dimanche 21 septembre 2008

Le profil du serial killer (« Dernière Heure »10 septembre 1996 pg 5)


Le profil du serial killer

LE MONSTRE DE SARS-LA-BUISSIÈRE N’EST PAS LE PÉDOPHILE-TYPE

 « La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 5

 BRUXELLES - Dutroux est-il un pédophile ou son profil s'apparente-t-il plutôt à celui du dangereux psychopathe, type prédateur, tueur en série ou serial killer ? Pour l'avocat nef Vermassen, ténor du barreau en Flandre, notre homme n'a pas exactement le profil caractéristique du pédophile. Me Vermassen, par ailleurs criminologue,réalise depuis deux ans une enquête fouillée sur les meurtres commis dans notre pays, tout particulièrement les meurtres en série.Il a une idée précise sur Marc Dutroux

Beaucoup d'éléments, dans sa personnalité, m'incitent à parler d'un tueur en série : au départ, il y a plusieurs victimes - et je pense, hélas qu'il y en aura encore. Il y a ensuite du sadisme, une grande perversité. Cet homme, enfin, ne montre pas de regret, de sentiment. Il apparaît vraiment comme un psychopathe. Les autres personnes sont pour lui des objets. Heureusement que l'on a arrêté Dutroux avant qu'il ne commette d'autres forfaits.

Des psychopathes de son genre, en effet, tuent,tuent encore, et ont toujours la volonté de tuer en préparant soigneusement leur coup : leur cas est irrécupérable. La pédophilie est juste un aspect de tout cela.

Aux Etats-Unis, on relève deux catégories de serial killers : ceux qui sont structurés, qui préparent tout avec minutie, et ceux qui agissent par impulsion. Dutroux relève de la première catégorie. Un autre élément qui me fait penser qu'il est tueur en série est la façon dont il avoue : au départ, il donne des renseignements imprécis, vagues, il joue le grand chef. Pour ces personnes, il est en effet important d'exercer sa puissance sur les autres ».

Le FBI en Belgique

A Neufchâteau, ce ne serait donc pas un hasard si deux enquêteurs du FBI, venus de la base de Quantico en Virginie, plus précisément de l'unité enlèvements d'enfants et tueurs en série, se sont joints aux enquêteurs belges, pour, entre autres, affiner les techniques d'interrogatoires et, a partir de là, le portrait des suspects. Pour la petite istoire, ce sont deux autres enquêteurs du FBI-Virginie, John Douglas et Marc Olshaker, qui avaient créé le profil de Hannibal  le cannibale dans le célèbre Silence des Agneaux, dont certaines scènes ont d'ailleurs été tournées à Quantico.

Ces deux spécialistes, qui ont publié un livre sur les serial killers, ont fait parler 40 de ces monstres. Ils se sont exprimés quant à l'affaire Dutroux et à la manière de le faire parler: « Il faut apporter le plus possible d'éléments du crime dans la pièce où a lieu l'interrogatoire : les chaînes avec lesquelles les fillettes ont été entravées, les matelas où elles dormaient, les pilules qu'il utilisait pour les droguer, des photos des enfants kidnappés et disparus... Seulement de cette façon, vous pouvez briser son contrôle.

Contrôle : c'est le mot clé ! Un serial killer n'a pas de contrôle dans sa vie. Il se construit donc son propre monde dans lequel il exerce son contrôle absolu c'est comme cela qu'il trouve sa satisfaction. Pour avoir le contrôle sur Dutroux, quand on l'interroge, pour le déstabiliser, il faut dès lors lui amener autant de preuves que possible de ce qu'on lui reproche ».

Une méthode que confirme Gilles Bourdoux, criminologue, maître de conférences à l'université de liège à l'école de criminologie: « Ces interrogatoires nécessitent une préparation rigoureuse,  où l'on envisage deux à trois scénarios possibles, en fonction des réponses du suspect. En général, on procède à plusieurs : un enquêteur- par ailleurs formé à /a psychologie - interroge et l'autre observe, les mimiques, les hésitations...

C'est un jeu subtil du chat et de la souris »... Les serial killers, ajoutent les enquêteurs du FBI, finissent par parler: l'aveu final, c'est aussi le moyen de revivre, une dernière fois, les atrocités commises.

Nancy Ferroni

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LE CONSEILLER COMMUNAL ARRÊTÉ POUR PÉDOPHILIE

Tombeur a suscité une vague de solidarité !

