vendredi 25 juillet 2008

Et nos deux petites filles seront toujours vivantes('Télé-Moustique'du jeudi 29 août 1996 page 30 et 31)


Et nos deux petites filles seront toujours vivantes

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 30 et 31

C'est en vous regardant tous les quatre, en regardant aussi Grégory et Maxime, que je vais essayer de surmonter mon émotion. Mon émotion, non pas notre émotion à toutes et à tous. Mais en face, il y a votre courage.

Un courage qui est vraiment, comme le soulignait Martine votre voisine, un courage à toute épreuve.

Quatorze mois de tourments et de combat. Les quatorze stations d'un calvaire, d'un calvaire insoutenable que pourtant vous avez soutenu.

Mais pour aboutir à quoi?

Et toutes les prières, où sont-elles allées, et toutes les bougies qu'on a fait brûler, ça a servi à quoi? Les réunions de prières, les pèlerinages...
Est-ce que le bon Dieu est sourd?

Non, ce n'est pas blasphème que de crier ainsi. Le blasphème résiderait plutôt dans l'hypocrisie ou dans de pieuses déclarations qui voudraient étouffer les pourquoi que notre coeur révolté nous pousse à poser

Non, ce n'est pas blasphémer que de laisser exploser notre sincérité. La Bible l'a fait avant nous.
Écoutons, au chapitre 23 du livre de Job: Job prit la parole et dit: "C'est toujours une révolte que ma plainte." Sa main pesante à Lui, et Lui, c'est Dieu, l'Éternel, Jéhovah, appelez-le comme vous voulez. "Sa main pesante à lui m'arrache des gémissements.

Oh, si je savais comment l'atteindre, parvenir jusqu'à Sa demeure, j'ouvrirais un procès devant Lui." "Dieu, continue Job, Dieu a brisé mon courage, car les ténèbres me cachent à lui. L'obscurité me voile sa présence." (...)

Jésus, sur terre comme au ciel, la volonté de Ton Père, ce n'est jamais que des enfants meurent, mais c'est que, sans relâche, nous cherchions la justice car le reste importe peu.

Jésus, en traçant le signe de ta croix maintenant, dans un geste liturgique, nous manifestons le respect et la réparation à l'égard des deux corps qui seront tout à l'heure confiés côte à côte à la terre du cimetière.

La prière de saint Augustin élargira encore tout le sens de ce que proclamait en finale, et on l'a rappelé tantôt, le communiqué de dimanche dernier, et nos deux petites filles seront toujours vivantes.

Textes de l'abbé Schoonbroodt

Cette immense caresse ('Télé-Moustique'du jeudi 29 août 1996)



Cette immense caresse

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 pages 25 à 27

Vice-recteur de l'UCL, membre du Comité de Soutien aux parents de Julie et Mélissa, professeur de journalisme, observateur de la vie des médias et auteur de plusieurs ouvrages sur le deuil, l'abbé Gabriel Ringlet était l'un des deux principaux célébrants - avec l'abbé Schoonbroodt - lors de la cérémonie des funérailles des deux petites filles.

Le lendemain de la retransmission télévisée des obsèques, il commentait, avec nous, la symbolique d'ouverture et la liturgie voulue par les parents des fillettes.

La cérémonie d'adieu à Julie et Mélissa était soulignée par la lumière du blanc. La famille avait délicatement installé la symbolique. Dans le blanc des cercueils, des voitures des parents, des vêtements des mamans, des chasubles des célébrants, des fleurs.C'est une façon de faire tomber
le décorum habituellement imposé par nos rites funéraires.

Gabriel Ringlet - C'est tout à fait vrai. En concertation avec les familles, les mamans de Julie et de Mélissa nous ont demandé si elles pouvaient s'habiller en blanc et nous avons trouvé que c'était très très bien. C'est ainsi que les célébrants ont décidé de porter des étoles blanches plutôt que violettes. Dans tous les symboles qui ont été mis en lumière, y compris le sel, le blanc revenait tout le temps. Même si dans certaines civilisations, notamment orientales, le blanc est couleur de deuil, il est très rare dans notre perspective traditionnelle. Encore que, depuis la liturgie de Vatican II, l'espoir - qui n'est pas artificiel, c'est à dire où la colère doit rester vraie - a conduit à rapprocher la mort du baptême. Lorsque quelqu'un part, je trouve cela très beau d'imaginer qu'il va vers un au-delà, quelles que soient les convictions ou la manière dont on nomme cet au-delà.

L'hommage d'adieu ressemblait à une mer balancée entre le chagrin, terrible, et la bourrasque de tendresse. On était là, au centre d'une immense caresse...

Gabriel Ringlet - J'aime beaucoup votre expression... C'est ça. Lorsque des hommes et des femmes vivent ce qu'ont vécu les proches de Julie et Mélissa, ce qu'elles ont vécu elles-mêmes, la caresse paraît fondamentale.
Pour tenir le coup face à ce genre de drames, nous avons besoin, plus que jamais, d'exprimer notre tendresse, notre douceur; en contre-point et en contre-poids au cynisme de notre société.
Pour pouvoir traverser cela, nous réclamons des gestes indispensables. Et chaque note de musique choisie par les parents, par exemple, exprimait la volonté de ce que vous appelez l'immense caresse. Mais nous ne voulions en rien ignorer ou faire semblant d'ignorer toute la colère qui nous habitait aussi.

