de police et de gendarmerie. C'est là, chez Marc Dutroux, que la piste « Laetitia » venait d'aboutir.

A Sars-la-Buissière, il ne se passe jamais rien ». Comme pour contredire ce client du bistrot L'Embuscade de la rue de Rubignies, mardi dernier, ce petit village entre Lobbes et Merbes-le-Château a connu un événement peu banal.

« Vers 1 heure de l'après-midi, nous raconte la serveuse, plusieurs camionnettes et voitures de gendarmerie et aussi de police sont arrivées dans l'impasse juste à côté. Il y avait même une ambulance sur la place communale. Il y avait la BSR et la PJ, enfin je crois, ce n'était pas marqué sur leur front... Et mercredi, un hélicoptère a survolé le quartier et les environs ».
Aucun nom ne circule et subitement, quand nous questionnons, plus personne n'est de Sars-la-Buissière...

«Ils ont arrêté la femme et l'homme qui habitent juste ici derrière. Avec les policiers, il y avait aussi des psychologues,pour s'occuper des enfants du couple ».

Une petite fille de 4 ou 6 mois, un garçon de 4 ans et un autre de 12 ans, comme nous l'expliquera un adolescent habitant une maison voisine. « Mais là derrière, on a aussi arrêté un jeune homme,plus jeune. Il devait avoir 20-25 ans »,» ajoute la serveuse.

« Là derrière », c'est au cœur du Hameau de Rubignies. On y accède par une impasse venant de la rue du même nom, entre les numéros 37 et 41.
Le couple habite une maison sans numéro, au fond à droite de l'impasse.


De hauts sapins cachent l'entrée, gardée par un ou des chiens comme nous le dira un petit garçon rencontré devant. Un parterre et une avant-cour, avec des meubles de jardin et une sorte de puits. A l'arrière, des caravanes.

L'homme qui habite, là est ferrailleur, ainsi que l'explique son voisin, patron d'un garage.
« Je viens de rentrer de Marseille, je ne sais rien. On m'a raconté. Je ne sais pas comment ils s'appellent, je n'avais pas beaucoup de contacts avec eux. Bonjour, au revoir, c'est tout... »

Des voisins calmes?

« Oui, enfin, il a déjà eu les policiers chez lui pour tapage nocturne, parce qu'il travaillait sur des voitures le soir ».

C'est à peu près tout ce que nous pourrons tirer des personnes rencontrées sur place. La prudence à parler n'ayant d'égale que la réticence à se laisser photographier.

Le sommet sera atteint par cette dame, sortant d'une maison du Hameau de Rubignies et qui se dirige vers la maison du couple arrêté. Elle ne se retourne pas. Elle presse le pas et son petit garçon : «Allez Fredo, donne les clés». Elle ouvre la porte, s'engouffre dans la maison, referme sans avoir répondu à nos questions. Elle ne ressortira plus tant que nous serons là.

Yvan Scoys


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LES RAVISSEURS

Marc Dutroux: un récidiviste qui avait été condamné pour cinq viols

LA MEUSE vendredi 16 août 1996 page 10


Marc Dutroux et son épouse Hélène Martin avaient déjà été condamnés pour des faits très semblables en 1989.

Le couple vivait alors à Goutroux, près de Charleroi. Ils avaient été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Charleroi en compagnie d'un troisième larron, Jean Van Peteghem, né en 1965, également de Goutroux. Jean Van Peteghem était poursuivi pour trois viols et Marc Dutroux pour cinq viols et un vol avec violences commis pendant la nuit.

Les viols concernaient tous des jeunes filles âgées de 12 à 18 ans et avaient été commis en 86 et 87 à Carnières, Couillet, Gilly et Nalinnes. Déjà à l'époque, Dutroux avait utilisé la même méthode que pour l'enlèvement de Laetitia. Les gamines avaient été enlevées sur la voie publique, chloroformées dans une camionnette et emmenées dans un endroit reculé où elles avaient subi des sévices corporels et sexuels hallucinants et écoeurants.

Grâce à l'habileté de leurs avocats, les trois prévenus avaient été renvoyés par la chambre du conseil devant le tribunal correctionnel.


Cependant, suivant le réquisitoire du substitut M. Thierry Marchandise (l'actuel procureur du Roi de Charleroi) le tribunal correctionnel de Charleroi s'était déclaré incompétent car le vol avec violences perpétré par Dutroux était du ressort exclusif de la cour d'assises.

Marc Dutroux s'était introduit en pleine nuit dans une maison. Il avait agressé l'occupante, l'avait déshabillée, ligotée, bâillonnée et torturée de manière odieuse pendant trois heures avant qu'elle ne révèle où étaient cachées ses économies.

Ce vol avec violences perpétré pendant la nuit relevant de l'article 473 du code pénal était punissable des travaux forcés à perpétuité et n'était donc pas susceptible d'être correctionnalisé.

Le trio avait été jugé par la cour d'assises de Mons.