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 5

ETTERBEEK - Vendredi matin, la chambre du conseil de Bruxelles a confirmé le mandat d'arrêt du conseiller communal etterbeekois Henri Tombeur. Incarcéré depuis le 8 juillet pour des faits de pédophilie qu'il nie, l'intéressé restera détenu au moins jusque début octobre... à moins que la chambre des mises en accusation ne décide du contraire dans quinze jours. Les avocats d'Henri Tombeur, Me Christel Verleyen et Martial lancaster, ont en effet interjeté appel.

Par ses activités publiques (au profit des jeunes notamment),Henri Tombeur jouit à Etterbeek d'un véritable courant de sympathies. Ses amis ont même décidé de créer un comité de soutien. Celui-ci ne reste pas inactif. Aucun ne croit un seul mot de toute cette histoire. Le comité se demande si les malheurs actuels de M.Tombeur ne sont pas le fruit d'une machination. Le conseiller communal n'avait pas que des amis.

Parti de rien, il rencontrait u n petit succès en politique, ce qui a pu créer des jalousies. L'Etterbeekois était aussi l'administrateur délégué du centre sportif communal.

Fait rare en matière de pédophilie - surtout par les temps qui courent - son arrestation a suscité un élan de solidarité... en sa faveur : une pétition a déjà recueilli deux cents signatures et le dossier s'est enrichi de plus de 150 témoignages de moralité qui lui sont favorables.

Selon ses proches, le dossier serait truffé de failles - indices a moitié vrais... à moitié faux, invraisemblances, contre-vérités, etc.

Dernièrement, les psychiatres auraient conclu en l'absence de dangerosité d'Henri Tombeur, lequel n'aurait par surcroît pas le profil d'un pédophile. Peut-être la prolongation de la détention de l'Etterbeekois ne s'explique-t-elle que par l'absence du juge - M. Jacques Pignolet, en séjour à l'étranger – le tribunal libérant rarement un détenu sans avoir pris l'avis du magistrat instructeur.

A titre de témoin

En attendant, sa détention se prolonge à la prison de Forest et celle-ci est pénible. Henri Tombeur est incarcéré dans une cellule voisine de celle de Michel Nihoul (l'homme clé de l’affaire Dutroux).

Après 62 jours, le conseiller communal a déjà perdu 25 kilos.

S'agissant de Nihoul, il importe de préciser qu'il n'existe aucun lien entre les deux hommes, si ce n'est qu'ils se connaissaient... comme des centaines de Bruxellois fréquentaient Michel Nihoul jusqu'à peu. C'est d'ailleurs exclusivement a titre de témoin que Henri Tombeur a été entendu la semaine passée dans le cadre de l'affaire  Dutroux.

L'arrestation de M. Tombeur repose sur des accusations lancées par des gamins âgés entre dix et treize ans. Ces enfants ne seraient pas tout à fait des victimes comme les autres, mais de véritables petits prostitués professionnels dirigés par des proxénètes. Ils avaient déjà « servi » à un pédophile notoire intercepté dans une autre affaire, Jacques Graffé.

Les proches de Tombeur dénoncent, enfin, une enquête partiale menée par une femme, commissaire adjoint à la police d'Etterbeek, qui a trouvé l'occasion de se venger. L'enquête n'aurait jamais dû lui être confiée.

Gilbert Dupont

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 À GLACER LE SANG :Internet à son site Dutroux

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 5

BRUXELLES - Internet au diapason des médias internationaux comme on pouvait s'y attendre, le plus vaste réseau mondial d'informations a son site consacré à l'affaire Dutroux

Deux sites, plus exactement où l'on peut découvrir, en anglais, outre un message de condoléances aux parents de An et Eefje, quelques pages consacrées au dossier. Parmi celles-ci, il en est une qui traite plus spécifiquement du lucratif commerce de vidéos pornos d'enfants. Un spécialiste de l'industrie du sexe y explique, en gardant l'anonymat, comment une cassette montrant une jeune fille dévorée par un banc de piranhas se monnaie 35.000 dollars (plus d'un million de nos francs). « Il n'est pas impensable que quelqu'un soit prêt à payer davantage encore pour des cassettes de Julie et Melissa », poursuit cet individu, qui ne croit cependant pas que les fillettes ont été kidnappées dans le seul but de produire de telles cassettes : « Le marché des cassettes pornos d'enfants est saturé. Celui qui veut en acheter peut en avoir autant qu'il le souhaite en Hollande. Les prix ont d'ailleurs baissé tant l'offre est importante... »

Et de poursuivre, non sans cynisme: « Mais, la triste histoire arrivée à Julie et Mélissa fera en sorte que leur cassette, sera très demandée. Cela pourra rapporter beaucoup d'argent. Et quelque part dans ce monde, il y a certainement quelqu'un qui est assez malade et assez riche pour se procurer cela. Car l'acheteur sait que ce qu'il voit est réel, qu'il n'y a pas de trucages et d'acteurs.

