mardi 20 janvier 2009

Une tragédie nationale !

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Le Souverain n'a pas mâché ses mots pour décrire les horreurs mises au jour ces derniers temps

Le Roi a tenu parole. Il y a plus d'un mois, le Souverain s'était engagé à poursuivre le dialogue avec les parents des enfants assassinés ou disparus.

Hier, au Palais royal de Bruxelles, Albert II et Paola se sont remis à l'écoute du désarroi de ces familles frappées par le malheur. Mais cette fois, ce n'était plus dans l'intimité d'une audience, mais dans le cadre d'une vaste table ronde consacrée à la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes.

De nombreux experts et spécialistes avaient été conviés pour faire part de leurs expériences et de leurs réflexions. Côte à côte, on voyait le délégué général aux droits de l'enfant Claude Lelièvre, les responsables de l'ASBL Marc et Corine, des psychiatres, des représentants des services d'aide aux victimes.

Mais parmi la cinquantaine d'invités, ce sont les parents surtout qui retiennent l'attention.

Ils sont tous là: ceux de Julie et de Mélissa, d'An et Eefje, de Loubna, la maman d'Elisabeth, mais aussi les parents du petit Liam, de Laurence, de Ken.et Kim, de Nathalie Geysbregts, de Ines Breughelmans, de Marc et Corine, de Joris Vieille, rassemblés autour de la même table.

C'est à ces familles unies dans le malheur que le Roi veut avant tout donner la parole.

Tenez bon!

Mais c'est d'abord Albert II, après avoir salué chaque participant, qui ouvre la réunion par un discours. L'heure n'est plus aux propos de complaisance. Le Souverain ne mâche pas ses mots, va droit au but: il parle de

«Véritable tragédie nationale » pour décrire les horreurs mises au jour.

Une tragédie qui doit être l'occasion d'« un sursaut moral et d'un changement profond dans notre pays ».

Il va rappeler aussi, appuyant sur chaque terme, qu' « une clarté totale doit être faite sur ce drame, ses origines et toutes ses ramifications et cela dans un délai raisonnable ».

Le Souverain renvoie chacun à ses responsabilités. Les autorités tout d'abord, desquelles il attend « une attitude d'humilité et de remise en question ». Car le Roi ne le cache pas: l'état a failli à l'une de ses tâches essentielles, qui est « d'assurer la sécurité de tous les citoyens, et en particulier des plus vulnérables nos enfants. Il faut reconnaître que dans ce cas ce fut un échec, de nombreuses erreurs ont été commises, et dans les contacts avec les familles des victimes, il y a eu un manque d'humanité ».

Mais Albert II veut aussi interpeller chaque citoyen, invité à collaborer avec les services de sécurité pour éviter de tels drames. Et de citer l'exemple « des personnes qui ont donné le signalement du véhicule ayant servi à l'enlèvement de Bertrix », ou des « volontaires et associations qui assistent des citoyens et leurs familles dans leurs contacts avec la Justice ».

Le Roi sait que le changement sera une oeuvre de longue haleine : « il faudra persévérer, tenir bon, rester vigilant pour ne pas retomber dans l'ornière ». Il a compris le désarroi que la population compte massivement exprimer ce dimanche dans les rues de Bruxelles. Il tient à s'adresser à ceux et celles qui organisent la marche blanche, pour les encourager à accomplir cette démarche « dans un esprit constructif et de respect de nos institutions démocratiques ».

Une façon, aussi, d'en appeler au calme. Qui venait en quelque sorte relayer le message du gouvernement publié à l'occasion de la marche silencieuse, jugée positive. Pour autant qu'il s'agisse d'exprimer «pacifiquement et en toute dignité leur engagement en faveur de la société et leur espoir en l'avenir ».

Au Palais royal, le Souverain va clôturer son discours en invitant les participants à se mettre au travail. Et en laissant la parole au ministre de la Justice De Clerck pour qu'il expose les mesures prises et celles qu'il envisage de prendre ». Le Roi aussi attend des actes.

P.Hx.

________________________

Pour les parents un premier pas

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

II est près de 20 h lorsque la table ronde organisée à l'initiative du Roi a clôturé ses travaux. Soit après près de 4 h de discussions, nécessaires pour permettre aux participants de s'exprimer sur la lutte contre la pédophilie et la politique d'aide aux victimes. A l'issue de la réunion, l'attention se portait sur les premières réactions des parents des enfants assassines ou disparus.

Profondément déçus cette semaine par la perte de tout espoir de conserver le juge Connerotte, les parents paraissaient avoir retrouvé un timide réconfort dans la tenue de cette réunion exceptionnelle. Le papa d'An s'en réjouissait, tout en espérant que « cette première rencontre du genre ne serait pas la dernière.

Nous avons retrouvé un peu de confiance, mais cela ne signifie pas que cette confiance retrouvée est totale. » La maman d'Élisabeth Brichet, elle aussi, considère cette initiative royale comme « un premier pas positif».

Mais bien vite, c'est un gros regret qui perce dans ses propos « Dommage qu'il ait fallu attendre la mort tragique de Julie et Mélissa,d'An et Eefje, pour que ce premier pas soit franchi. »

Un souhait, a présent : « Que les paroles se concrétisent en actes, que les vrais responsables soient punis ! » Gino Russo retire également une première impression de «positif» dans cette réunion. Un premier espoir que « les choses bougent enfin. »

Mais il constate, amer et lucide: «pour nous, rien ne change. On va donc continuer à casser la langue de bois, à se montrer vigilant. »

Ont-ils au moins trouve dans le Roi un allié de poids dans leur combat ?

« Je crois qu'il veut sincèrement nous aider», poursuit le papa de Mélissa. Qui a tenu aussi à dissiper l'impression de profond abattement laissée ces derniers jours: « Ne pensez pas que nous soyons abattus par l'arrêt de dessaisissement de - Connerotte. On se reconstruit psychologiquement assez vite»...

Mais l'immédiat, c'est aussi cette « marche blanche » qui devrait déferler sur les rues de Bruxelles, dimanche. Une fois de plus, tous les parents ont lancé un ultime appel au calme et à la sérénité. Parce que, a rappelé le papa d'An, «nous ne marcherons pas pour le juge Connerotte ou contre la Justice, mais pour nos enfants. » Gino Russo invite également les manifestants à faire preuve de dignité. «Parce que, d'en haut, nos enfants vous regarderont »...

P.Hx.

________________________

POLÉMIQUE

L’avocat Georges Dehousse se dit victime d'une campagne diffamatoire

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

MAÎTRE Georges M. Dehousse, avocat de la famille Cools, s'est élevé hier après-midi contre ce qu'il estime être une campagne de diffamation exercée à son égard et qui, accuse t-il, est notamment initiée et relayée par les familles Lejeune et Russo.

Me Dehousse admet qu'il occupe parmi les 25 membres de son personnel un ouvrier qui peut être soupçonné de pédophilie; mais l'intéressé n'a aucun antécédent connu et ne possède en outre aucun casier judiciaire.