Cette tendresse devait aussi servir à nous consoler, nous. C'était clair à travers le sourire de Cécile, la tante et marraine de Mélissa, qui a lu un texte de saint Augustin: "La mort n'est rien (...)
Et « ne pleure pas, si tu m'aimes. »


Gabriel Ringlet - J'étais d'autant plus touché que Cécile est celle qui, avec nous, a le plus travaillé à la liturgie. On sentait bien qu'elle était un peu le porte-parole des familles. Elle a préparé tout cela, elle y a été très attentive. Dans sa propre émotion, elle a été capable d'apporter le sourire dont nous avions tous besoin. Mais le choix des textes et des chansons par les quatre parents et la marraine ne pouvait pas ne pas rappeler quelque chose de leur culture. Par exemple, il y avait un chant
(« Con te partiro » d'Andréa Bocelli, NDLR) qui ne pouvait pas ne pas faire penser à l'Italie...


En acceptant les caméras de télévision à la basilique Saint Martin, M. et Mme Russo, M. et Mme Lejeune ont lancé une invitation ou partage...

Gabriel Ringlet - Un partage dans l'enracinement, proche du public. Comme l'a dit la famille, l'ampleur de ces funérailles devait être celle d'un énorme merci. Je crois qu'il faut interpréter cette retransmission télévisée comme un hommage rendu à deux petites filles du peuple. Le fait de mettre ainsi à l'honneur deux petites filles du peuple qui ont mérité et reçu des funérailles de reines, c'était aussi faire un extraordinaire plaidoyer en faveur de la fragilité. Et, me semble-t-il, sans le moindre voyeurisme.
A ce moment là, je dirai que la présence des médias du monde entier avait du sens. Je pense que ce sont tous les faits divers du monde et tous les drames de l'enfance vécus sur la planète qui ont été récapitulés autour des deux petits cercueils de Julie et de Mélissa.

Nous ouvrir la porte, chanter d'aussi jolies chansons qui n'étaient pas des cantiques... Le lieu sacré, la Basilique, ne s'est-elle pas transformée en simple maison? La maison de nos voisins?

Gabriel Ringlet - C'est vrai. Et le choix de Saint Martin n'est pas non plus innocent. Sur ces hauteurs de Liège ont eu lieu des combats très importants, au Moyen Âge, où le peuple a pu faire entendre sa voix. Que le peuple - dans ce que le mot a de plus fort et de plus respectueux - puisse, en priorité, entrer dans ce genre de lieux, alors qu'il n'y entre pas souvent, cela a du sens aussi. Sans doute ne l'avions-nous pas calculé, mais cela s'est déroulé de cette manière. Au fil des dernières heures, cela a pris ce tour-là.

Que se passait-il à l'intérieur de vous lors de cette célébration durant laquelle vous avez lu et commenté un texte violent de saint Marc

Gabriel Ringlet - J'avoue, en toute simplicité, que je n'ai jamais été... j'allais presque dire à ce point sans voix ! La voix partait, je n'arrivais pas à la poser, la gorge était exceptionnellement serrée.
J'étais dans cet état là depuis un jour ou deux et je n'en suis pas encore tout à fait remis.
Mais je dois dire que le fait d'avoir parlé, avant, avec François, le petit garçon de douze ans qui a chanté la chanson d'Yves Duteil, m'a beaucoup aidé.

Propos recueillis par Sébastien Ministru

Mélissa :Son album ('TéléMoustique'du jeudi 29 août 1996 page 18 à 24)


Mélissa

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 18 à 24

P18 (En haut) Mélissa 15 jours (Septembre 1986)

(En bas) Mélissa 15 jours dans les bras de sa maman et Grégory dans les bras de son papa


P21 : (En haut) Mélissa 4 ans et son frère

(Bas) Julie et Méissa à 5 ans, dans la classe de 3ème maternelle
(Toutes deux à gauche, à côté de l’institutrice)

P22 : (En haut) Mélissa 6 ans en septembre 1992)

(En bas) Mélissa 7 ans, avec sa cousine Manon et son frère Grégory

P23 :(En haut) Mélissa 7 ans, Grégory 9 ans et leur chien Bilou

(En bas) Mélissa 8 ans et ses deux copines, Jennifer et Audrey


P24 : Mélissa 8 ans (Pâques 1995)




Julie: Son album (Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 9 à 14)


Julie

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 9 à 14

Page 9 : Sa naissance le 29 novembre 1986

Page 10 : Son baptême

Page 13 : Saint Nicolas est venu

Page 14 : En haut : Vacances à StTropez

En bas : Mélissa et Julie touts deux assises au 2ème rang à gauche
(Photo de classe en 3ème primaire en 1995 …….)



Il fallait durer('TéléMoustique'jeudi 29 août 1996 page 8)



Il fallait durer

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 8

Il fallait défier ceux qui disaient d'attendre bien sagement... Vos parents ont lancé un appel.
Un Comité de soutien s'est formé pour dire qu'ils avaient raison de ne pas être sages et de se soumettre.

Etre révolté est déjà la mission de tout être humain vivant en notre siècle.
Mais être révoltés était pour vos parents la seule façon d'être responsables de vous.
Ils se battaient pour vous et aussi pour tous les enfants afin que soit reconnue l'importance primordiale de la place de l'enfant dans notre société. Pour que toute disparition d'enfant soit considérée comme prioritaire.

"Une hypothèse anime le combat acharné et légitime des parents contre la fatalité et la routine: c'est que Julie et Mélissa sont toujours vivantes."

Tel était le texte qui fut signé par tous ceux qui ont adhéré au Comité de soutien des parents de Julie et Mélissa durant le mois de janvier 1996.