C'est pourquoi cette cassette, s'il y en a une qui circule, est sans prix ». Il insiste : aujourd'hui, ce que les acheteurs recherchent, c'est le réel : ce n'est pas un hasard si les cassettes d'adultes filmant leurs propres ébats sont les plus vendues. « Mais pour ne pas être embêtant, cela doit être de plus en plus hard ». Répugnant...

N. f.

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L’affaire Dutroux, leurs craintes, leurs espoirs

 « La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 5

Harry Van Barneveld: "Ne rien cacher aux enfants!"

"Il faut agir. Il n'est pas possible que des gens comme Dutroux puissent sortir de prison. A la maison, mon épouse et moi en discutons depuis plusieurs semaines. Elle est pour la peine de mort dans pareils cas, je demeure contre. Et pourtant, si cela arrivait à mon petit garçon, je crois que je ferais la peau au coupable. Ce qui n'arrangerait évidemment rien. A propos de mon gamin, un jour, en voyant une photo de Dutroux dans le journal, il a dit: "C'est un méchant, il a tué Julie et Mélissa!" Il sait donc, malgré ses 4 ans et demi. C'est une bonne chose. Il ne faut pas cacher de tels faits aux enfants. Ils doivent vivre dans la réalité et savoir que dans notre société, tout n'est pas beau, tout le monde n'est pas bon."

Julos Beaucarne: "Tous coupables !"

"C'est trop facile de réclamer des têtes pour se donner bonne conscience.

Nous sommes tous responsables de systèmes qui engendrent de tels personnages en divinisant cet univers médiatique basé sur la violence et le non amour. Au lieu d'éduquer nos enfants, nous diminuons le nombre de professeurs dans les écoles, puis nous nous indignons de ce qu'ils deviennent une fois adultes.

Cette douloureuse affaire amène à se poser beaucoup de questions sur notre société construite uniquement autour de l'argent et de l'élitisme."

Cardinal Danneels: "Le consensus moral"

"Les événements des dernières semaines ont sans aucun doute provoqué dans /a société belge un réveil de la conscience morale. La conviction profonde de la population qu'il y a des limites en morale à ne pas de passer s'était sans doute quelque peu assoupie ou même endormie. L'horreur devant le meurtre d'enfants innocents a suscité, dans les consciences et dans l'opinion publique, un réveil du désir profond d'innocence qui habite le cœur de tout homme droit. La tolérance dans la société ne peut aller jusqu'à tolérer l'intolérable. La découverte des crimes en Belgique ne fait que mettre en plein jour le mal qui existe dans la société et qui rôde dans le cœur de l'homme. Elle révèle aussi comment /e mal dépasse le mal dans le cour de l'homme individuel: il est aussi dans les structures d'une certaine société. Ce qui manque dans notre société, c'est le consensus sur ces valeurs morales qui sous-tendent toute vie humaine et toute vie en société. Une masse de lois et de décrets pour organiser la vie morale en société ne pourra jamais remplacer la conscience éthique bien formée des citoyens.

"Quid leges sine moribus - Que valent les lois sans le sens moral ?". L'Église, avec d'autres, doit se consacrera rétablir ce consensus moral. "

Gilles De Bilde: "Une aide aux parents"

"Avec les joueurs du Sporting, nous avons envoyé un message aux parents de Julie et Melissa, leur disant qu'ils pourraient toujours compter sur notre aide. Je pense, en effet, que c'est dans quelques semaines, lorsque la médiatisation de cette affaire sera plus faible, qu'il faudra relancer à l'avant-plan le débat sur la pédophilie et les lacunes de la justice. En tant que personnalités publiques, c'est le moins que nous puissions faire pour ces familles touchées au plus profond d'elles-mêmes. Ce serait hypocrite de dire qu'on peut se mettre à leur place. Ce qu'ils ont vécu ces derniers mois est tout simplement inimaginable."