Or, cet homme a fait l'objet d'une enquête très poussée par les familles Lejeune et Russo qui n'ont pas hésité, selon Me Dehousse, à pénétrer chez lui et, pour tenter de lui arracher des aveux, lui ont martelé la tête contre une table. (NDLR: cela s'est passé avant la découverte des corps).

A cette même occasion, des mallettes contenant des documents auraient été dérobées et auraient ensuite fourni matière à des articles de presse parus dans des journaux néerlandophones.

Ceux-ci, accuse Me Dehousse, font également des amalgames calomnieux avec !e rôle d'avocat que j'ai assumé voici une douzaine d'années avec mes confrères Marcel Cools et Thierry Giet (fils de l'ancien avocat général) dans l'affaire dite du « Centre médical de l'Est ».

Me Dehousse fait également état de filatures et de photos de sa propriété prises par deux détectives privés à la demande, affirme-t-il, de Mme Russo. « Les deux familles doivent absolument se calmer, estime Me Dehousse. Plutôt que de vouloir faire justice elles-mêmes, elles feraient mieux de s'entourer de sages conseillers et de renoncer à des méthodes terroristes de gangsters. Malgré l'immense sympathie que j'ai pour leur cause, je serais obligé, si rien ne change de leur part, de recourir à des mesures de justice radicales ».

Pour sa part, Me Marcel Cools a souligné, vendredi, que sa famille qui, dit-il, est aussi une famille éplorée depuis le drame qui l'a frappé, ne se laisse pas aller à de tels errements. "Ce n'est pas parce que l'on a tué notre père en 1991 que nous allons tenter de mettre le pays a feu et à sang. Nous, nous continuons à faire confiance à la Justice, qui n'est pas complètement pourrie dans ce pays, et aux policiers, qui ne sont pas tous des imbéciles.

Il ne faut pas que l'on s'imagine que le monde entier est à vos pieds parce que subitement vous vous trouver sous le feu des caméras de la TV et devant tes micros des radios ».

Ce sont là de graves accusations, prononcées en des termes très durs, qu'a donc lancé Me Dehousse, lors d'une conférence de presse. Et qui appelaient, bien entendu, une réaction des familles Lejeune et Russo.

Se trouvant au Palais royal pour la Table ronde organisée sur la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes, les parents de Julie et Mélissa ne pouvaient répondre de manière circonstanciée. C'est après la conférence de presse improvisée sur les marches du Palais, à l'issue de la réunion, que Gino Russo a rapidement pris connaissance de ce que Maître Dehousse leur reproche.

Manifestant une surprise un rien amusée, le papa de Mélissa s'est contenté de constater que

« Quand on n'a rien à se reprocher et qu'on a la conscience en paix, on ne réagit pas comme cela ». Bizarre, bizarre...

________________________

Incident entre un jeune homme et l'avocat de Dutroux, à Liège

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Un incident a eu pour théâtre le quartier du Cadran, â Liège, vendredi, à 17 h 30. Unjeune homme a eu une altercation verbale avec l'avocat de Dutroux. Me Julien Pierre au café La Butte, au pied du Mont Saint-Martin.

L'avocat de Dutroux a fait irruption dans le café, accompagné d'un homme. A deux, ils auraient, selon des témoins, tenté d'embarquer de force le jeune homme dans leur voiture. Le jeune homme venait du cabinet de l'avocat. Selon plusieurs témoins, la scène s'est déroulée très rapidement. « Un Jeune homme a demandé à se rendre aux- toilettes. Quelques instants plus tard, deux hommes l'ont suivi. Un consommateur a dit: « C'est l'avocat de Dutroux! » Le jeune homme est remonté. Il était tenu par les deux hommes qui ont ensuite essayé de le faire entrer dans une voiture. La police a été prévenue et est arrivée». Le jeune homme a été conduit à la permanence de police.

Une tragédie nationale !

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Le Souverain n'a pas mâché ses mots pour décrire les horreurs mises au jour ces derniers temps

Le Roi a tenu parole. Il y a plus d'un mois, le Souverain s'était engagé à poursuivre le dialogue avec les parents des enfants assassinés ou disparus.

Hier, au Palais royal de Bruxelles, Albert II et Paola se sont remis à l'écoute du désarroi de ces familles frappées par le malheur. Mais cette fois, ce n'était plus dans l'intimité d'une audience, mais dans le cadre d'une vaste table ronde consacrée à la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes.

De nombreux experts et spécialistes avaient été conviés pour faire part de leurs expériences et de leurs réflexions. Côte à côte, on voyait le délégué général aux droits de l'enfant Claude Lelièvre, les responsables de l'ASBL Marc et Corine, des psychiatres, des représentants des services d'aide aux victimes.

Mais parmi la cinquantaine d'invités, ce sont les parents surtout qui retiennent l'attention.

Ils sont tous là: ceux de Julie et de Mélissa, d'An et Eefje, de Loubna, la maman d'Elisabeth, mais aussi les parents du petit Liam, de Laurence, de Ken.et Kim, de Nathalie Geysbregts, de Ines Breughelmans, de Marc et Corine, de Joris Vieille, rassemblés autour de la même table.

C'est à ces familles unies dans le malheur que le Roi veut avant tout donner la parole.

Tenez bon!

Mais c'est d'abord Albert II, après avoir salué chaque participant, qui ouvre la réunion par un discours. L'heure n'est plus aux propos de complaisance. Le Souverain ne mâche pas ses mots, va droit au but: il parle de

«Véritable tragédie nationale » pour décrire les horreurs mises au jour.

Une tragédie qui doit être l'occasion d'« un sursaut moral et d'un changement profond dans notre pays ».

Il va rappeler aussi, appuyant sur chaque terme, qu' « une clarté totale doit être faite sur ce drame, ses origines et toutes ses ramifications et cela dans un délai raisonnable ».

Le Souverain renvoie chacun à ses responsabilités. Les autorités tout d'abord, desquelles il attend « une attitude d'humilité et de remise en question ». Car le Roi ne le cache pas: l'état a failli à l'une de ses tâches essentielles, qui est « d'assurer la sécurité de tous les citoyens, et en particulier des plus vulnérables nos enfants. Il faut reconnaître que dans ce cas ce fut un échec, de nombreuses erreurs ont été commises, et dans les contacts avec les familles des victimes, il y a eu un manque d'humanité ».

Mais Albert II veut aussi interpeller chaque citoyen, invité à collaborer avec les services de sécurité pour éviter de tels drames. Et de citer l'exemple « des personnes qui ont donné le signalement du véhicule ayant servi à l'enlèvement de Bertrix », ou des « volontaires et associations qui assistent des citoyens et leurs familles dans leurs contacts avec la Justice ».