Le Comité de soutien a été constitué pour témoigner partout, à tous les niveaux de pouvoirs, que l'acharnement des parents était fondé, respectable, exemplaire, alors que les parents avaient contre eux la culpabilité, la médisance, la suspicion, les rumeurs, les lettres obscènes, le non-soutien judiciaire, l'abandon psychologique, le déni de l'existence de réseaux organisés pour l'enlèvement des enfants et les obus sexuels...

La société peut se sentir coupable, pas eux... pas vos parents.

Qu'ils soient au moins apaisés que partout nous porterons encore témoignage que tout ce qui a été humainement possible de faire a été fait par eux, qu'ils n'ont rien laissé au hasard, même s'ils se sont heurtés à des murs aveugles.

Ne fallait-il pas, devant l'urgence, en appeler à ce que toutes les énergies possibles soient rassemblées et coordonnées?

Lettre des adolescents du quartier de Marcinelle('Télé-Moustique'du jeudi 29 août 1996 page 6 et 7)


Lettre des adolescents du quartier de Marcinelle

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 6 et 7

Nous adolescents et enfants résidants dans ce quartier de Marcinelle ;

Nous sommes choqués et atterrés de ce qui c’est passé et que nous n’avons pu être d’aucun secours ces petits êtres chétifs. Nous souhaitons que la justice agissent pour que jamais cela ne se reproduise.

Et que ces petites filles ne soit pas mortes pour rien et nous espérons qu’après notre requêtes elles puissent reposer en paix.

Nous espérons aussi qu’à l’avenir notre quartier où plutôt notre pays ne sera plus jamais Sali par des monstres de cette espèce et que nos parents et nous même puissent vivrent en toute sécurité et calme.

A ces messieurs du gouvernement, si vous avez des enfants où petits enfants, pensez que cela aurait pu les vôtres !

Si ces monstres n’ont pas su voir en ces petites filles, des êtres humains, qu’ils finissent sur une chaise électrique où chambre à gaz où encore donner les nous alors !
Car votre punition ne fera jamais assez souffrir comme elles ont souffert.

« REFLECHISSER »

A bas la violence ! Vive la joie de vivre en paix !

Alexandre 9 ans ;Aurélie 3 ans ; Anthony 9ans : Maoro 2 ans :Francesco 4 ans :Laeticia 13ans ; Nordine 17 ans ; Ricardo 8 ans ; Ophélie 6 ans ; Jonathan 12 ans ; Stéphanie 13 ans ; Lina 10 ans :
Giovani 12 ans : Monalisa 13 ans :Cindy 9 ans ; Pascal 16 ans ; Jennifer 4 ans ; Nicolas 3 ans ; Virginie 11 ans ; Sandra 8 ans ;Fatima 11 ans ; Sabrina 15 ans ; Morgane 5 ans ; Michael 5 ans ;Florence 10 ans ; Lara 6 ans ……..



Je partirais avec toi('Télé-Moustique' du jeudi 29 août 1996 page 6)



Je partirais avec toi

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 6

(L Quarantotto - F. Sartori) par Andréa Bocelli

Quand je suis seul
Je rêve tourné vers l'horizon
Et les mots me manquent
Oui, je sais qu'il n'y a pas de lumières
Dans une chambre,quand le soleil ne brille pas
Si tu n'es pas là avec moi, avec moi,
Aux fenêtres
Montre à tous mon coeur,
Que tu as embrasé
Enferme en moi
La lumière que tu as rencontrée en chemin
Je partirai avec toi
Et des pays que je n'ai jamais
Vus et où je n'ai vécu avec toi
Maintenant, oui, je vivrai
Je partirai avec toi
Sur des bateaux, de par les mers
Qui moi je le sais
Non, non, n'existent plus
Mais avec toi j'y vivrai
Quand tu es loin
Je rêve tourné vers l'horizon
Et les mots me manquent
Et moi oui je le sais
Que tu es avec moi
Toi, ma lune, tu es avec moi
Mon soleil, tu es avec moi
Avec moi, avec moi, avec moi
Je partirai avec toi
Et des pays que je n'ai jamais
Vus et où je n'ai vécu avec toi
Maintenant, oui, j'y vivrai
Je partirai avec toi
Sur des bateaux, de par les mers
Qui moi je le sais
Non, non, n'existent plus
Mais avec toi j'y vivrai à nouveau
Je partirai avec toi
Sur des bateaux, de par les mers
Qui moi je le sais
Non, non n'existent plus
Mais avec toi je les vivrai à nouveau
Je partirai avec toi
Moi avec toi
(Copyright: 1995 Insieme SRL/Double Marpot Ed. Musicali)
__________________

VOLE

Céline Dion

Vole vole petite Eve
Ma douce, mon hirondelle
Va-t'en loin, va-t'en sereine
Qu'ici rien ne te retienne
Rejoins le ciel et les terres
Laisse-nous, laisse la terre
Quitte ton manteau de misère
Change d'univers

Vole vole petite soeur
Vole, mon ange, ma douleur
Quitte ton corps et nous laisse
Qu'enfin ta souffrance cesse
Va rejoindre l'autre rive
Celle des Fleurs et des rires
Celle que tu voulais tant
Ta vie d'enfant

Vole vole mon amour
Puisque le meurtre est trop lourd
Puisque rien ne te soulage
Vole à ton dernier voyage
lâche tes heures épuisées
Vole tu l'as pas volé
Deviens souffle sois colombe
Pour t'envoler

Vole vole petite flamme
Vole mon ange, mon âme
Quitte ta peau de misère
Va retrouver la lumière

Ils avaient raison, terriblement raison !(Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 4 et 5)



Ils avaient raison, terriblement raison !