Dirk Frimout: "Rendre l'espoir"

"Je me suis toujours attaché a adressera aux jeunes un message d'enthousiasme. Je pense surtout à eux, en

ces moments si difficiles. Nos enfants sont tellement vulnérables ! Il incombe à notre société de les protéger sans failles; par exemple en étant beaucoup plus attentifs au suivi judiciaire d'individus comme Dutroux. Je voudrais à présent que les jeunes retrouvent l'espoir. Cette affaire doit considérablement les impressionner, ils doivent s'interroger sur le monde qui les entoure, façonné par les adultes.

Qu'ils sachent, si cela peut leur redonner quelque peu confiance, que la population unanime a poussé un immense cri de révolte. Une réaction particulièrement salutaire. "

Hervé Meillon: "Les coeurs tirelires"

"Nous avons tout dit, tout nous reste à dire. Il nous faudra tout délier. Le présent demande à passer. Les coeurs sont comme des tirelires: pour en voir le fond, il faut les briser."

 Louis Michel: "Mettre la société à l'abri"

"On doute de la nature humaine quand on arrive à des dérives aussi horrifiantes qui dépassent l'entendement. On se demande comment la puissance publique n'est pas capable de se prémunir contre de telles choses. Quand une majorité politique va-t-elle comprendre que la hiérarchie des infractions et la sécurité des citoyens sont des principes fondamentaux?

Pour moi, le débat sur la suppression de la peine de mort devait aller de pair avec celui sur des peines incompressibles. Il faut mettre la société à l'abri de personnages capables de commettre des crimes aussi odieux. En France, Dutroux irait en tôle jusqu'en 2028! On s'occupe beaucoup trop de médicaliser le problème. Tout acte irresponsable doit-il donc être justifié médicalement?"

Jean-Michel Saive: "Ira-t-on jusqu'au bout?"

"Comme tous les Belges, l'assassinat des jeunes filles me traumatise et me mène à pousser un cri de révolte. C'est pourquoi, pour une fois, j'espère qu'on ira jusqu'au bout de cette affaire et qu'elle ne restera pas sans réponse comme l'est celle concernant les tueries du Brabant ou comme a semblé l'être, jusqu'à ces dernières heures, celle portant sur l'assassinat d'André Cools. Manifestement, en Belgique, dès qu'il y a une grosse affaire, on s'arrange pour l'étouffer au maximum.

J'ai donc mes doutes sur la volonté qui existe de faire aboutir celle-ci. A cette seule différence, importante, que cette fois toute la population est concernée et réclame la vérité. Il est impossible de ne pas tenir compte de ce phénomène..."

Louis SmaI: "Se ressaisir! D’urgence!"

"Ce n'est pas pensable ce qui arrive. On est dans un monde où tout bascule, dans lequel on fait de tout une valeur marchande", dit Louis Smal, le patron de la CSC liégeoise qui, lui aussi, a eu à souffrir de la disparition d'un enfant. C'était le 10 avril de l'année dernière; son fils a été retrouvé le 5 mai, décédé de manière accidentelle... "C'està cette occasion que j'ai découvert l'asbl Marc et Conne", rappelle encore Louis Smal. "Elle fait un travail formidable avec trop peu de moyens". II souligne aussi les lenteurs de la machine judiciaire: "Dans l'affaire Dutroux, la justice n'a pas fait tout ce qu'il fallait quand il le fallait!'; tonne-t-il en constatant aussi la faiblesse des moyens des services d'enquête. "Lors de la disparition de mon fils, j'ai dû leur passer des

GSM; ils n'en avaient pas! "Sa conclusion est aussi un constat amer: "Quand on voit des monstres pareils, on se dit que c'est toute la société qui dérape. Il faut se ressaisir. D'urgence!"

Jean-Claude Van Cauwenberghe: "Les Carolos n'ont pas à se sentir coupables"

"Comme tous les Belges, je suis profondément affecté par l'atrocité de cette affaire. Mais en tant que bourgmestre, il m'est d'autant plus pénible de voir comment la ville de Charleroi est montrée du doigt parle reste du, monde, comme dans les journaux français Le Monde et Le Nouvel Observateur. Cela fait treize ans que je me bats pour changer son image de cité industrieuse et sinistrée à tout point de vue. J'aimai lorsque j'entends des concitoyens dire qu'ils ont honte d'habiter

Charleroi. N'importe quelle ville peut à un moment donné abriter le plus pervers des criminels sans que l'on ne jette pour cela l'opprobre sur sa population. Les Carolos n'ont pas à se sentir coupables des événements."