Le Roi sait que le changement sera une oeuvre de longue haleine : « il faudra persévérer, tenir bon, rester vigilant pour ne pas retomber dans l'ornière ». Il a compris le désarroi que la population compte massivement exprimer ce dimanche dans les rues de Bruxelles. Il tient à s'adresser à ceux et celles qui organisent la marche blanche, pour les encourager à accomplir cette démarche « dans un esprit constructif et de respect de nos institutions démocratiques ».

Une façon, aussi, d'en appeler au calme. Qui venait en quelque sorte relayer le message du gouvernement publié à l'occasion de la marche silencieuse, jugée positive. Pour autant qu'il s'agisse d'exprimer «pacifiquement et en toute dignité leur engagement en faveur de la société et leur espoir en l'avenir ».

Au Palais royal, le Souverain va clôturer son discours en invitant les participants à se mettre au travail. Et en laissant la parole au ministre de la Justice De Clerck pour qu'il expose les mesures prises et celles qu'il envisage de prendre ». Le Roi aussi attend des actes.

P.Hx.

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Pour les parents un premier pas

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

II est près de 20 h lorsque la table ronde organisée à l'initiative du Roi a clôturé ses travaux. Soit après près de 4 h de discussions, nécessaires pour permettre aux participants de s'exprimer sur la lutte contre la pédophilie et la politique d'aide aux victimes. A l'issue de la réunion, l'attention se portait sur les premières réactions des parents des enfants assassines ou disparus.

Profondément déçus cette semaine par la perte de tout espoir de conserver le juge Connerotte, les parents paraissaient avoir retrouvé un timide réconfort dans la tenue de cette réunion exceptionnelle. Le papa d'An s'en réjouissait, tout en espérant que « cette première rencontre du genre ne serait pas la dernière.

Nous avons retrouvé un peu de confiance, mais cela ne signifie pas que cette confiance retrouvée est totale. » La maman d'Élisabeth Brichet, elle aussi, considère cette initiative royale comme « un premier pas positif».

Mais bien vite, c'est un gros regret qui perce dans ses propos « Dommage qu'il ait fallu attendre la mort tragique de Julie et Mélissa,d'An et Eefje, pour que ce premier pas soit franchi. »

Un souhait, a présent : « Que les paroles se concrétisent en actes, que les vrais responsables soient punis ! » Gino Russo retire également une première impression de «positif» dans cette réunion. Un premier espoir que « les choses bougent enfin. »

Mais il constate, amer et lucide: «pour nous, rien ne change. On va donc continuer à casser la langue de bois, à se montrer vigilant. »

Ont-ils au moins trouve dans le Roi un allié de poids dans leur combat ?

« Je crois qu'il veut sincèrement nous aider», poursuit le papa de Mélissa. Qui a tenu aussi à dissiper l'impression de profond abattement laissée ces derniers jours: « Ne pensez pas que nous soyons abattus par l'arrêt de dessaisissement de - Connerotte. On se reconstruit psychologiquement assez vite»...

Mais l'immédiat, c'est aussi cette « marche blanche » qui devrait déferler sur les rues de Bruxelles, dimanche. Une fois de plus, tous les parents ont lancé un ultime appel au calme et à la sérénité. Parce que, a rappelé le papa d'An, «nous ne marcherons pas pour le juge Connerotte ou contre la Justice, mais pour nos enfants. » Gino Russo invite également les manifestants à faire preuve de dignité. «Parce que, d'en haut, nos enfants vous regarderont »...

P.Hx.

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POLÉMIQUE

L’avocat Georges Dehousse se dit victime d'une campagne diffamatoire

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

MAÎTRE Georges M. Dehousse, avocat de la famille Cools, s'est élevé hier après-midi contre ce qu'il estime être une campagne de diffamation exercée à son égard et qui, accuse t-il, est notamment initiée et relayée par les familles Lejeune et Russo.

Me Dehousse admet qu'il occupe parmi les 25 membres de son personnel un ouvrier qui peut être soupçonné de pédophilie; mais l'intéressé n'a aucun antécédent connu et ne possède en outre aucun casier judiciaire.

Or, cet homme a fait l'objet d'une enquête très poussée par les familles Lejeune et Russo qui n'ont pas hésité, selon Me Dehousse, à pénétrer chez lui et, pour tenter de lui arracher des aveux, lui ont martelé la tête contre une table. (NDLR: cela s'est passé avant la découverte des corps).

A cette même occasion, des mallettes contenant des documents auraient été dérobées et auraient ensuite fourni matière à des articles de presse parus dans des journaux néerlandophones.

Ceux-ci, accuse Me Dehousse, font également des amalgames calomnieux avec !e rôle d'avocat que j'ai assumé voici une douzaine d'années avec mes confrères Marcel Cools et Thierry Giet (fils de l'ancien avocat général) dans l'affaire dite du « Centre médical de l'Est ».

Me Dehousse fait également état de filatures et de photos de sa propriété prises par deux détectives privés à la demande, affirme-t-il, de Mme Russo. « Les deux familles doivent absolument se calmer, estime Me Dehousse. Plutôt que de vouloir faire justice elles-mêmes, elles feraient mieux de s'entourer de sages conseillers et de renoncer à des méthodes terroristes de gangsters. Malgré l'immense sympathie que j'ai pour leur cause, je serais obligé, si rien ne change de leur part, de recourir à des mesures de justice radicales ».

Pour sa part, Me Marcel Cools a souligné, vendredi, que sa famille qui, dit-il, est aussi une famille éplorée depuis le drame qui l'a frappé, ne se laisse pas aller à de tels errements. "Ce n'est pas parce que l'on a tué notre père en 1991 que nous allons tenter de mettre le pays a feu et à sang. Nous, nous continuons à faire confiance à la Justice, qui n'est pas complètement pourrie dans ce pays, et aux policiers, qui ne sont pas tous des imbéciles.

Il ne faut pas que l'on s'imagine que le monde entier est à vos pieds parce que subitement vous vous trouver sous le feu des caméras de la TV et devant tes micros des radios ».

Ce sont là de graves accusations, prononcées en des termes très durs, qu'a donc lancé Me Dehousse, lors d'une conférence de presse. Et qui appelaient, bien entendu, une réaction des familles Lejeune et Russo.

Se trouvant au Palais royal pour la Table ronde organisée sur la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes, les parents de Julie et Mélissa ne pouvaient répondre de manière circonstanciée. C'est après la conférence de presse improvisée sur les marches du Palais, à l'issue de la réunion, que Gino Russo a rapidement pris connaissance de ce que Maître Dehousse leur reproche.

Manifestant une surprise un rien amusée, le papa de Mélissa s'est contenté de constater que

« Quand on n'a rien à se reprocher et qu'on a la conscience en paix, on ne réagit pas comme cela ». Bizarre, bizarre...

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Incident entre un jeune homme et l'avocat de Dutroux, à Liège

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Un incident a eu pour théâtre le quartier du Cadran, â Liège, vendredi, à 17 h 30. Unjeune homme a eu une altercation verbale avec l'avocat de Dutroux. Me Julien Pierre au café La Butte, au pied du Mont Saint-Martin.