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 4 et 5

Nous avons bien conscience de la difficulté de la tâche à laquelle sont confrontés les gendarmes et les policiers. On a également bien compris que l'on était entourés d'hommes de bonne volonté, prêts à faire autant d'heures supplémentaires qu'il sera nécessaire.

Mais le problème n'est pas là. En fait,nous ne parvenons pas à nous départir du sentiment que les enquêteurs ne sont pas à la hauteur. Ce ne sont pas des spécialistes dans le domaine des disparitions que l'on serait en droit d'attendre en tant que parents victimes.

En septembre 1995, dix semaines après l'enlèvement de leurs petites, les parents de Julie et Mélissa sentaient déjà très bien que quelque chose n'allait pas dans les recherches officielles visant à les retrouver.

Et ils avaient raison. Terriblement raison.


Déjà ils nous dénonçaient les "lacunes de l'enquête", ses "improvisations", les "silences insupportables de la juge d'instruction" qui refusait toute communication avec eux; "On la trouve incroyablement insensible.
Elle a des réactions inhumaines. La seule fois qu'on l'a rencontrée, elle nous a dit que notre dossier n'émit pas le seul qu'elle avait à traiter". Une attitude bureaucratique qui n'a d'ailleurs jamais varié. Jusqu'à ces dernières heures où les parents ont dû négocier pour obtenir...une mèche de cheveux de leur fille.

En septembre 1995, Julie et Mélissa étaient encore en vie. Et les enquêteurs liégeois avaient reçu des informations précises sur le ravisseur, ses projets d'enlèvements d'enfants, l'aménagement de ses caves, etc.

Mais des perquisitions bâclées condamnaient cette piste. La bonne piste.
Quelques mois plus tard, en décembre 1995, les parents de Julie et Mélissa nous révélaient une autre anecdote horrible
"Nous avons eu droit à une déclaration insensée et cruelle du procureur du Roi de Liège, Mme Bourguignon. Nous étions dans le bureau d'un substitut du parquet de Liège et elle y est entrée.
Elle nous a salués en nous présentant ses "sincères condoléances". On n'a pas compris son attitude. A vrai dire, cela nous a écoeurés".
En décembre 1995, Julie et Mélissa étaient encore en vie. Mais plus pour la justice liégeoise...

Et puis, il y eut le premier anniversaire de l'enlèvement. Et ces propos tellement prémonitoires que nous tenaient les parents en juin 1996.

Quel scénario imaginez-vous?

Gino Russo, papa de Mélissa - Elles peuvent avoir été victimes d'un trafiquant d'êtres humains, d'un réseau de pédophilie.
Pourquoi pas? Il y a quelques mois, quand on évoquait cette hypothèse, on nous disait que cela n'existe pas chez nous. Mais plus on avance dans le temps, plus on rencontre des officiels qui nous affirment que cela existe. C'est tout de même bizarre, vous ne trouvez pas?

Vous imaginez qu'elles sont dans un pays X, exploitées d'une manière ou d'une autre?

Louise Lejeune, maman de Julie - Pour ce qui est du pays, on peut tout imaginer. Et si elles étaient quelque part en Belgique?
Jean-Denis Lejeune - En tout cas, je constate qu'on a mis au jour un réseau de pédophilie international à Bruxelles en janvier dernier. Dès lors, il nous apparaît insupportable que des hypothèses allant vers ce type de réseau soient encore minimisées par les enquêteurs!

N'est-ce pas encore plus horrible de penser qu'elles seraient "utilisées" en ce moment même dans le cadre d'un réseau pédophile ou autre que... d'imaginer une issue fatale?

Gino - Si. C'est plus horrible. Mais on se dit que si on les retrouve vivantes, quels que soient les sévices qu'elles aient subis, on aura encore toute la vie pour essayer de réparer...

Désormais, les parents des deux petites martyres auront toute la vie pour tenter de pardonner. Si c'est possible.

En juin 1996, Julie et Mélissa étaient déjà mortes. Mortes de faim, certes. Mortes aussi de l'incompétence des "professionnels" chargés de les retrouver.

Comment oublier les airs de matamore de cet enquêteur croisé un soir chez les parents de Julie et Mélissa?

Aujourd'hui, le temps du jeu du chat et de la souris, des sourires moqueurs et des non-dits est terminé.
Il ne fait d'ailleurs pas de doute qu'un enquêteur pleure. Nous pleurons tous. Mais qui peut comprendre la souffrance des parents et de leurs proches?

Michel Bouffioux.

Nous sommes de la même famille(Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 2 et 3)



Nous sommes de la même famille

Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996 page 2 et 3

Couvrant pour « Télémoustique » l'affaire Julie et Mélissa, notre reporter Michel Bouffioux a très vite perçu que quelque chose « clochait » dans l'enquête.
A l'écoute des parents des deux fillettes depuis le début, partageant, au sein du Comité "Julie et Mélissa", leur combat pour se faire entendre – et informer – par la Justice, il est devenu un proche de Louisa et Jean Denis Lejeune, Carine et Gino Russo.
Il témoigne ici de son émotion par une lettre adressée aux parents.

____________

Nous sommes de la même famille


Jean-Denis, quand je suis arrivé devant la maison de Carine et Gino, ce jour-là, je ne savais pas quoi te dire. Tu as interrompu l'interview que tu donnais à une télé étrangère et nous sommes tombés dans les bras l'un de l'autre.
Cela a duré un long moment. Puis, la voix nouée, je t'ai lancé "courage". Parole de circonstance. Tellement bêtement de circonstance.