 

 

Un dossier qui rebondit( «Dernière Heure »10 septembre 1996 pg 4)


Un dossier qui rebondit

 UN VIOL ET UNE TENTATIVE DE MEURTRE EN NOVEMBRE 95, À ORBAIX, OÙ AVAIT HABITÉ DUTROUX

 « La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

NEUFCHATEAU-ORBAIX – A priori, le calme régnait, hier, au centre névralgique de l'enquête sur la bande à Dutroux et le dossier parallèle, celui des trafics de voitures. A tel point que les journalistes ont déserté la place où, jusqu'à la semaine dernière, ils tenaient le siège.

Hier, lundi, comme la veille, Annie Bouty et Michel Nihoul ont longuement été interrogés, au palais de justice de Bruxelles, l'une par la 23e brigade, l'autre par Ia 3e SRC. Les interrogatoires ont toujours trait, semble-t-il, à l'enquête sur la pédophilie plus que sur les activités financières de M. Nihoul.

C'est ce mardi matin qu'Annie Bouty comparaît devant la chambre du conseil, à Neufchâteau, qui statuera sur son maintien en détention.

Des fouilles ont à nouveau été entreprises au domicile de Marc Dutroux, à Sars-la-Buissière, fouilles dont on ignorait, hier après midi, l'objectif précis. Quant aux recherches dans la demeure de Corvillain, ce pédophile, ami de duo Nihoul-Bouty, condamné à Bruxelles, elles seront reprises ce mardi. Après les déblaiements du

week-end, les chiens et le géo-radar entreront en action.

Un non-lieu rapide

Hier, en réponse aux affirmations de plusieurs journaux, le procureur Bourlet contestait l'évidence du meurtre de Bruno Tagliaferro, meurtre à mettre à charge de Dutroux et de sa bande. On sait que l'autopsie a démontré l'ingestion de médicaments par la victime. Seule, rappelle en substance le procureur, les analyses toxicologiques permettront de lever le doute, de déterminer s'il y a eu meurtre. Ces analyses dureront plusieurs jours. Pour l'heure, forcément, on imagine que Dutroux ou ses complices sont responsables de tous les crimes sexuels qui ont été perpétrés dans le Hainaut. Dans une précédente édition, nous avons fait état de l'assassinat de Laurence, la caissière du Gel 2000, à Châtelineau.

On sait que les enquêteurs nourrissent des inquiétudes sur. Une tout autre agression. Celle-ci date du 22 novembre 1995. Elle a eu lieu à Orbaix dans un village où a déjà habité Dutroux. Ce jour-là, une gamme a été violée. Ensuite, elle a été étranglée, manifestement pour mettre fin à ses jours. Par miracle, la petite a pu être sauvée.

Jusqu'à présent, les enquêteurs n'ont pu identifier l'agresseur. Ils en ont même conclu, semble-t-il, que leurs recherches ne pourraient aboutir puisque l'on a déjà, après quelques mois seulement, conclu à un non-lieu.

Deux petites Tchèques

Rouvrira-t-on le dossier suite à l'affaire Dutroux ? Celui-ci connaît évidemment bien la localité. Les enquêteurs du juge Connerotte s'arrêtent aussi sur la date, fin novembre de l'année dernière. An et Eejfe ont été assassinées peu auparavant (en octobre ?). Quant à Weinstein, il a été liquidé fin novembre aussi.

Depuis le début de l'affaire Dutroux, gendarmes et péjistes, au cours de leurs multiples perquisitions, découvrent un nombre invraisemblable de cassettes vidéos à caractère pornographique ou plus spécialisées encore dans la pédophilie. Par exemple, chez Nihoul, on se contentait du porno, tandis que pour Dutroux, tout était bon.

Depuis plusieurs semaines, des enquêteurs sont soumis aune véritable torture morale, celle de visionner le contenu écoeurant des cassettes. On n'a aucune précision sur les résultats réels, sur l'identification d'adultes en présence d'enfants martyrs. Selon nos informations, on aurait en tout cas identifié deux gamines venues de Tchéquie.

M. Pe.

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 Dutroux,Nîhoul, Bouty... LES DERNIERS À AVOIR VU WEINSTEIN VIVANT?

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

BRUXELLES - L'avocate déchue Annie Bouty et son ami, l'homme d'affaires bruxellois Michel Nihoul, sont probablement, avec Marc Dutroux, les derniers à avoir vu Bernard Weinstein vivant en novembre 1995. Directement ou indirectement, voilà le couple Nihoul-Bouty impliqué dans le meurtre par empoisonnement de Weinstein, Nihoul tout particulièrement.