Marc Dutroux a été condamné à 13 ans de prison et son épouse Hélène Martin à 6 ans de prison. Cependant, ce pervers particulièrement dangereux a été remis en liberté avant la fin de sa peine à la suite d'une grâce royale.


Laeticia : l’attente


BERTRIX DISPARITION

Laeticia : l’attente

LA MEUSE mercredi 14 août 1996

«Je m'efforce de rester optimiste » disait hier le major de gendarmerie Cuissard chargé de l’enquête.

Hier en fin d'après-midi,malgré le très important dispositif mis en place depuis samedi matin, on était toujours sans nouvelles de Laetitia Delhez (14 ans), disparue depuis vendredi vers 21h aux abords du complexe sportif de Bertrix (province de Luxembourg).

Dans l'après-midi, le major Cuissard, commandant en second du méga-district de Marche, directeur des opérations, ne voulait pas imaginer le pire. Il déclarait : "Je n'ose pas y penser et je m'efforce de rester optimiste."


De toute façon, nous devons aller jusqu'au bout, nous ne pouvons pas nous arrêter. Nous n'excluons aucune hypothèse, même pas celle d'une fugue.


Il nous est très difficile de gérer toutes les informations mais nous demandons à toute personne pouvant fournir un élément, même s'il paraît anodin, de nous le communiquer sans préjuger de son importance. C'est notre seul moyen de progresser ».


On sait que, dès le lendemain de la disparition, de nombreux bénévole ont fouillé les bois de la localité à la recherche d'un indice.


Depuis samedi et jusqu'à hier la population de la région a vraiment fait tout ce qui était possible pour aider les autorités. Les raisons qui ont poussé les bénévoles à s'investir ne varient guère.


Partout, on entend : « Si ma fille était à sa place... » où «Ma petite-fille a le même âge et je ne voudrais pas que cela lui arrive ». Les habitants de Bertrix ont particulièrement été sensibilisés.

Changement de tactique

Durant la journée d'hier, les autorités sur le terrain ont changé de tactique ; les battues avec les bénévoles ont été interrompues « Pour l'instant, expliquait le capitaine Baulard, nous voulons inspecter plus précisément, en fonction des faibles informations en notre possession, les secteurs que nous avons délimités ».

Hier également, gendarmerie et police communale travaillaient avec trois maîtres chiens mis à leur disposition par la protection civile. Les chiens repassaient dans les en droits déjà visités au cours des battues, s'attardant dans certains coins. Par ailleurs, un analyste relit et étudie les informations afin de s'assurer que rien n'a échappé aux enquêteurs. Il épluche et encode également les renseignements qui affluent encore de tout le pays.

Des recherches sont aussi entreprises pour retracer l'emploi du temps de Laetitia au cours des jours précédant sa disparition. Il semblerait qu'elle ait eu un comportement tout à fait normal mais les autorités ne se contentent pas de si peu.


Elles ont besoin d'un maximum de précisions. Mardi après-midi, on se perdait encore en conjectures car vendredi, à l'heure de la disparition de Laetitia, il faisait encore clair et du monde circulait à proximité du complexe sportif.


Pour rentrer à son domicile, -moins de 10 minutes à pied- l'adolescente devait passer par la place du centre de Bertrix et à cette heure, on installait encore le matériel nécessaire à l'organisation des 24 h de mobylettes. Pourtant personne n'a remarqué quelque chose d'anormal...

Grâce à l'a.s.b.l. «Marc et Corine », des affichettes ont été distribuées très rapidement dans tout le pays mais aussi à l'étranger -avec la collaboration de routiers-. On peut maintenant trouver le portrait de Laetitia dans les pays limitrophes mais aussi en Autriche et en Espagne.

La famille de la jeune disparue, qui ne tarit pas d'éloges pour l'a.s.b.l., espère que la mobilisation de la population ne s'arrêtera pas trop vite si la situation devait durer. M. Thilmans, responsable de l'antenne bertrigeoise lance un appel: «Nous avons besoin de gens pour nous aider à l'approche de ce long week-end.

Tous les volontaires sont les bienvenus pour distribuer le portrait de Laetitia sur les nombreuses manifestations organisées. Les bénévoles peuvent se présenter au syndicat d'initiative « Bertrix initiative » à partir de ce mercredi à 15 h. Un appel est aussi lancé aux routiers et aux cibistes ainsi qu'aux personnes qui partent à l'étranger. (061/41.43.92).

Martine PIETTE
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NB : L’enlèvement de Laeticia a été celui « de trop » du monstre Dutroux !
Et cela grâce à des témoins vigilants et à des enquêteurs motivés !!

Pour répondre au silence des autorités judiciaires liégeoise,le voyage des deux pères en Amérique latine


Pour répondre au silence des autorités judiciaires liégeoise,le voyage des deux pères en Amérique latine

La Meuse lundi 15 juillet 1996

ABANDONNER est un mot qu'ont à jamais banni de leur vocabulaire les familles Lejeune et Russo, parents de Julie et Mélissa ces deux gamines de 8 ans, disparues à grâce-Hollogne sans laisser la moindre trace le 24 juin 1995.