Ensuite, passant par la porte du jardin, c'est toi, Gino, qui m'a accueilli. « On n'était pas tellement loin de la vérité, hein Michel? », m'as-tu dit tout de suite. « Non, Gino, on n'était pas tellement loin.
C'était bien un réseau qui détenait vos filles. »

Et les moqueries des enquêteurs liégeois, les railleries de ce « Monsieur je sais tout », ce policier que je croisai chez vous, un soir, me sont revenues à l'esprit.

Louisa, comme à ton habitude, tu fus plus discrète. Comme habitée par une force surnaturelle, une sérénité impressionnante. Je t'ai embrassée. Je t'ai regardée. J'ai lu dans le fond de tes yeux ta détresse tellement bien maîtrisée. Et je n'ai rien dit. Parce que je me sentais mal à l'aise d'encore moins bien faire face aux terribles nouvelles que toi.

Et puis, toi, Carine qui était assise devant l'ordinateur. Tu t'es retournée. On s'est embrassés. On a pleuré. Tu avais l'air tellement marquée. Amaigrie. Ton regard me demandant une aide que je voudrais tellement te donner. « Il faut continuer, sinon ce sera un gâchis complet », as-tu dit.

On continuera, Carine. On mettra le doigt sur tous ces errements qui ont coûté la vie à Julie et Mélissa.

II y a une chose que je ne vous ai pas dite, ce jour là. A vous tous.
Alors je vous l'écris: Carine, Louisa, Gino, Jean-Denis, désormais, on est amis pour la vie. Nous faisons partie de la même famille. Et d'ailleurs, comment pourrait-il en être autrement?
Michel.

Julie et Mélissa: L’album de leur vie(Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996)



Julie et Mélissa

L’album de leur vie

POUR QU’ON NE LES OUBLIE JAMAIS

« UNE » du Supplément à « Télé-Moustique » du jeudi 29 août 1996


« Nous n’avions que huit ans et beaucoup de rêves…»

Des messages de haine aussi, pour le tortionnaire Marc Dutroux.('Paris Match'29 août 1996)


Sur les murs de la maison où ont été retrouvées Sabine et Laeticia, et où sont mortes de faim et de soif Julie et Mélissa,les messages d’amour et de sympathie s’accumulent .

Des messages de haine aussi, pour le tortionnaire Marc Dutroux.

« Paris Match » du jeudi 29 août 1996

SA MERE ÉCLAIRE LE MYSTERE DUTROUX('Paris Match'29 août 1996)


SA MERE ÉCLAIRE LE MYSTERE DUTROUX

Voisins, policiers, avocats, juges... il les a tous bernés.

"Marc n'a aucune morale, s'insurge t elle, il livrait les enfants aux pédophiles pour de l'argent"


« Paris Match » du jeudi 29 août 1996

Désormais, on ne verra plus Marc Dutroux que menottes aux poignets des cendre de ces fourgonnettes qui mènent de geôles en prétoires. Tant mieux. Aujourd'hui, même sa mère, Jeannine Lauwens, sait ce qu'il vaut.

Un pointeur, comme ils disent en prison.» Et de la pire espèce. Voleur, vendeur, violeur, tueur... de petites filles. « N'inventez pas je ne sais quelle histoire qui ferait de lui un enfant martyr, explique t’elle dans l'encadrement de la porte de la maison blanche de la rue du village, à Obaix, sur laquelle elle a noué un ruban noir en signe de deuil. Le prendre pour un malade, ce serait trop facile. C'est un pervers, simplement.»

Pervers et rebelle a toute autorité, toute règle, d'aussi loin que s'en souvienne celle qui le mit au monde le 6 novembre 1956, à Ixelles, en Belgique.

Lorsque, en 1986, on lui propose d'entrer, comme sa seconde épouse, Michèle Martin, et sa belle-mère, Henriette, chez les témoins de Jéhovah, le refus de Marc est éloquent: « Vous êtes des moutons dont on tond la laine. Moi, je suis de la race de ceux qui tondent les moutons! »
Une supériorité dont il se persuade depuis longtemps. Cela n'est pas arrivé tout de suite.
D'abord, il y a eu les premiers pas au Congo belge où ses parents, instituteurs, trouvent un poste avant que l'indépendance ne les en chasse. En 1960. Puis il y aura l'école communale primaire, à Roux, où son père et sa mère enseignent. Sans problème.

Après huit années sans vacances, si ce n'est de rituelles incursions dans le jardin des grands-parents maternels, horticulteurs à Jemeppe-sur-Sambre, la famille Dutroux, qui s'est enrichie de quatre autres enfants, trois garçons et une fille, acquiert, en 1970, le chalet 169 du camping « De Tourist », à Wilkskerke : six mètres sur six, deux chambres, une pièce à tout faire et un cabinet de toilette, non loin de la grande plage du nord de Middelkerke, jalonnée de bunkers. Marc, à 12 ans, se révèle en société. Au « 170», Armand et Amélie, que les années ont privés de la vue, gardent un souvenir précis de lui. « Marc ne se mêlait pas aux groupes. Quand on ne faisait pas à son idée, il s'en allait ailleurs. Les autres enfants Dutroux étaient plus sociables.»

Ils n'ont pas oublié non plus Victor, le père Dutroux, qui proposait à tous les pékins du coin de s'initier aux échecs, dont il avait été champion junior de Belgique, et qui, subitement, un été, a disparu. Jusqu'à ce qu'il réapparaisse, sans sa famille, mais avec de nouvelles conquêtes. « Elles n'étaient pas bien vieilles, dit Armand. Victor, le coquin, disait qu'il leur donnait des petits cours. Parfois, il venait avec deux filles.