C'est chez Weinstein, qui habitait rue Daubresse, à fumet, que les enquêteurs exhumaient il a huit jours les restes d'An et Eefje. Il ne s'agira pas des seules révélations de cette semaine qui promet des rebondissements dans les prochains jours.

Le va-et-vient entre Nihoul et Bouty a repris hier après-midi à Bruxelles. Ce volet de l'enquête est confié à la brigade nationale de la police judiciaire qui enregistre depuis trois semaines un nombre astronomiques d'heures sup's.

Au 13 rue des Quatre-Bras à Bruxelles, les bureaux de la 23e brigade s'éteignent aux petitesheures. La nuit de samedi à dimanche, l'audition de l'ex-avocate Annie Bouty s'est achevée à 4 h du matin. Lundi, celle de Nihoul s'est terminée à 3 h. Et ça repartait l'après-midi puisqu'à 15 h, une Mercedes ramenait Bouty au palais de justice.

Le dernier passeport de Weinstein

Annie Bouty est, pour l'instant, la seule à se mettre à table. Nihoul, lui, paraît empreint de paradoxes il se souvient parfaitement de faits qui n'ont aucune importance pour l'enquête mais sa mémoire le trahit dès que les policiers abordent le dossier...

Bouty est en aveux d'avoir hébergé Michel Lelièvre, chez elle, avenue H. Jaspar, à St-Gilles, pendant dix jours, un mois avant le rapt de Julie et Melissa, en mai 1995.

L'ex-avocate est en aveux d'avoir invité à dîner Nihoul, lelièvre et Dutroux, au moins une fois, également à StGilles. Dans les deux cas, elle déclare avoir agi à la demande de Nihoul, auquel elle faisait ses quatre volontés. De nouveaux aveux de Bouty portent sur la période novembre 1995.

Une période chaude : le calvaire de Julie et Melissa se poursuit à Marcinelle, An et Eefje –enlevées en août à Ostende - sont peut-être déjà mortes et enterrées... rue Daubresse, à Jumet, où Weinstein est impliqué dans un ténébreux mais violent règlement de comptes avec des drogués. L'affaire lui vaut d'avoir des ennuis avec la police. Weinstein est dans l'embarras.

Qui vole à son secours? Mais Monsieur Nihoul, bien sûr qui, selon Annie Bouty, surgit un après-midi dans son cabinet, interrompt une réunion et lui annonce qu'il lui faut tout de suite « des papiers ». Entendez, bien sûr, des faux papiers.

Annie Bouty n'en a pas. Mais elle s'adresse à une filière très active à Bruxelles, des Portugais en mesure de fournir de faux passeports...volés au Portugal aux pensionnaires d'un asile psychiatrique.

Les papiers sont subtilisés et, pour 100.000 FB, la photo du titulaire est remplacée par celle de types comme Weinstein. Ces aveux sont importants. Ils s'a joutent aux précédents qui confirment le rôle actif joué par le couple Nihoul-Bout au moins deuis l'enlèvement e Julie et Mélissa, le 24 juin 1995. Il établit que Dutroux, Nihoul et Bouty sont parmi les derniers à avoir vu Weinstein vivant.

Car Weinstein n'a jamais profité du passeport portugais. Dutroux avait des projets plus expéditifs pour Weinstein - qui fut drogué puis enterré vivant. A même époque, fin novembre, un autre comparse, Marc Tagliaferro, le ferrailleur de Keumiée, allait suivre le même destin.

Gilbert Dupont

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À LA LOUVIÈRE EN 1995 : Des enfants tziganes

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

LA LOUVIÈRE - Le monstre de Sars la Buissière aurait tenté à deux reprises d'enlever trois enfants tziganes en septembre 95 à La Louvière.

C'est ce qu'affirment des gens du voyage qui ont pris contact hier avec la police de La Louvière. Les témoins sont formels. Ils reconnaissent non seulement Marc Dutroux, mais aussi son bras-droit, Michel lelièvre. Des vérifications plus approfondies doivent encore avoir lieu.

La double tentative de rapt se serait produite sur une « petite place située près d'une ligne de voie ferrée, le long d'un bois » (le parking de la Louvière Sud ?) où les gens du voyage avaient dressés leur campement - une vingtaine de caravanes - en septembre 95. Ils ne se souviennent plus de la date précise mais rapportent qu'un après-midi, une voiture à bord de laquelle deux individus avaient pris place s'est immobilisée près de trois enfants, deux fillettes et un petit garçon âgés de 8 à 10 ans. Les automobilistes ont voulu les faire monter « pour leur offrir un paquet de frites », disaient-ils. Mais une tzigane est intervenue.