Diffuser les photos dans le monde entier, lancer des appels dans la presse et sur les chaînes de télévision mais aussi saisir la moindre piste et s'investir à fond pour tenter de la remonter jusqu’au bout,..

Poursuivant leur inlassable quête. les deux pères ont traversé l'Atlantique le 6 juillet dernier a destination de Buenos-Aires (Argentine), avant de gagner Rio de Janeiro (Brésil) et Mexico (Mexique)

Il s'agit évidemment pour Jean-Denis Lejeune et Gino Russo de sensibiliser tant les autorités que les populations au drame que vivent les deux familles depuis un an.

En Argentine tandis que la police leur promettait son soutien, deux chaînes de télévision diffuaient les portraits dis deux fillettes plusieurs soirées

Au Brésil, début de cette semaine,, Ils ont pu lancer leur, appel sur une chaîne de télévision, mais aussi parler d'une étrange lettre anonyme reçue par la R.T.B.F Liège, peu après le passage des deux familles à l'émission Témoin n° 1 (TF1)


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La lettre d’un marin

La Meuse lundi 15 juillet 1996

Dactylographiée, cette lettre, rédigée en français phonétique, est très difficile à comprendre. Si l'auteur ne cherche à brouiller son identité derrière ce charabia, aucun élément né permet de déterminer quelle pourrait titre sa nationalité. L'émission de TF1, rediffusée sur TVA, a pu titre; vue dans le monde entier...

S'il est important de préciser que la lettre a été postée en région liégeoise, il se pourrait qu'elle l'ait été par un Intermédiaire.

Celui qui écrit se dit marin, et plus précisément cuistot a bord d un cargo. Il signale qu'il a été pris de' remords après avoir vu l'émission ` française, ajoutant qu'a l'époque des faits, il avait accepte de se taire contre de l'argent.

Selon l'individu, les gamines, « accompagnées d'un couple », auraient été embarquées° sur son bateau et emmenées à Rio, via Acapulco (Mexique).
Cette lettre a bien' sur été : communiquée aux enquêteurs liégeois, mais, comme c'est le cas depuis le début les parents ne savent absolument rien quant aux démarches entreprises. -

Mme Russo:« Pourquoi accorder plus de crédibilité à cette lettre anonyme plutôt qu'à une autre? Les autorités maritimes belges et des pays voisins ont-elles été contactées ?
Motus total des autorités judiciaires liégeoise: comme toujours, motus, secret de l'instruction!»
Il ne nous est pas possible de tout le temps rester sans réponse, de se demander ce qu'ils font ou qu'ils ne font pas, ce qu'ils savent ou ne savent pas.,. Comme nous sommes tenus à l'écart, nous avons: décidé de réagir far nous mêmes. »
Aussi, c'est sans prévenir la justice liégeoise de leur voyage, et des démarches envisagées que les deux pères sont partis.

Mme Russo: Tout devient plus facile dès qu'on s'éloigne de Liège !
Nous avons reçu l'appui du ministère des Affaires étrangères et nos époux bénéficient partout de celui des- ambassades belges des pays visités et des polices locales!»

Les parents sont évidemment conscients que cette lettre est peut-être due à un désaxé ou un mauvais plaisant. Mais ils ne' veulent négliger aucune piste!, C'est pourquoi, avant de gagner l'Amérique du Nord, MM . Lejeune et Russo tenteront d'approfondir les recherches au Mexique, où ils resteront cinq jours.

Les deux pères poursuivront ensuite leurs efforts au Canada où des étapes sont prévues à Ottawa et Montréal. Le retour au pays est prévu pour fin juillet.

Rob.


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ABANDONNER est un mot qu’ont à jamais banni de leur vocabulaire


Les familles Lejeune et Russo, parents de Julie et MéIissa ces deux gamines de 8 ans, disparues à grâce-Hollogne sans laisser la moindre trace le 24 juln 1995.
.
Diffuser. les photos dans le monde - entier, lancer des appels dans la gesse et sur les chaînes de télévision mais aussi sa saisir la moindre piste et s'investir à fond pour tenter de la, remonter jusqu'au bout,..
Poursuivant leur inlassable quête. les deux pères ont traversé l'Atlantique le 6 juillet dernier a destination -de Buenos-Aires (Argentine),avant de gagner Rio de Janeiro- (Brésil) et Mexico a (Mexique)

Il s'agit évidemment pour Jean-Denis Lejeune et Gino Russo de sensibiliser tant les autorités que les populations au drame que vivent les eux familles depuis un an.