Une fois, il y en a une qui, en pleine nuit, a crié au secours. Au matin, ils étaient tous partis. Quand Victor est revenu, la directrice du camping lui a dit que sa présence n'était plus souhaitable.» Tel père?... Evidemment, Victor Dutroux, lui, dément.

Jusqu'à l'âge de 17 ans, Marc, sa mère, ses frères et Valérie, sa sueur, continuent de fréquenter, en été, ce camping à caravanes de bois, dérisoires roulottes sans roues, alignées sur de longues allées de béton. En 1968, Marc termine ses études primaires. « Ce n'est alors ni un bavard ni un "taiseux". Il ne lit guère autre chose que des B.d.»Jeannine l'inscrit tout de même en athénée, équivalent belge du lycée, à Morlanwelz. Il est renvoyé encore une fois pour indiscipline. Idem dans les trois écoles professionnelles où il tente d'achever sa scolarité et propose déjà sous le manteau des photos osées à vil prix. «J'ai fini par le mettre en A3 pour qu'il devienne ajusteur-fraiseur sans qualification », conclut sa mère de guerre lasse. Elle se souvient avec soulagement du départ, à 18 ans, de Marc,
« qui voulait sans cesse être plus fort que tout le monde et s'attaquer toujours aux plus faibles.»

Dans la région de Charleroi, où il s'installe, il commence à « chipoter », comme on dit de l'autre côté des Ardennes. « Il avait une moto, se rappelle Jeannine, qu'il vendait à trois ou quatre personnes différentes.

A cette époque, il a commencé à tourner autour des filles. Il s'était même inscrit à la patinoire pour en ramener.» Il finira par rencontrer Françoise. Elle lui trouve l'air timide et tellement fragile ! Amoureux, à 20 ans à peine, il épouse cette orpheline. L'année suivante naît un de leurs deux fils.

Quatre saisons plus tard, en 1982, on les retrouve à Goutroux, rue des Anémones. Répétant l'attitude que son père avait eue à son égard, Marc ne supporte pas l'intrusion de ses propres enfants dans sa vie de couple.
Ses voisins le remarquent. On n'a pas oublié, à Goutroux, son goût immodéré pour la musique aux heures les plus tardives, ni les cris des enfants, si petits, enfermés seuls dans leur chambre lors des sorties de Françoise et Marc. On se souvient aussi de scènes conjugales violentes. « Elle était si faible, il ne risquait rien à la frapper », commente laconiquement Jeannine.

Françoise a peur. Elle se met à espérer ces absences que multiplie Marc, en même temps que les conquêtes. Pour satisfaire un appétit sexuel « boulimique », d'après des témoins de cette époque et des suivantes, Dutroux a installé une caravane face à sa maison.Il y visionne des vidéos porno et reçoit des compagnons de ferraille, quelques relations policières et, surtout, des filles.

Parmi celles qui grimpent et se dénudent dans la garçonnière à quatre roues, en 1983 il y a Michèle Martin, une jolie fille qui a perdu son père à l'âge de 6 ans dans un accident de voiture.
« Instit, comme toi », explique t-il fièrement à Jeannine. Blonde et bien roulée, une fille de trop pour Françoise, qui, les enfants sous le bras, se sauve.

En 1985, leur divorce est prononcé. De temps à autre, Marc visite ses deux fils. Entre-temps, il en a un troisième, de Michèle, avec laquelle il s'installe à Marcinelle, dans la banlieue de Charleroi.


C'est là qu'ils' « accomplit », entre voie ferroviaire et hauts fourneaux. Une étroite maison de brique rouge.
Celle-là même où, plus tard, derrière un placard coulissant, il entraîne dans une cage sans issue ses petites proies chloroformées.

En 1985, Marc s'achemine vers son monstrueux destin. A la fin de l'année, il est interpellé et incarcéré pour vol avec violence et torture. Sa victime : une quinquagénaire qu'il torture pour obtenir le secret du chemin de ses économies.
S'ajoutent au palmarès les enlèvements, séquestrations et viols de cinq filles, dont la plus jeune n'a que 12 ans.

En 1989 a lieu le procès. Résultat : Michèle, en dépit des pétitions de soutien, écope de trois ans de prison pour complicité et participation aux séquestrations. Marc, lui, est condamné à treize ans et six mois.
Il n'en fera que le tiers, bénéficiant en 1992 de la liberté conditionnelle que l'on connaît, et se targuant aussitôt des « solides protections » qui l'ont permise.

A sa sortie, les fils de son premier mariage, qui le surnomment « la Taupe », refusent de le revoir. Petit à petit, les liens du passé se délient. Son père, en qui il n'a jamais pu trouver un modèle, s'est enfoui dans une tanière, à Gand. Au milieu de deux mille pots de yaourt dans lesquels il cultive, avec un soin maniaque, des plantes, Victor vit reclus dans un studio cloaque où nul ne pénètre depuis dix ans.
Puis c'est avec sa mère que Marc se brouille, lorsqu'il essaie de la dépouiller de sa maison de Jemeppe-sur-Sambre...

Son frère cadet, Serge, ne supporte pas ces disputes et toutes les histoires autour; il se pend. C'était en 1993.

Ensuite... Ensuite, Marc s'ébauche une nouvelle famille. Facile à dominer. A Michèle, qu'il a épousée en détention, après Frédéric, 12 ans aujourd'hui,
il fera deux autres enfants Andy, 3 ans, et Céline, 14 mois, née alors que Julie et Mélissa agonisaient.

Le cercle des amis se fait aussi plus précis. Chaque jour, dans un périmètre qui ne dépasse guère une cinquantaine de kilomètres autour de Charleroi, il va les visiter.