Une bande d'Italiens

Les mêmes, selon le témoin, sont revenus quelques jours plus tard, disant aux enfants qu'ils connaissaient une petite fille. Il a également été question d'un cornet de frites. Cette fois, un gitan a mis les automobilistes en fuite.., à coups de chevrotine. Il n'y a pas eu de troisième tentative.

Les tziganes rapportent qu'à l'époque, les faits ont été signalés a la police de la louvière. Il a même été question d'une « bande d'Italiens » puis personne n'a plus entendu parler de rien.

Ils ont pris contact avec la police après avoir appris qu'au printemps 96, Dutroux est soupçonné d'avoir assassiné une Slovaque d'origine tzigane.

Gil

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 Gel 2000 : A chacun sa part de l'enquête

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

A CHATELINEAU - Dans une précédente édition, nous rappelions la fin dramatique de Laurence Wojtczyk, âgée de 25 ans au moment de son exécution. Laurence travaillait au magasin Gel 2000, lorsque, le samedi 16 mars, en début de soirée, elle a abandonné le magasin, totalement déserté alors. Plus personne ne verra la malheureuse avant que l'on ne découvre son cadavre, dans la Sambre, mutilé, ligoté, baillonné. « Baillonné, comme l'avaient été An et Eefje », d'autres victimes de la bande à Dutroux, remarqueront, a posteriori, des enquêteurs du juge Connerotte. Par ailleurs, un ou plusieurs témoins ont affirmé avoir vu Dutroux rôder à proximité du Gel 2000 le jour de la disparition de Laurence.

Mais à qui incombe aujourd'hui l'enquête sur cet assassinat? Dans un premier temps, elle fut confiée à la BSR de Charleroi. La P.J. lui a succédé.

Dans le contexte actuel, deux enquêteurs du dossier Dutroux se sont très récemment présentés au parquet de Charleroi afin de recueillir des éléments susceptibles d'aider à l'élucidation de l'assassinat de Laurence. Ils sont revenus bredouilles, éconduits, nous dit on, par un responsable carolorégien des recherches sur l'assassinat de la caissière du Gel 2000.  

M. Pe.

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LES PARENTS DE KIM ET KEN REÇUS AU PALAIS

Les enfants disparus au nord d'Anvers

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

BRUXELLES - Poursuivant leurs contacts avec les parents d'enfants disparus au cours de ces dernières années, le Roi et la Reine ont reçu en audience ce lundi matin au Palais de Bruxelles, avant de recevoir en fin d'après-midi les parents de Julie Lejeune, la maman de Ken et Kim Heyrman, Mme Tiny Mast.

Pour rappel, le 4 janvier 1994, après avoir joué avec des amis à Anvers, Kim Heyrman (11 ans) et son frère Ken (8 ans) décidaient d'aller jouer au football au fort de Merksem. Ils devaient disparaître ensemble, certains témoins les ayant encore aperçu en soirée dans un tram.

Quelques semaines plus tard, on devait retrouver la petite Kim dans les eaux du port d'Anvers, violée et assassinée. L'enfant, quasiment .nue, portait encore la même chemise que celle du jour de sa disparition, mais il ne lui restait plus pour le reste que des bas et un slip descendu sur les chevilles.

Des traces de coupures étaient visibles sur le cou, le dos et le thorax, faisant dire à l'époque que seul un psychopathe était capable d'une chose pareille.

A l'heure actuelle, on est toujours sans aucune information sur Ken, même si tout laissait présager à l'époque qu'il avait du subir un sort tristement comparable à celui de sa soeur. Les pompiers et l’armée avaient sondé les eaux du port sans aucun succès pour retrouver également son corps.

Avant que l'on ne retrouve Kim, les parents, persuadés que leurs gosses étaient toujours vivants, avaient fait diffuser des petites affiches avec un dessin de tortue, l'animal préféré de Kim, en lui demandant d'appeler un numéro de téléphone. A plusieurs reprises, des battues importantes avaient été organisées au nord d'Anvers, y compris dans les docks.Plus tard, des affiches avec le visage des enfants avaient été collées partout, jusque dans le nord des Pays-Bas.

Ph. B.