En Argentine tandis que la police leur donne tous son soutien, deux chaînes "de télévision diffuaient les portraits dis deux fillettes plusieurs soirées Brésil, début de cette semaine, Ils ont pu lancer leur, appel sur une chaîne de télévision.,

Et aussi parler d'une étrange lettre anonyme reçue par la R.T.B.F Liege, peu après le passage des deux familles à » l'émission Témoin n° 1

Cinquante-huit questions mais pas de réponse


Cinquante-huit questions mais pas de réponse

« La Wallonie » du mardi 25 juin 1996

Il y avait du monde, dimanche au Palais des Congrès de Liège. C'est là que, à l'initiative du comité de soutien "Julie et Métissa", parlementaires belges, représentants du Service général d'appui policier, professeurs d'université, membres d'interpol, spécialistes des disparitions d'enfants et parents d'enfants disparus s'étaient donnés rendez-vous pour assister à une conférence de presse-débat, dont le but premier n'était autre de répondre à une question essentielle : que faut-il changer pour que soient prises en compte l'urgence et la spécificité des situations d'enlèvement et de disparition d'enfants?


C'est Louisa Lejeune, la maman de Métissa, qui a ouvert le débat, dimanche, en lisant une déclaration d'intention des parents des deux fillettes enlevées le 24 juin 1995 à Grâce- Hollogne.

Celle-ci s'articule autour de 58 questions, que les familles Russo et Lejeune se posent réellement depuis un an et qu'ils destinent « à l'institution judiciaire, au ministre de la Justice et aux autorités publiques en général ».

Manque de moyens

A travers l'énoncé de ces questions, les parents ont développé trois grands axes de réflexion :

Les mesures prises dans les premières heures de la disparition, la coordination de l'enquête et les (difficiles) relations familles-enquêteurs

« En ce qui concerne les deux premiers thèmes, notre intention n'est pas d'accuser les autorités judiciaires mais bien de montrer le manque de moyens accordés aux enquêteurs de première ligne et !a nécessité de créer une unité d'intervention qui puisse agir sur le plan local, national et international,en vertu d'un plan d'urgence coordonné »

« Notre expérience, comme d'autres expériences antérieures ou postérieures, a montré que cette police de première digne devant intervenir dans les premières heures n'était pas formée ni préparée à envisager !e pire, seule position qui permette de réduire les marges d'erreur ».

« Il faut donc changer les mentalités afin qu'une disparition qui au départ ne laisse aucune trace matérielle (...) puisse être l'objet de la mobilisation immédiate d'une équipe d'intervenants spécialisés. Ces derniers pourraient dépendre d'un magistrat national,lui même spécialisé, afin que les arrondissements judiciaires ne constituent plus un obstacle à leurs possibilités d'intervention ».

Les parents restent des parents

En ce qui concerne le troisième axe de réflexion, les relations entre les familles et !es enquêteurs, les parents de Julie et Mélissa ont tenu à insister sur la situation tout à fait particulière que doivent vivre les parents d'enfants victimes d'enlèvements ou de disparitions non élucidés.

« Les parents restent des parents et les enfants disparus restent leurs enfants.
Ce que réclament les parents est à la fois une plus ,grande efficacité dans l'intervention des autorités publiques et la possibilité d'être associés à la recherche de leurs enfants.
Faut-il beaucoup d'arguments pour faire comprendre que ce n'est pas parce qu'un enlèvement ou une disparition est mise à l’instruction judiciaire que les parents, en plus de la dépossession brutale de leurs enfants, doivent être également dépossédés de toute information et de toute collaboration avec les enquêteurs...»

58 questions

Et Louisa et Jean-Denis Lejeune, Carine et Gino Russo, d'énumérer tour à tour les questions qu'ils posent à la justice.

- Dont celles-ci : Pourquoi le maître chien n'a-t-il pas entamé son action au départ de la maison de Mélissa ?

- Pourquoi cinq juges d'instruction se sont-ils succédés dans les premières semaines ?

- La juge ne devait-elle pas refuser de prendre en charge te dossier puis qu'elle partait en vacances durant cinq semaines ?

- Pourquoi les effets scolaires des petites n'ont-ils pas été saisis immédiatement dans les bancs de l'école ? (C'est dans ce carnet rendu aux parents,15 jours après les faits, que se trouvait la phrase « Julie, à 17h00, on nira au manaige »)

- Combien de temps aurait-il fallu pour mettre en place un réseau de barrages routiers, de contrôles aux frontières et dans les aéroports ?

- Après la mise à jour récente d'activités pédophiliques organisées ayant des ramifications en Hollande et en Allemagne, les enquêteurs pensent-ils que l'hypothèse des réseaux internationaux de pédophilie doit encore être minimisée?

- Combien de temps faut-il aux enquêteurs pour évacuer la suspicion qui pèse sur J'encourage proche des victimes, notamment des parents ?

- L'information sur l'enquête concernant leurs propres enfants ne doit-elle pas être considérée comme un droit fondamental pour !es parents?

Didier Schyns


Oui les parents ont des droits

La Wallonie du mardi 25 juin 1996

Seul représentant d'un parquet à avoir répondu à l'invitation du comité de soutien "Julie et Mélissa", Guy Poncelet, procureur du Roi de Tournai, a tenu des propos très durs à l'encontre de Mme Doutrewe, la juge d'instruction liégeoise qui a en charge le dossier Julie et Mélissa.