L'avocat de Dutroux a fait irruption dans le café, accompagné d'un homme. A deux, ils auraient, selon des témoins, tenté d'embarquer de force le jeune homme dans leur voiture. Le jeune homme venait du cabinet de l'avocat. Selon plusieurs témoins, la scène s'est déroulée très rapidement. « Un Jeune homme a demandé à se rendre aux- toilettes. Quelques instants plus tard, deux hommes l'ont suivi. Un consommateur a dit: « C'est l'avocat de Dutroux! » Le jeune homme est remonté. Il était tenu par les deux hommes qui ont ensuite essayé de le faire entrer dans une voiture. La police a été prévenue et est arrivée». Le jeune homme a été conduit à la permanence de police.

Une tragédie nationale(« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 pg 12)


Une tragédie nationale !

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Le Souverain n'a pas mâché ses mots pour décrire les horreurs mises au jour ces derniers temps

Le Roi a tenu parole. Il y a plus d'un mois, le Souverain s'était engagé à poursuivre le dialogue avec les parents des enfants assassinés ou disparus.

Hier, au Palais royal de Bruxelles, Albert II et Paola se sont remis à l'écoute du désarroi de ces familles frappées par le malheur. Mais cette fois, ce n'était plus dans l'intimité d'une audience, mais dans le cadre d'une vaste table ronde consacrée à la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes.

De nombreux experts et spécialistes avaient été conviés pour faire part de leurs expériences et de leurs réflexions. Côte à côte, on voyait le délégué général aux droits de l'enfant Claude Lelièvre, les responsables de l'ASBL Marc et Corine, des psychiatres, des représentants des services d'aide aux victimes.

Mais parmi la cinquantaine d'invités, ce sont les parents surtout qui retiennent l'attention.

Ils sont tous là: ceux de Julie et de Mélissa, d'An et Eefje, de Loubna, la maman d'Elisabeth, mais aussi les parents du petit Liam, de Laurence, de Ken.et Kim, de Nathalie Geysbregts, de Ines Breughelmans, de Marc et Corine, de Joris Vieille, rassemblés autour de la même table.

C'est à ces familles unies dans le malheur que le Roi veut avant tout donner la parole.

Tenez bon!

Mais c'est d'abord Albert II, après avoir salué chaque participant, qui ouvre la réunion par un discours. L'heure n'est plus aux propos de complaisance. Le Souverain ne mâche pas ses mots, va droit au but: il parle de

«Véritable tragédie nationale » pour décrire les horreurs mises au jour.

Une tragédie qui doit être l'occasion d'« un sursaut moral et d'un changement profond dans notre pays ».

Il va rappeler aussi, appuyant sur chaque terme, qu' « une clarté totale doit être faite sur ce drame, ses origines et toutes ses ramifications et cela dans un délai raisonnable ».

Le Souverain renvoie chacun à ses responsabilités. Les autorités tout d'abord, desquelles il attend « une attitude d'humilité et de remise en question ». Car le Roi ne le cache pas: l'état a failli à l'une de ses tâches essentielles, qui est « d'assurer la sécurité de tous les citoyens, et en particulier des plus vulnérables nos enfants. Il faut reconnaître que dans ce cas ce fut un échec, de nombreuses erreurs ont été commises, et dans les contacts avec les familles des victimes, il y a eu un manque d'humanité ».

Mais Albert II veut aussi interpeller chaque citoyen, invité à collaborer avec les services de sécurité pour éviter de tels drames. Et de citer l'exemple « des personnes qui ont donné le signalement du véhicule ayant servi à l'enlèvement de Bertrix », ou des « volontaires et associations qui assistent des citoyens et leurs familles dans leurs contacts avec la Justice ».

Le Roi sait que le changement sera une oeuvre de longue haleine : « il faudra persévérer, tenir bon, rester vigilant pour ne pas retomber dans l'ornière ». Il a compris le désarroi que la population compte massivement exprimer ce dimanche dans les rues de Bruxelles. Il tient à s'adresser à ceux et celles qui organisent la marche blanche, pour les encourager à accomplir cette démarche « dans un esprit constructif et de respect de nos institutions démocratiques ».

Une façon, aussi, d'en appeler au calme. Qui venait en quelque sorte relayer le message du gouvernement publié à l'occasion de la marche silencieuse, jugée positive. Pour autant qu'il s'agisse d'exprimer «pacifiquement et en toute dignité leur engagement en faveur de la société et leur espoir en l'avenir ».

Au Palais royal, le Souverain va clôturer son discours en invitant les participants à se mettre au travail. Et en laissant la parole au ministre de la Justice De Clerck pour qu'il expose les mesures prises et celles qu'il envisage de prendre ». Le Roi aussi attend des actes.

P.Hx.

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Pour les parents un premier pas

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

II est près de 20 h lorsque la table ronde organisée à l'initiative du Roi a clôturé ses travaux. Soit après près de 4 h de discussions, nécessaires pour permettre aux participants de s'exprimer sur la lutte contre la pédophilie et la politique d'aide aux victimes. A l'issue de la réunion, l'attention se portait sur les premières réactions des parents des enfants assassines ou disparus.

Profondément déçus cette semaine par la perte de tout espoir de conserver le juge Connerotte, les parents paraissaient avoir retrouvé un timide réconfort dans la tenue de cette réunion exceptionnelle. Le papa d'An s'en réjouissait, tout en espérant que « cette première rencontre du genre ne serait pas la dernière.

Nous avons retrouvé un peu de confiance, mais cela ne signifie pas que cette confiance retrouvée est totale. » La maman d'Élisabeth Brichet, elle aussi, considère cette initiative royale comme « un premier pas positif».

 Mais bien vite, c'est un gros regret qui perce dans ses propos « Dommage qu'il ait fallu attendre la mort tragique de Julie et Mélissa,d'An et Eefje, pour que ce premier pas soit franchi. »

Un souhait, a présent : « Que les paroles se concrétisent en actes, que les vrais responsables soient punis ! » Gino Russo retire également une première impression de «positif» dans cette réunion. Un premier espoir que « les choses bougent enfin. »

Mais il constate, amer et lucide: «pour nous, rien ne change. On va donc continuer à casser la langue de bois, à se montrer vigilant. »

Ont-ils au moins trouve dans le Roi un allié de poids dans leur combat ?

« Je crois qu'il veut sincèrement nous aider», poursuit le papa de Mélissa. Qui a tenu aussi à dissiper l'impression de profond abattement laissée ces derniers jours: « Ne pensez pas que nous soyons abattus par l'arrêt de dessaisissement de - Connerotte. On se reconstruit psychologiquement assez vite»...