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 Le service « écoute enfants »

 Une oreille toujours tendue

« La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996 page 4

NAMUR - « Nous recevons actuellement de nombreux appels téléphoniques très ciblés sur les tragiques événements de ces dernières semaines. Ils émanent souvent d'enfants très au courant de l'affaire Dutroux par les médias. On en dénombre beaucoup qui se demandent, par exemple, si leur maman serait capable, elle aussi,de les laisser mourir de faim. A côté de cela, beaucoup font également montre d'une peur de repartir seul dans la rue, surtout en cette période de rentrée scolaire. » Ainsi s'exprime Maryse Tonon, directrice, à Namur, du Centre de coordination de la petite enfance, institution dont dépend le service « Ecoute Enfants ». Une oreille tendue, via une ligne téléphonique à n° vert, vers les problèmes et réflexions des enfants, mais aussi des adultes en contact avec eux (environ 20 % des appels).

Poupées poignardées

Mme Tonon raconte également que plusieurs parents lui ont expliqué avoir surpris leur bambin passer leur colère sur une poupée qu'ils disaient représenter Dutroux. « Une fillette en a placé une sous la cloche en verre d'une ancienne horloge, en demandant à sa maman de la surveiller. Une mère de famille a aussi décrit comment elle a trouvé sa petite fille en train de poignarder une vieille poupée, en expliquant qu'elle tuait ainsi

Dutroux.

Des réactions tout à fait compréhensibles, si l'on en croit Mme Tonon : Je suis rentrée, lundi, d'un voyage de trois semaines au Sénégal. C'est assez impressionnant, quand on arrive ici, de voir l'agressivité à laquelle donne lieu cette horrible affaire. Le climat est passionnel, les gens sont sous pression. Même les plus tempérés parlent des violences qu'ils feraient, s'ils le tenaient, subir à Dutroux, avant de lui donner la mort. Dans un tel contexte, il est normal que les enfants réagissent, eux aussi, de la sorte.

Une attitude symbolique, de mise en acte, à laquelle, selon Mme Tonon, il convient toutefois de ne pas rester sans réaction. Les parents doivent alors demander à l'enfant pourquoi il fait ça. Il faut qu'ils l'amènent à exprimer ses craintes, ses phantasmes. Car, qui sait, pour lui, Dutroux, celui qui lui fait peur, ça peut être, par exemple un voisin. On ne sait pas toujours ce qui peut passer par la tête d'un enfant.

Une certitude, toutefois, selon Mme Tonon : « Si l'enfant pose des questions, il ne faut jamais lui dire qu'il est trop petit pour parler de ça. Il faut l'aider à mettre des mots sur ce qu'il ressent. Les parents insisteront aussi sur le fait que tous les hommes ne sont pas des Dutroux et toutes les femmes des Martin, qu’il n’y a pas 50.000 Dutroux, un véritable prédateur, psychopate sans aucune humanité. Ils le conscientiseront aussi à la présence, autour de lui, de personnes en qui il peut avoir confiance. L'important est aussi de susciter l'expression de nouvelles questions, plus que de vraiment fournir des réponses. Dans tous les cas, il faut lui permettre de se vider, que ce soit en parlant, en jouant, par des dessins, des marionnettes,...

L’affabulation en diminution

Et si le nombre d'appelants véritablement abusés sexuellement ne semble pas avoir augmenté sensiblement pendant cette actualité tragique (entre 2 et 3 appels par semaine, tout de même), celui des jeunes qui contactent Écoute Enfants pour faire part d'un récit relevant plutôt de l'affabulation semble en nette diminution. «Je pense que ceux-là se rendent, à présent, vraiment compte que c'est là un sujet sérieux, avec lequel on ne fait pas de blague ».

Laurent Belot

« Ecoute enfants » : 0800/14400

 

L’affaire Dutroux, leurs craintes, leurs espoirs("Dernière Heure"mardi 10 septembre 1996)


L’affaire Dutroux, leurs craintes, leurs espoirs

DANNEELS, SAIVE, FRIMOUT ET DE NOMBREUSES PERSONNALI TÉS RÉAGISSENT

 La « UNE » de « La Dernière Heure » du mardi 10 septembre 1996

C'est aujourd'hui que débute notre série de réactions de personnalités belges issues de différents horizons. Profondément choqués par les terribles événements qui ont secoué notre pays ces dernières semaines, ces concitoyens, qui sont tous des stars dans leur domaine, vous font part de la manière dont ils ressentent cette situation dramatique.

(Ph. A. Pierrard, Th. Rogé et doc. DH)

 

 

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