«Je suis abasourdi, effaré,d'entendre les 58 questions que se posent les parents. Si le magistrat traite un dossier comme un simple numéro, on n'arrivera jamais à rien. Il doit faire preuve d'humanité. Tout est question de relations humaines. Il est inadmissible qu'aucune réponse n'ait été donnée aux parents Russo et Lejeune, sur de nombreux points. Je comprends parfaitement leurs angoisses et l'inacceptation d u silence dans lequel ils sont tenus... »

Pour Guy Porcelet, qui vient de traverser une terrible épreuve lui aussi avec l'assassinat, en février dernier, de son fils, inspecteur à la PJ de Mons, les droits des victimes sont totalement insuffisants.

« Il n'y a rien de plus insupportable que le silence. Même si je ne connais pas le dossier relatif à l'enlèvement de Julie et Métissa, il est clair que certaines réponses auraient pu être données aux parents, sans pour cela violer le secret de l'instruction. Ces parents ont des droits. Le droit à une certaine information, mais aussi le droit d'être rassurés »

Accès contrôlé au dossier...


Guy Poncelet poursuit son plaidoyer, sur le thème du sacro-saint principe du secret de l'instruction.
«Je reste un partisan du secret d'instruction, mais je ne puis accepter qu'aucune information ne soit donnée aux parents, sous couvert de ce principe. Je suis le premier à admettre que si on donne l'accès au dossier à tout le monde, et dans n'importe quelles conditions, on finira par organiser la transparence totale, ce qui n'est pas souhaitable. Mais il me semble aussi que les parents doivent avoir un droit d'accès contrôlé au dossier. De deux choses l'une : ou on continue à ignorer les victimes de manière scandaleuse, ou on accepte de leur donner un accès partiel au dossier... »

Des propos courageux, qui ne feront assurément pas plaisir à tout le monde... « Le droit de réserve n'est imposé que par ceux que cela dérange », indique Guy Poncelet. « Je suis au terme de ma carrière et j'assume la responsabilité de mes propos. Et puis, vous savez, j'estime que ce qui est arrivé au mois de février dernier me donne le droit de parler. Si tout le monde se tait, on ne fera pas avancer les choses. J'en ai marre de ces autoroutes qui ne mènent nulle part... »

Guy Poncelet préconise, reprenant en cela le projet d'Anne-Marie Lizin, la création d'une cellule nationale spécialisée dans la recherche d'enfants disparus ou enlevés. « Cette cellule devrait avoir de larges contacts internationaux», note le PR de Tournai.

«Elle serait chargée de récolter toutes les informations et de coordonner le travail. Car il doit s'agir d'un véritable travail en commun avec les enquêteurs de proximité qui, sur le terrain, sont et restent indispensables. Ma carrière de magistrat m'a permis de constater qu'il y a de trop nombreux dysfonctionnements entre les différentes forces de police... La supervision de ce type d'enquête par un magistrat national permettrait d'y pallier... »

D.S.

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Sur Internet...

La Wallonie du mardi 25 juin 1996

Les 58 questions que se posent les parents de Julie et Métissa sur le fonctionnement de la justice et la méthodologie de l'enquête peuvent être consultées sur Internet à l'adresse suivante :
http://ourworld.compuserve.com/homepages/Julie-Melissa , sous la rubrique "Nouvelles". S'y trouvent aussi toute autre information en rapport avec l'enlèvement, la situation des parents Russo et Lejeune ainsi que... la page spéciale que "La Wallonie" a consacré, hier, à ce qui est devenu l'affaire Julie et Mélissa.

Cela étant, Dominique Laloux, qui a introduit sur Internet tous ces documents, a tenu à préciser, en rapport avec les accusations de Jacques Mercier, chef de groupe à Interpol Lyon (voir notre édition d'hier), que « si Interpol n'a pu avoir les photos des deux fillettes avant quatre mois, les dizaines de millions d'utilisateurs de l'Internet en disposaient déjà à la date du 6 juillet, par le biais d'un site situé en Italie, puis par CompuServe, puis par l'Ambassade de Belgique à Washington. Les photos, de très bonne qualité, sont d'ailleurs encore sur ces deux derniers serveurs...

Il ajoute : Peut-être serait-il intéressant de souligner l'intérêt potentiel d'un tel système de distribution ries photos d'enfants disparus ou enlevés. J'ai eu l'occasion, dimanche à Liège, de m'entretenir avec Elisabeth Yore (1) et elle m'aidera à voir avec CompuServe comment un Forum "Missing Children" européen (traduction : enfants disparus) pourrait âtre envisagé. C'est sans doute une piste à suivre pour améliorer la distribution... »

D. S.

(1) E. Yore est directrice des Relations internationales du National Center for Missing and Eploited Children, une institution privée reconnue par le Congrès américain. Celle-ci travaille en collaboration avec l'autorité publique et le FBI à la lutte contre la criminalité dont les enfants sont les victimes.