Mais l'immédiat, c'est aussi cette « marche blanche » qui devrait déferler sur les rues de Bruxelles, dimanche. Une fois de plus, tous les parents ont lancé un ultime appel au calme et à la sérénité. Parce que, a rappelé le papa d'An, «nous ne marcherons pas pour le juge Connerotte ou contre la Justice, mais pour nos enfants. » Gino Russo invite également les manifestants à faire preuve de dignité. «Parce que, d'en haut, nos enfants vous regarderont »...

P.Hx.

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POLÉMIQUE

L’avocat Georges Dehousse se dit victime d'une campagne diffamatoire

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

MAÎTRE Georges M. Dehousse, avocat de la famille Cools, s'est élevé hier après-midi contre ce qu'il estime être une campagne de diffamation exercée à son égard et qui, accuse t-il, est notamment initiée et relayée par les familles Lejeune et Russo.

Me Dehousse admet qu'il occupe parmi les 25 membres de son personnel un ouvrier qui peut être soupçonné de pédophilie; mais l'intéressé n'a aucun antécédent connu et ne possède en outre aucun casier judiciaire.

Or, cet homme a fait l'objet d'une enquête très poussée par les familles Lejeune et Russo qui n'ont pas hésité, selon Me Dehousse, à pénétrer chez lui et, pour tenter de lui arracher des aveux, lui ont martelé la tête contre une table. (NDLR: cela s'est passé avant la découverte des corps).

A cette même occasion, des mallettes contenant des documents auraient été dérobées et auraient ensuite fourni matière à des articles de presse parus dans des journaux néerlandophones.

Ceux-ci, accuse Me Dehousse, font également des amalgames calomnieux avec !e rôle d'avocat que j'ai assumé voici une douzaine d'années avec mes confrères Marcel Cools et Thierry Giet (fils de l'ancien avocat général) dans l'affaire dite du « Centre médical de l'Est ».

Me Dehousse fait également état de filatures et de photos de sa propriété prises par deux détectives privés à la demande, affirme-t-il, de Mme Russo. « Les deux familles doivent absolument se calmer, estime Me Dehousse. Plutôt que de vouloir faire justice elles-mêmes, elles feraient mieux de s'entourer de sages conseillers et de renoncer à des méthodes terroristes de gangsters. Malgré l'immense sympathie que j'ai pour leur cause, je serais obligé, si rien ne change de leur part, de recourir à des mesures de justice radicales ».

Pour sa part, Me Marcel Cools a souligné, vendredi, que sa famille qui, dit-il, est aussi une famille éplorée depuis le drame qui l'a frappé, ne se laisse pas aller à de tels errements. "Ce n'est pas parce que l'on a tué notre père en 1991 que nous allons tenter de mettre le pays a feu et à sang. Nous, nous continuons à faire confiance à la Justice, qui n'est pas complètement pourrie dans ce pays, et aux policiers, qui ne sont pas tous des imbéciles.

Il ne faut pas que l'on s'imagine que le monde entier est à vos pieds parce que subitement vous vous trouver sous le feu des caméras de la TV et devant tes micros des radios ».

Ce sont là de graves accusations, prononcées en des termes très durs, qu'a donc lancé Me Dehousse, lors d'une conférence de presse. Et qui appelaient, bien entendu, une réaction des familles Lejeune et Russo.

Se trouvant au Palais royal pour la Table ronde organisée sur la lutte contre la pédophilie et l'aide aux victimes, les parents de Julie et Mélissa ne pouvaient répondre de manière circonstanciée. C'est après la conférence de presse improvisée sur les marches du Palais, à l'issue de la réunion, que Gino Russo a rapidement pris connaissance de ce que Maître Dehousse leur reproche.

Manifestant une surprise un rien amusée, le papa de Mélissa s'est contenté de constater que

« Quand on n'a rien à se reprocher et qu'on a la conscience en paix, on ne réagit pas comme cela ». Bizarre, bizarre...

________________________

Incident entre un jeune homme et l'avocat de Dutroux, à Liège

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 12

Un incident a eu pour théâtre le quartier du Cadran, â Liège, vendredi, à 17 h 30. Unjeune homme a eu une altercation verbale avec l'avocat de Dutroux. Me Julien Pierre au café La Butte, au pied du Mont Saint-Martin.

L'avocat de Dutroux a fait irruption dans le café, accompagné d'un homme. A deux, ils auraient, selon des témoins, tenté d'embarquer de force le jeune homme dans leur voiture. Le jeune homme venait du cabinet de l'avocat. Selon plusieurs témoins, la scène s'est déroulée très rapidement. « Un Jeune homme a demandé  à se rendre aux- toilettes. Quelques instants plus tard, deux hommes l'ont suivi.                                                       

Un consommateur a dit: « C'est l'avocat de Dutroux! » Le jeune homme est remonté. Il était tenu par les deux hommes qui ont ensuite essayé de le faire entrer dans une voiture. La police a été prévenue et est arrivée». Le jeune homme a été conduit à la permanence de police.

 

 

Le pays en colère(« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 pg 11)


Le pays en colère !

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 11

 Les esprits sont loin de s'apaiser à deux jours de la marche blanche

Ceux qui misaient quatre jours après l'arrêt de la Cour de cassation sur le dessaisissement du juge Connerotte, sur un quelconque apaisement des esprits se sont lourdement trompés.

Au contraire, l'émotion qui anime la population semble avoir pris une nouvelle dimension. A deux jours de la marche blanche, les manifestants ont à nouveau crié leur colère au travers d'actions qui ont proliféré aux quatre coins du pays

- A Bruxelles, vers midi, les pompiers, les éboueurs, et un bon millier d'étudiants se sont rendus devant le palais de Justice. Les manifestants ont jeté des neufs sur le bâtiment. En outre, le personnel de la société Fiat à Auderghem a décidé d'arrêter le travail entre 13 et 15 heures.

Les ouvriers ont défilé dans le quartier. Ils ont par ailleurs décidé de verser 2 heures de salaire à l'association « Marc et Corine ».

- A Gand, 10.000 étudiants et écoliers ont défilé en paralysant les transports publics. Au fil des heures, les manifestants faisant le tour des principales écoles étaient de plus en plus nombreux.

- A Namur, plus de 900 personnes ont manifesté devant le palais de Justice. La manifestation a commencé par le débrayage du personnel de l'usine Kraft de Rhisnes. Des étudiants, le personnel des administrations communales et provinciales et le personnel d'un home pour personnes âgées ont rejoint le mouvement.

Une délégation a été reçue par deux magistrats du palais de Justice.

- A Charleroi, près de 300 ouvriers de l'entreprise sidérurgique ACEC/Transports ont arrêté le travail pour se rendre devant le palais de Justice. Ils y sont restés un long moment et n'ont pas manqué de témoigner leur mécontentement.

- A Braine-le-Comte, plus de 800 étudiants de l'école normale sont descendus dans la rue. Ils ont été rejoints par le personnel de plusieurs entreprises du zoning de Tertre et de Ghlin. Le groupe a été reçupar le bourgmestre.