La plupart sont ou ont été comme lui ferrailleurs, trafiquants de voitures ou de pneus.

Il y a là tous ceux que l'on retrouve aujourd'hui dans cette affaire : Claude Thirault, 30 ans, Bernard Weinstein, le Français que Dutroux enterre, inconscient mais vivant, juste au dessous de julie et Mélissa.

Il y a aussi Jean-Michel Nihoul, qui, avec son téléphone portable et ses beaux costumes, fait figure de milliardaire de la bande.
Il y a enfin Michel Lelièvre, l'ancien toxicomane. Et Michael Diakostavrianos, dit « Michel Tout Fou », qui, d'après sa soeur de 18 ans, a un « grain » et « adore faire la sortie des écoles, mais juste pour draguer ».

Au coeur d'une région où le chômage fait 30 % de victimes, Dutroux et son train de vie de chômeur-chipoteur de luxe font impression.

Même si, officiellement, il ne perçoit qu'une allocation sociale d'environ 6 000 francs français, beaucoup ont entendu dire qu'il a payé cash les six maisons acquises au cours des dernières années.

Toujours en bleu de travail, souvent dans des voitures différentes, lisant les cours de la Bourse et se jetant sur n'importe quelle rondelle de caoutchouc, persuadé de la revendre, l'homme intrigue.

Tantôt armé, il joue les caïds dans un bar et susurre à l'oreille d'une petite frappe qu'il a déjà tué, histoire de la faire frémir; tantôt affable auprès de voisins qui s'interrogent sur ses terrains qu'il retourne, il propose ses services de terrassier à un prix défiant toute concurrence; tantôt voulant conquérir un proche voisin, père d'un ami de son fils Frédéric, il propose une partie d'échecs, auxquels, initié par son père, il excelle.

Quant à Michèle Martin, on admire sa douceur, la dévotion qu'elle a pour ses enfants et sa décision d'abandonner le métier d'institutrice pour s'occuper de son foyer. Lui bricole, elle jardine.
On croirait presque à cette image du couple idéal, si l'on n'avait pas vu régulièrement Michèle «sortir avec des coquards ». «On avait même pitié d'elle », commente une voisine. Les Dutroux, la nuit, font des travaux et aménagent leur cave en labyrinthe et cages à fillettes, tandis que, le jour, ils font aboyer les chiens et jouent du synthétiseur pendant des heures.

Toute une stratégie du bruit. Marc faisait croire à ses otages qu'en criant elles attireraient l'attention de vilains prêts à les tuer.

Et cela a marché. En 1993, les gendarmes de Charleroi perquisitionnent la maison de Dutroux. Ils ne découvrent aucune de ses cachettes. Idem en 1995.
Patience... Encore une année et on va serrer le monstre à l'histoire tristement insipide en façade et abominablement cruelle en sous-sol.

1995, donc. Juin, précisément. Il y a là réunis Dutroux, Lelièvre - face de rat coiffée d'une casquette noire - et Weinstein - sa grosse silhouette et son odeur d'ours mal douché.

Par boutade », expliquera-t-il aux gendarmes, Marc leur propose «pour 100 000 à 150 000 francs (18 000 à 27000 francs français) de «ramener une enfant ».
Ils reviennent le 24juin, avec Julie et Mélissa. La cage n'était pas encore prête.

En août, non loin d'Ostende, c'est An et Eefje que l'on enlève. Puis c'est Dutroux qui repart en prison.
En décembre, dans le cadre d'une affaire de règlement de comptes entre voleurs de voitures rivaux.

En mars 1996, quand il sort, il découvre dans la cage de Marcinelle les petites Julie et Mélissa agonisantes,que ni Michèle ni Lelièvre n'ont nourries.

Il devient nerveux. De Sars-la-Buissiere, où il enterre leurs corps, il ne bouge presque plus. Des oies gardent le fond du jardin. Deux bergers allemands, installés au grenier, guettent à l'entrée tous les intrus approchant.

La perquisition sans résultat des gendarmes de Charleroi à cette époque va le ragaillardir.
Il court à sa perte. Le 28 mai 1996, à Kain, il embarque Sabine Dardenne et l'installe dans la planque de Marcinelle.

Le 9 août, Laetitia Delhez vient l'y rejoindre. Mais la camionnette dans laquelle il la contraint à monter est repérée. Trop tard. On l'interpelle le 13.

Avec ses cachets d'acteur d'infâmes pornos, ses rançons écoeurantes, ses meurtres lâches, ses victimes innocentes, ses mensonges minables, ses médiocres serviteurs, son bleu de travail et sa moustache, c'était Barbe Bleue. Effrayant !

La sainte fureur du prêtre ('Paris Match'29 août 1996)



« Quatorze mois de tourments et de douleur, comme quatorze stations d’un calvaire insoutenable que, pourtant, vous avez soutenu… »

« Paris Match » du jeudi 29 août 1996


La voix du père Gaston Schoonbroodt s’élève dans la basilique.
Ce prêtre ouvrier connaît depuis longtemps les familles de Julie et Mélissa.

« Le bon dieu est-il sourd ? Où sont allées les prières ?..
Est –ce blasphémer que de parler ainsi et laisser exploser notre révolte, notre douleur et notre sincérité ?.... »


La voix du prêtre se brise à mesure qu’il tente de maîtriser sa fureur.
« Il ne faut pas que la célébration religieuse de ce jour soit l’occasion de remuer le fer dans la plaie, lâche t’il dans un souffle, mais elle doit réserver à Julie et Mélissa la première place… »

Enfin il se tournera vers les familles, le poing serré, comme pour les supplier de ne pas céder, de tenir bon.