Les révélations d’interpol


Les révélations d’interpol

« La Wallonie » du lundi 24 juin 1996

Invité hier au Palais des Congrès de Liège, Jacques Mercier, chef de groupe à Interpol Lyon, a jeté un fameux pavé dans la mare, en expliquant publiquement que le juge d'instruction chargée du dossier "Julie et Métissa" avait refusé, dès le début de l'affaire, de transmettre à Interpol les portraits des deux fillettes de Grâce-Hollogne. Il avoue ne pas comprendre et n'hésite pas à parler de faute

Le Palais des Congrès de Liège a été le théâtre, hier après-midi,d'une très intéressante conférence débat, organisée dans le cadre du douloureux anniversaire de l'enlèvement de Julie Lejeune et Mélissa Russo, Conférence qui a d'abord- permis aux parents,
Comme c'était prévu, de communiquer une liste de 58 questions, très précises,"qu'ils se posent depuis un an sur le fonctionnement de la justice et la méthodologie de l'enquête concernant l'enlèvement d e leurs enfants.

De nombreux parlementaires belges Anne-Marie Lizin, Philippe Monfils, Pierrette Cahay,
Jacqueline Herzet se sont en suite succédés pour expliquer leurs différentes initiatives visant à
améliorer l'efficacité de la recherche d'enfants enlevés ou disparus. Parmi celles-ci, le projet Inter-police Enfant de la sénatrice et bourgmestre de Huy Anne-Marie Lizin, visant à la création d'une unité nationale d'intervention immédiate en cas de disparition ou d'enlèvement

« Il ne pouvait s'agir d'une fugue...»

Présentes aussi, plusieurs, personnalités étrangères, invitées à témoigner de leur expérience quotidienne quant au problème de la lutte contre la criminalité dont les enfants sont victimes. Et ici, c'est l'intervention de Jacques Mercier, chef de groupe à Interpol Lyon, qui a été la plus d’étonnante. Celui-ci a expliqué, en long et en large, pourquoi les portraits de Julie et Métissa n'avaient été diffusés par Interpol qu'au mois de novembre 1995, soit plus de quatre mois après l'enlèvement des deux fillettes.

«L'enlèvement de Julie et Mélissa a eu lieu un samedi», raconte-t-il. «Nous en avons été informés .le lundi ou le mardi par notre service de presse. Nous avons alors immédiatement pris contact avec notre agent de liaison en Belgique, qui s'est lui même mis en rapport avec la juge d'instruction en charge du dossier, pour obtenir les portraits des deux petites et les diffuser sur notre système informatique. Ce qui lui a été refusé, sous prétexte que, selon cette juge d'instruction, Julie et Mélissa étaient toujours sur le territoire belge... Il était pourtant évident qu'elles avaient déjà quitté la Belgique. Alors que, de toute évidence, il ne pouvait s'agir d'une fugue... »

Jacques Mercier poursuit : «C'est le 6 juillet, soit douze jours après !es faits, que nous avons diffusé internationalement le signalement de Julie et Métissa, mais sans leur photo. Nous n'avions en notre possession qu'une simple notice, dont nous avons dû nous contenter. Il faut savoir, en effet, qu'interpol ne dispose pas de pouvoirs supra -nationaux. En clair,nous pouvons suggérer à un État de faire quelque- chose, mais en aucun cas lui imposer d'agir... »

Mystère...

Parce qu'ils n'ont pas le choix,Jacques Mercier et son équipe font donc avec les moyens du bord, jusqu'à la fin d u mois d'octobre, qui coïncide avec la visite du procureur général de Liège Léon Giet au siège d'lnterpol, à Lyon. «Lors de cette visite, Léon Giet nous a demandé de voir les photos des deux petites. Nous ne les avions pas, bien sûr, puisqu'on n'avait pas voulu nous les transmettre. Nous avons tout expliqué au procureur général. Il était furax et a dû le faire comprendre dès son retour à Liège. Car les photos nous sont alors parvenues, début novembre, et nous les avons aussitôt diffusées sur le réseau... »

En attendant, plus de... quatre mois se sont écoulés depuis l'enlèvement de Julie et Mélissa. Jacques Mercier avoue ne rien comprendre : «On ne rattrape jamais le temps perdu. Dans un cas pareil surtout. Nos fichiers sont accessibles dans 176 .pays.

Pourquoi la juge d'instruction a-t-elle refusé notre aide ? Pourquoi n'a-t-elle pas utilisé l'arme que nous lui offrions ? Cela restera toujours un mystère. Peut-être y avait-il, de sa part une méconnaissance de notre organisation et de notre système de fonctionnement...
Mais cela étant, et sans porter le moindre jugement sur le système judiciaire belge, elle a commis une erreur, ou plutôt une faute grave... »

Didier Schyns

Nous aurons l'occasion, dans nos éditions de mardi, de revenir plus en détail sur certains points essentiels évoqués lors de cette conférence débat.