- A Huy, un petit millier d'étudiants de toutes les écoles hutoises ont rallié avec leurs enseignants la Grand'Place. Une délégation a été reçue par la sénatrice-bourgmestre Anne-Marie Lizin.

- A Hannut, quelque 400 étudiants du secondaire, des pompiers et des membres du personnel communal ont manifesté. Ils ont été reçus par le bourgmestre Hervé Jamar.

- A Verviers, le centre a été perturbé par une manifestation silencieuse d'environ 200 personnes.

- A Virton, les employés et les ouvriers de la ville ont arrêté le travail entre 10 et 12 heures. Ils ont été rejoints par des commerçants et par des élèves.

Profitant de l'affluence au marché hebdomadaire, les 200 manifestants ont expliqué leur action aux passants.

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Légende photos :

Des travailleurs étaient hier encore sur la Grand' Place de Mons pour manifester contre l'arrêt de la Cour de cassation

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Légende photo  Didier Reynders :

Le chef de groupe PRL de la Chambre, Didier Reynders, a été écarte de la commission d'enquête parlementaire sur l'affaire Dutroux car sa soeur, juge d'instruction à Liège, a eu a connaître durant une semaine du dossier disparition de Julie et Mélissa (lors des vacances de la juge Doutrèwe)

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 Au Parlement, l'enquête de la dernière chance

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 11

Quinze députés ont trois mois pour réussir l'impensable: dire toute la vérité, rien que la vérité sur l'enquête Dutroux-Nihoul. Mission casse-cou...

Le Parlement se jette à l'eau. Hier, les élus de la Nation se sont donné trois mois pour faire toute la lumière sur les dessous, policiers et judiciaires, de l'enquête menée dans «l'affaire Dutroux-Nihoul et consorts».

Trois mois pour remporter l'épreuve de vérité que n'ont pu (ou voulu ?) réussir ni les plus hautes autorités judiciaires, ni le Comité P théoriquement chargé de contrôler les polices.           Il est vrai que cette vérité risque fort d'être peu reluisante. Et a de quoi déranger. Il appartient désormais à quinze députés (3 PS, 2 CVP, 2 P, 2 VLD (dont le président, Marc Verwilghen), 2 PRL FDF, 1 PSC, 1 VU, 1 Agalev Ecolo, 1 Vlaams Blok) réunis au sein d'une commission d'enquête parlementaire, de relever ce défi sulfureux.

Quinze représentants du peuple condamnés à réussir. Premier vice-président de la Commission, Patrick Moriau ne nie pas l'ampleur de la tâche: «C'est une mission casse-cou. Une responsabilité et une pression énormes pèsent sur nos épaules. »

Pression de la population avant tout, « qui nous demande l'impossible : de réformer toute la Justice en trois

mois ». Ce n'est pas là l'ambition de cette commission d'enquête. Mais sa tâche est tout aussi périlleuse: dresser l'inventaire des plaintes constatées dans l'enquête sur l'affaire Dutroux-Nihoul et les affaires connexes qui pourraient y être liées; reconstituer les fils de l'enquête; décrire la manière dont les proches des victimes ont été informés du fonction nement des enquêtes. Bref, passer au peigne fin, révéler tous les cafouillages.

Et en tirer les leçons pour l'avenir.

Autant d'objectifs qui valent leur pesant de dynamite. Dotée des pouvoirs d'investigation d'un juge d'instruction, la Commission d'enquête a théoriquement les moyens de les atteindre.

Elle aura sur sa table les rapports des procureurs généraux près la Cour de cassation Jacques Velu et Eliane Liekendael ; du procureur général de Liège Anne Thily; du procureur général de Gand Schins; du commandant de la gendarmerie De Ridder ; du Comité P. Elle compte aussi prendre connaissance des éléments de l'opération Othello, l'enquête parallèle de la gendarmerie.

Les moyens de les faire parler

Mais les députés ne se satisferont pas de ces seules lectures. Ils se déplaceront sur les lieux des crimes. Surtout, ils convieront tous les acteurs de cet épouvantable drame, petits et grands, à se mettre à table.

Et ils ont les moyens de les faire parler, sous serment : depuis l'enquêteur de terrain jusqu'aux responsables des services de police ; depuis les juges d'instruction jusqu'aux plus hauts magistrats.

Déjà, certains affûtent leurs questions à l'intention d'Eliane Liekendael, du général DeRidder, de la juge Doutrewe; déjà, certains brûlent d'impatience d'entendre les versions du juge Connerotte, du procureur Bourlet. Mais aussi des victimes elles-mêmes et de leurs proches, que les parlementaires se sont engagés à entendre dans les plus brefs délais.

Fameux déballage en perspective. Plus question en tout cas de s'abriter confortablement derrière la raison d'État ou le devoir de réserve pour refuser de parler. Si huis clos il y a, ce sera pour des questions de dignité, pour ne pas étaler certaines horreurs sur la place publique. Pas pour éluder les questions gênantes. « S'il y a des résistances, il faudra les dénoncer. On ne peut plus se permettre de vivre dans cette nébuleuse », assène Patrick Moriaux.  

Quitte à courir droit vers l'épreuve de force ? L'ombre des travaux de la Commission d'enquête sur le banditisme et de ses limites plane toujours : « Le contexte est différent. La Justice n'est plus cette forteresse que personne n'osait remettre en cause.

L'épreuve de force est possible. En tout cas, je ne serai pas là pour faire de la figuration.

Plus question non plus de traîner: «Notre première réunion est prévue lundi. Dès la semaine prochaine, nous devons entrer dans le vif du sujet. La population attend trop de nous. » Jamais sans doute les représentants du peuple n'auront si bien porté leurs noms.

Nous sommes le dernier rempart, l'ultime chance de découvrir les dysfonctionnements», estime Patrick Moriau   Plus dur sera l'échec.

P.Hx.

 

 

 

 

 

MARCHE BLANCHE( « La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 pg 10)


MARCHE BLANCHE

 Ce sera la marche du siècle !

 « La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 10

On attend largement plus de, 100.000 personnes,, dont 60.000 rien que par le train

La mère d'Élisabeth Brichet, disparue le 20 décembre 89 à Namur, est l'initiatrice de la marche de dimanche. A quelques heures de l'événement, voici le message de Marie-Noëlle aux dizaines de milliers de personnes attendues dans la capitale fédérale.

«Je veux leur dire que c'est une marche pacifique, pour la sécurité des enfants; et que cette marche a été pensée bien avant le dessaisissement. Elle ne doit pas être récupérée par des groupes politiques ou autres. Le calme et la détermination sont plus forts que l'agressivité. Soyons-y attentifs quand certains ne demandent qu'à nous discréditer!»

Quand on sait que la SNCB a déjà vendu 20.000 billets et qu'il n'y a plus un autocar de libre à trouver dans le royaume, ne faut-il pas craindre de possibles débordements?