Le martyre de Julie et Mélissa('Paris Match'29 août 1996)



Le martyre de Julie et Mélissa

« Paris Match » du jeudi 29 août 1996

Elles avaient 8 ans, elles étaient inséparables.Le jour de leur enlèvement, après un après midi de jeux et de rire, Julie et Mélissa sont partie en balade.Elles voulaient cueillir des fleurs pour leurs mères.

Depuis la maternelle, Julie et Métissa égaient inséparables, les meilleures amies du monde, l'incarnation de la joie de vivre. le 24 juin 1995, chez Mélissa, les deux fillettes de 8 ans ont répété le ballet qu'elles voulaient présenter à la fêle de leur école.

Elles ont essayé leurs costumes, puis, à 17 heures, elles sont parties faire une courte promenade, avant que la mère de Julie ne vienne rechercher sa fille. « Du jardin, on pouvait les voir passer sur le chemin, expliquait Gino Russo, le père de Mélissa. Il n'y avait aucun danger.» Julie et Mélissa ne sont jamais rentrées. Plus tard, les chiens policiers ont perdu leur trace sur un pont qui enjambe l'autoroute Liège Paris, à moins d' 1 kilomètre de leur point de départ.

Ensuite, plus rien, sinon des fausses pistes, jusqu'en Amérique du Sud. Pourtant, leurs parents ont toujours crié «Elles sont vivantes.»

Et elles l'étaient, en effet, durant près de neuf mois. Une vie de tortures, de coups, de viols.

Une agonie et un enfer interminables.

La délivrance !('Paris Match'29 août 1996 p5'6)


La délivrance !

« Paris Match » du jeudi 29 août 1996 page 5 et 6

Pour Sabine (12 ans), les deux mois et demi de cauchemar ont cessé avec l'arrivée de la police dans le réduit où Laetitia (14 ans) l'avait rejointe une semaine auparavant. Il s'en est fallu de peu que leur prison ne se transforme en tombeau.

Aussi leur libération ressemble-t-elle à un retour inespéré vers le monde des vivants. C'est en s'approchant de la camionnette de Dutroux, qui faisait mine de lui demander un renseignement, que Laetitia a vu sa vie basculer. Entraînée de force à l'intérieur du véhicule, elle sera droguée, puis violée par cet impitoyable pervers.

Pour seule pitance, les deux adolescentes ne reçoivent qu'un peu de pain et quelques fruits. Elles sont obligées de se laver avec leurs bourreaux. Fort heureusement pour elles, un témoin capital a repéré le manège du véhicule.


Par jeu, il a mémorisé le numéro minéralogique. Libérées, elles n'osent encore croire au miracle. Dans leurs yeux, les larmes de joie se mêlent aux pleurs.

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Légende photos

Soutenue par un policier, Laetitia (à g.) a du mal à réaliser que l'horreur vient de prendre fin. Il faudra qu'elle retrouve sa place au sein de sa famille (au centre).

Ramenée chez elle par son père, Sabine (à dr.) va se précipiter dans les bras de sa grand-mère en bredouillant :

« Ma maison... Vous êtes à moi pour toujours... Vous m'avez manqué... Je vous aime tous.»

Les Diaboliques('Paris Match'29 août 1996)


Les Diaboliques

La Belgique, révoltée, découvre le visage ordinaire du couple le plus pervers et le plus sadique.

Bourreaux et tueurs d’enfants



« Paris Match » du jeudi 29 août 1996

Il a fallu protéger d'un gilet pare-balles cet homme, que la presse belge appelle le « Monstre » ou l'«Ogre de Charleroi ».

Marc Dutroux conduit les policiers à l'endroit où sont enterrées trois de ses victimes. Présenté au juge, sur son passage, la foule hurle : « Pendez-le !» Toute la population belge partage une douloureuse colère qui appelle la vengeance depuis les terribles veux de Marc Dutroux.

Chef présumé d'un réseau pédophile, il est peu probable que cet homme ait pu agir sans la complicité de sa femme, Michèle Martin, déjà condamnée en 1989 avec lui pour complicité de viols de mineures.
Arrêté le 13 août, il n'a pas tardé à révéler l'emplacement du réduit de béton où il séquestrait vivantes Sabine Dardenne (12 ans) et Laetitia Delhez (14 ans).

Et ensuite on a continué à s'enfoncer dans l'horreur quand il a orienté les enquêteurs vers la propriété de Sors-la Buissière. C'est là que vont être exhumés les corps de Julie et Mélissa, deux fillettes que leurs ravisseurs avaient laissé mourir de faim.
Ils vont aussi déterrer le cadavre de Weinstein, un petit truand, drogué puis enterré vivant par celui qui pourrait être l'auteur de nombreux autres crimes.


Légende photo de gauche :

A son arrivée au tribunal de Neufchâteau, le vendredi 16 août, plus de deux cents personnes ont hué Michèle Martin, la femme de Marc Dutroux. Elle a beau clamer son innocence, rien ne plaide en faveur de cette ancienne enseignante, déjà condamnée en 1989 à six ans de prison pour complicité avec son mari.

Légende photo principale :

Pour lui éviter le lynchage,la police a mis un gilet pare-balles à Marc Dutroux

Lors de ses tra nsferts , Dutroux bénéficie de mesures de sécurité exceptionnelles : gilet pare-balles et hélicoptère.
Un dispositif chargé de prévenir les gestes de ceux voudraient faire justice bien faire justice eux-mêmes.

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