LA REVOLTE DES PARENTS


LA REVOLTE DES PARENTS

« La Wallonie » du lundi 24 juin 1996 page 4

Il y a, aujourd'hui, très exactement un an que Julie et Mélissa disparaissaient, sur un petit chemin de Grâce-Hollogne bordant l'autoroute Liège-Namur, sans laisser la moindre trace.

Un an d'un insupportable silence. Depuis, pour Louisa et Jean-Denis Lejeune, pour Carine et Gino Russo, le temps s'est arrêté. Leur acharnement, au contraire, jamais n'a cessé. Pour les parents des deux fillettes,la fatalité n'existe pas. Leur combat continue. Plus que jamais...

Tant chez les Russo que chez les Lejeune, tout, et c'est bien normal, rappelle Julie et Mélissa. Les deux enfants sont omniprésentes,à travers les photos qui ornent les bibelots, les affiches apposées aux murs, le courrier de sympathie adressé aux parents. Un an déjà... Et rien ! Pour les familles, la situation est devenue intolérable.
Alors, comme ils le disent, « il est temps de rompre le silence, parce que le silence n'arrange rien ».

« On est toujours le 24 juin 1995... »
Le premier, Jean-Denis Lejeune monte aux barricades. Le ton est dur, les mots s'entrechoquent.
«Je suis écoeuré, hyper révolté,dégoûté de la société dans laquelle nous vivons. Le Roi nous a écrit sept mois après les faits, pour dire qu'il nous soutenait moralement. On n'a pas besoin de ça, Mais que fait-il, a part gracier les pédophiles ? Et nos ministres ? Ils parlent beaucoup pour
ne rien dire... Et que dire de la magistrature... »

Gino Russo est plus nuancé. Pour décrire l'état d'esprit qui l'anime, il emploie une image.
«On a l'impression d'être sur la foire, d'avoir accompli un grand tour de carrousel, mais de se retrouver au même point que l'an dernier. »
Jean-Denis acquiesce « On est toujours le 24 juin 1995... »

Pour un attentat, on retrouve toujours des traces et l'auteur est souvent appréhendé rapidement. Là, on met les moyens. Mais quand il faut retrouver des gosses,on prend les choses à la légère. »

Carine Russo revient au soir de la disparition.
« Ce soir-là, on était content de voir arriver des gens de la BSR On était très confiant, trop peut-être. Ces enquêteurs de la BSR étaient proches d e nous, ils étaient honnêtes, et ils tentaient de nous apaiser. Ils comprenaient notre désarroi. Ce contact nous faisait d u bien. Mais on les a mis sur un autre dossier, Ce climat d e confiance qui s'était instauré ne plaisait sans doute pas à tout le monde... La Belgique, c'est un emballage doré, mais ce qui se trouve à l'intérieur n'est pas très frais... »

« Un enlèvement, pas une disparition »


Gino Russo intervient : « Julie et Mélissa, ce n'est pas Anthony Declerck. Je voudrais qu'on ne parle plus, dans le cas des deux petites,de disparition, mais d'enlèvement, parce que c'en est un. Un témoignage l'atteste. Bien sûr, c'est plus facile d'employer le terme de disparition, qui est plus neutre.

Quand j'ai demandé pourquoi on n'avait pas fait appel à la 23e brigade pour Julie et Métissa, comme on l'avait fait pour Anthony Declerck, on m'a répondu que là, il y avait eu une demande de rançon et que c'était dès lors une affaire de banditisme. Pourtant, cette demande n'était parvenue que quinze jours après l'enlèvement, mais la 23e brigade avait été mobilisée directement. Qu'on ne me dise pas qu'il ne s'agit pas d'une affaire de classe sociale... »

Jean-Denis Lejeune pointe un doigt plus accusateur encore
«J'en arrive à me demander s'ils ont vraiment envie d'élucider l'affaire. Ou plutôt s'ils n'ont pas peur de découvrir la vérité... »

Gino Russo nuance quelque peu le jugement: « On se forçait parfois à croire que si les enquêteurs nous cachaient des choses, c'est qu'ils avaient de bonnes raisons de le faire, qu'ils allaient découvrir quelque chose. Mais que peuvent-ils avancer comme résultats concrets, un an après l'enlèvement de Julie et Mélissa ? Rien... »

Rien... Pourtant, les familles Russo et Lejeune ne baissent pas les bras. Pour elles, le combat se poursuit. « Notre seule chance, aujourd'hui», estime Carine Russo, «c'est de tomber sur un
enquêteur motivé, qui se charge rait d'une relecture complète du dossier et accepterait de collaborer avec nous.
Pourquoi ne pas unir nos efforts ?
On ne saurait de toute façon pas reculer, puisqu'on n'a pas avancé d'un centimètre... »

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L’enquête et l’accès au dossier : « Ce sont encore nos enfants »

« La Wallonie » du lundi 24 juin 1996 page 4

Évoquer l'état d'avancement de l'enquête revient à déclencher une réaction frontale de la part des parents des fillettes. Un tir de barrage alimenté par mille exemples au quotidien.