« Je suis consciente du risque de l'« effet de foule ». Mais s'il y avait des débordements, ce serait le fait de ceux qui sont contre les enfants. Et je veux faire confiance aux gens. »

L'idée de la marche remonte à plus de 15 jours...

« Nous étions, Carine Russo et moi, assaillies pas les appels de tous ceux qui nous disaient: Dites-nous ce qu'on peut faire! Et nous, nous étions désemparées, ne sachant que dire. Alors nous avons réfléchi à la façon de mobiliser tout le monde. J'ai suggéré cette marche. Ce n'était encore qu'une idée... que déjà les médias l'avaient relayée. »

Il a fallu faire vite, pour tout mettre en place et obtenir les autorisations.

« Nous avons été reçus par le bourgmestre de Donnéa et sa police, qui ont consenti à nous aider, avec la Croix-Rouge et d'autres. Je tiens à les remercier tous. Même si j'ai été fâchée - et Gino Russo aussi - d'entendre dire à la RTBf que «faute devrais organisateurs, la police avait pris l'affaire en main ». D'accord, on n'est pas des syndicalistes habitués des manifs. Mais on veut faire ça bien ! C'est pour cela que nous avons renoncé à l'itinéraire initialement prévu (rue de la Loi, palais royal et palais de justice), car ce trajet comportait des risques, liés aux engorgements. Et cela aussi, c'était avant le dessaisissement dit juge Connerotte... »

Même si les organisateurs de la marche n'entendent pas se référer à l'« affaire Connerotte », Mme Bouzet a certes un avis sur la question

« Sans guère le connaître, j'aime sa discrétion et son courage. Et je trouve que la mesure qui le frappe est démesurée par rapport au plat de spaghetti.

J'ai même pensé - et je précise que cela n'a pas eu lieu ! – que j'aurais pis fortuitement être amenée à boire un verre avec M. Coméliau (N. D. R.: le magistrat qui, à Namur, instruit le dossier de disparition d'Élisabeth). Aurait-ce été une raison pour le dessaisir ? »

E.H.

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LORS de la marche pacifiste contre les missiles en 1983, la gendarmerie avait recensé 120.000 personnes dans les rues de Bruxelles. Ce vendredi soir, on annonçait déjà que le chiffre des 100.000 personnes serait dépassé, rien qu'en se basant sur les réservations des chemins de fer et des autocaristes.

Hier en fin d'après-midi, la SNCB avait déjà vendu plus de 40.000 billets en prévente, dont la grosse majorité en Wallonie (Liège et Charleroi).

22 trains supplémentaires (dont 17 en Wallonie) seront mis en circulation et tous les trains normaux vers la capitale seront renforcés dès 10 heures du matin. Il est demandé aux participants de ne pas partir trop tard car le départ de la marche sera vraisemblablement avancé à 13 heures vu l'affluence.

Les prévisions SNCB font état d'au moins 60.000 personnes qui prendront le train,sans compter les enfants de moins de 6 ans (gratuit), ni les abonnés, ni les habitants du Brabant qui auront intérêt à prendre le billet W-E à tarif réduit plutôt que le tarif unique à 250 F. De même, du côté des autocaristes, on sait qu'une opération nationale a fixé à 250 F également le prix du voyage en car qui serait organisé à partir de votre région.

Certaines sociétés organisent même des voyages gratuits.

Enfin, il ne faut pas oublier les Bruxellois qui sont également fortement concernés et qui bénéficieront de tous les transports publics gratuits (métro, tram, bus) de 12 à 20 heures.

Si cette «marche blanche» se déroule comme prévu dans le calme et la dignité, elle aura gagné un pari fou en moins de deux semaines. Celui de mobiliser toute la Belgique profonde pour une cause commune : « Celle d'un monde plus juste et plus respectueux des droits de nos enfants. » Le 20 octobre 1996 sera alors une journée qui fera date dans l'histoire de notre pays.

Luc Gochel

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Des personnalités au rendez-vous

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 10

Quel est le point commun entre Jacques Mercier, Philippe Geluck, Stéphane Steeman, Richard Ruben, Adamo, François Pirette, Tibet et Pierre Rapsat? Dimanche, ils participent à fa marche.

Certains ont mûrement réfléchi à leur présence, par crainte qu'elle soit mai interprétée et qu'on puisse penser qu'ils venaient y faire leur pub. Mais ils ne sont ni politiciens, ni avocats, buste artistes et avant tout des hommes et pères de famille.

« Nous y allons en famille, avec Philippe Geluck et quelques autres membres de l'équipe de la Semaine infernale. Nous l'avons décidé dès que nous avons pris connaissance de cette initiative. C'est !a première fois que je vais défiler et c'est une occasion unique de se faire entendre », nous confie Jacques Mercier, papa et deux fois grand-père. « J'ai croisé 200 étudiants manifestant dans le calme. J'ai été très ému par ces ados qui râlent contre cette société que les adultes leur offrent. On a laissé faire, on a été lâche.»

« Etre acteur et pas spectateur», souligne François Pirette, père de deux filles de 5 et 7 ans. «J'y serai avec elles. Je n'ai jamais manifesté quand j'étais étudiant. Je suis d'une génération où un certain calme régnait à l'époque. Ici, cela mérite d'y aller. » Entre Jemappiens, ils se connaissent l'humoriste et le chanteur. Salvatore Adamo, ardent défenseur de l'enfance (à travers ses participations aux Télévie, à Unicef...), défilera aussi.

« La cause est très importante. J' y vais en tant que citoyen et père de famille. J'ai deux fils. Je pense qu'il existe une espèce de volonté unanime d'assainissement de certaines choses en Belgique. »

Fraîchement papa d'un petit Sammy, Richard Ruben se sent également très concerné : « En principe, j'y participe. On promènera ainsi le petit ! En fait, je suis très énervé par tout ce qui se passe et toutes ces erreurs commises... »

En studio à Bruxelles, le chanteur verviétois Pierre Rapsat fera un saut à la marche blanche.

Pour sa part, André Lamy sera à l'étranger, comme les frères Taloche et Muriel Dacq. « Un problème d'agenda. Sinon, j'y aurais été avec ma femme et mes enfants», précise d'emblée l'humoriste.

Par contre, avec Marc Herman, ils se produisent en gala fin décentre pour l'association Marc et Corinne. Sensible aux événements qui se sont déroulés depuis l'été, Stéphane Steeman sera accompagné de son épouse, Régine Verelie. Papa de Ricochet, le dessinateur Tibet s'y rendra en famille, avec sa fille et ses deux petits-enfants.

Caroline Geskens

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Manifestations Historiques:

Les principales manifestations de l'après-guerre: de la violence des années 50 et 60 au pacifisme d'aujourd'hui

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 10

LA «marche blanche» sera sans doute l'une des manifestations les plus importantes de l'après-guerre.

Contrairement aux autres mobilisations du pays, elle ne sera pas organisée par des syndicats, des partis politiques ni par tout autre mouvement structuré. Mais elle devrait rencontrer un succès qui fera date.