Carine, la maman de Melissa, revendique de tout son être «Qu'on nous laisse participer On peut leur apporter énormément de choses. Je lance un appel ! Ce sont encore nos enfants... »

«Il y a des pistes sérieuses. Dont on nous dit qu'elles ne le sont pas», affirme Carine Russo.


Quelles pistes ? Les parents se regardent. Ce n'est pas un ange qui passe entre eux. Mais plutôt les remontrances des enquêteurs qui ont interdit aux parents de «brûler les pistes». Ils secouent la tête. «On ne peut pas le dire».
Carine précisera simplement que, au départ de leurs soupçons, il y a «un pressentiment de maman. Puis des coups de fil à la maison. Nous avons donné ces informations aux enquêteurs. C'était au minimum troublant. Aucun retour,-».

En savoir plus
Ils se plaignent, entre autres griefs (*), de ne pas être traités en adultes par le juge d'instruction. «A la limite, elle nous considère comme des inculpés», remarque Gino.
«Elle nous fait la morale. Elle nous répète chaque fois : "J'ai un devoir de réserve et il y a le secret de l'instruction. Vous devez comprendre, c'est le règlement!" Il n'est pas question qu'elle envisage un seul instant notre histoire sous un angle un petit peu humain ».

Ce fameux accès au dossier qu'on leur refuse précisément au nom du secret de l'instruction reste une source importante de découragement pour Carine, Louisa, Jean-Denis et Gino. Il y a eu l'action en référé : «Après trois mois», rappelle Gino, «on a voulu en savoir un peu plus sur l'enquête. Nous avons introduit une action au tribunal de Bruxelles, puisqu'on nous refusait l'accès au dossier».

C'est oui, puis c'est non

En référé, l'arrêt est défavorable aux parents. Contacts avec le ministre de la Justice, rendez-vous avec Léon Giet... Les Russo et les Lejeune sont prêts à passer au degré d'appel.
Ils se souviennent parfaitement du moment où, lors du deuxième rendez-vous avec M. Giet, le procureur général leur a expliqué comment consulter le dossier : plutôt un à la fois que tous en même temps, prendre des notes, les transcrire sur ordinateur...

Carine raconte sa stupéfaction quand elle comprend que M. Giet leur prépare bel et bien un accès aux documents. «Je n'en revenais pas. Il m'a dit "Mais ça fait une heure que je vous le dis ! Comment dois-je faire pour vous convaincre ?"» Jean-Denis confirme «Je me souviens qu'on est même allés boire un verre après, tellement on était soulagés ! C'était le premier point positif depuis le début».

Dossiers sans retour

«Et puis, je ne sais pas ce qui s'est passé», reprend Carine. Léon Giet affirme en effet devant le comité de soutien et les parents qu'il n'a jamais rien promis de tel. Pendant quinze jours, ils sont effondrés tous les quatre. Ensuite, on oppose aux parents l'apparition d'une nouvelle piste, ce qui re-verrouille les documents des enquêteurs.
«Nous avons donné sept gros dossiers d'information en tout aux enquêteurs. Et nous n'avons de retour sur rien. Pour protéger la vie privée des personnes qui apparaissent dans le dossier ? Vous croyez qu'on ne reçoit pas de lettres de dénonciation à la maison ? Ce n'est pas pour ça qu'on va ennuyer quelqu'un», se révolte Gino.
Ils ont désormais fait appel de l'arrêt du tribunal bruxellois. Le jugement sera rendu en septembre.

« Dans un sac, au pont-barrage ! »

Les parents de Julie et de Melissa ont un interlocuteur au parquet, à qui ils peuvent poser des questions. «On doit faxer nos questions à l'avance. Mais sans éléments, comment voulezvous... ? On écrit nos maigres informations et nous recevons des réponses très, très floues. Beaucoup de pommade», s'assombrit Carine.
Et de maladresses, affirment-ils. Un coup de fil suffirait parfois pour éteindre une, angoisse de plus pour les deux couples et leurs proches.

Ainsi, un samedi, le téléphone sonne chez les Russo. Dans le living transformé en quartier général, Carine décroche et entend une voix féminine qui affirme que les filles sont au pont-barrage d'Ivoz-Ramet : «Melissa appelle son papa !», précise la voix. Comment ? Où ? La maman s'affole. «Elle sont dans la Meuse, dans un sac !» L'interlocutrice raccroche.
Gino : «On téléphone à la PJ. On part, Jean-Denis et moi, au pont-barrage. Rien. On attend. Le week-end se passe. Autant dire qu'on ne dort plus. Le lundi, on re-sonne à la PJ. On nous apprend que, en fin de compte, c'était une voyante.
On n'avait pas pris la peine de nous prévenir»...

(*) Négligences, lenteurs, retard dans l'inscription au registre de signalisation d'Interpol...


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