  - Le record de foule semble avoir été enregistré le 23 octobre 1983, avec un rassemblement de 120.000 personnes selon la gendarmerie lors du mouvement de protestation contre l'implantation des missiles à Florennes.

  - La première grande secousse qui fractura notre société fut l'affaire royale. Après le plébiscite - étriqué (58 % de votes favorables) - le roi Léopold III regagna le pays en juillet 1950. Le 26 de ce mois, des grèves éclatèrent, soutenues par la FGTB et un comité d'action formé de socialistes et de communistes.

A Grâce Berleur (près de Liège), les forces de l'ordre ouvrirent le feu, tuant trois ouvriers. Il n'y eut pas de manifestation nationale, le pays étant divisé entre une Flandre léopoldiste et une Wallonie opposée au retour du Roi. Celui-ci abdiqua quand le sang coula.

  - Le mouvement de grèves le plus ample paralysa le pays durant l'hiver 1960-1961 lors de la fameuse loi unique, dite loi d'expansion économique et de progrès social» mais qui visait à alourdir les impôts.

Le 22 décembre, une manifestation tourna à l'émeute à Bruxelles devant le bâtiment de la Sabena, faisant un mort et plusieurs blessés. Le 3 janvier, 15.000 personnes défilèrent à Bruxelles.

Le 6 janvier, Liège devait déplorer un mort et neuf blessés graves devant la gare des Guillemins.

La Chambre vota la loi dite unique le 13 janvier (par 115 voix contre 90 et une abstention) et la reprise du travail fut générale le 22 janvier.

  -Les marches flamandes sur Bruxelles attirèrent le 24 octobre 1961 plus de 60.000 personnes selon les gendarmes. Drainés par le « Vlaamse Actie Comitee voor Brussel », ces manifestants, qui protestaient notamment contre un recensement linguistique - auquel on renonça- se heurtèrent à des francophones.

Des bagarres plus violentes se produisirent lors de la marche du 14 octobre 1962.

  - Les années septante et quatre-vingts furent marquées par des grèves importantes, notamment celle du secteur public en mai 1976, septembre 1982 et mai 1986. On peut mettre entre parenthèses la descente des agriculteurs européens qui saccagèrent la capitale en mars 1971 (un mort et de très nombreux dégâts).

Mais la manifestation la plus spectaculaire fut sans conteste celle du 23 octobre 1983, hostile au déploiement de missiles américains à Florennes : selon la gendarmerie, le cortège comprenait 120.000 personnes, selon les organisateurs (le C.N.P.A.D., Comité national d'action pour la paix et le développement) ils auraient été

400.000. Ce rassemblement, qui recruta surtout en Flandre, entrait dans le cadre d'un mouvement pacifiste européen mais il n'aboutit pas puisque les armes furent installées puis finalement retirées.

- Autre succès de foule : celui du 22 mars 1992, pour la démocratie, et la tolérance et contre le racisme.

Selon la gendarmerie, ils furent un peu moins de 70.000, selon les organisateurs de 120.000 à 150.000.

L'un des moteurs de ce rassemblement fut le MRAX (Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie). Il s'inscrivait en réaction aux scores réalisés par l'extrême droite aux élections du 24 novembre 1992.

- Le groupe le plus remuant de ces dernières années fut celui des enseignants de la Communauté française. Parmi les multiples actions de mécontents, on peut retenir deux temps forts : ceux du 18 novembre 1990, organisé par les associations de parents 40.000 personnes selon la police et la gendarmerie, 100.000 d'après les organisateurs) et du 28 février 1996 réunissant des protagonistes des deux communautés (de 35.000 à 50.000).

G.D.

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PLAINTE

Halte au PTB

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 10

HIER, à la demande des parents de Julie et Mélissa, le tribunal des référés de Bruxelles a interdit provisoirement au parti d'extrême gauche PTB de faire appel, à travers toutes publications, à la participation à la marche de dimanche si cet appel a un but autre que celui voulu par les organisateurs de la marche. Si le PTB ne se conforme pas à cette ordonnance, il sera condamné à une astreinte de 50.000 F par infraction.

Le PTB (Parti du travail de Belgique) profite de toutes les occasions possibles pour se joindre à des manifestations et clamer ses revendications d'extrême gauche.

Cela, les parents Lejeune et Russo n'en voulaient pas: c'est la raison pour laquelle ils avaient assigné ce groupuscule devant le tribunal des référés de Bruxelles.

En effet, à plusieurs reprises déjà,ce parti avait publié les photos des deux fillettes assassinées dans leurs tracts.

Me Fermon, l'avocat du PTB, s'est étonné de cette requête. Il a souligné que le parti, à la demande des parents Russo et Lejeune, avait déjà retiré ces photos des tracts.

Il ne devrait pas y en avoir d'autres mais, contrairement aux membres des autres partis qui défileront individuellement, le PTB, lui, risque fort de manifester avec ses célèbres calicots. Mais cela, ce n'était pas du ressort du tribunal.

Ce sera, dimanche, aux forces de l'ordre d'intervenir.

 J.H.

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RADIOS TV

Directs et flashes spéciaux

« La Meuse » du samedi 19 et dimanche 20 octobre 1996 page 10

La RTBF et RTL-TVi ont mobilisé leurs troupes, ce week-end. Déjà samedi, à 19 h 25, dans « En direct » sur RTL-TVi, Stéphane Rosenblat accueille Marie-Noëlle Bouzet, maman d'Élisabeth Brichet et responsable de la marche en blanche.

Le lendemain, à midi, sur le plateau de Controverse, Pascal Vrebos donne exclusivement la parole aux parents d'enfants disparus. Il accueille les Lejeune, les Marchal, les Russo, Nabela Benaïssa et Marie-Noëlle Bouzet.

Place ensuite aux éditions spéciales du JT à 13 h et 19 h, en direct de la marche.

Trois journalistes-vedettes de la chaîne seront sur le pont. Après Philippe Henry et Philippe Malherbe, Frédérique Ries prendra le relais l'après-midi dans le cadre des flashes d'infos. Bel RTL couvrira également l'événement. Entre 13 et 14 h, Pascal Vrebos animera Les auditeurs ont la parole.

 

A la RTBF, d'importants moyens sont aussi déployés. A 12 h 45, dans le JT, sont prévus des sujets traitant les départs en gares ainsi qu'un direct à partir de la gare du Nord. A 13 h10, 'Hebdo se met au diapason.

Il propose un reportage de 26 minutes de Marc Bouvier et Pascale Preumont sur la marche, ses raisons, comment s'est faite cette mobilisation... Durant tout l'après-midi, des flashes en direct à18 h, un document intitulé Fleurs blanches relate l'histoire de Julie et Mélissa.

Après le JT soir, Alain Gerlache animera le débat entre les parents d'enfants disparus, des politiciens et des sociologues.

 

CG.

 

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