mercredi 27 mai 2009

Suite : ÉVITER UN « Othello bis » pages 32 et 33


Suite : ÉVITER UN « Othello bis » pages 32 et 33

……obtenir des mandats de perquisition afin de s'assurer du passage ou de la présence d'enfants dans une ou des demeures ou dépendances de Dutroux».

- «Sous le motif de vols», c'est dire si la juge d'instruction Doutrewe n'est plus concernée par cette enquête que la Gendarmerie va continuer à mener tambour battant: le lendemain 10 août, un gendarme de Charleroi rencontre deux informateurs qui fournissent énormément de détails sur les plans de Marc Dutroux. Ces détails sont d'une précision telle que le gendarme Pettens est quasi sûr de son coup.

De plus, «fin juin 95, Dutroux Marc vient chez Y (ndlr: le second informateur anonyme). Il propose à Y de faire le guet lors d'un coup. Dutroux lui explique que cela va lui rapporter beaucoup. Y demande des précisions mais Dutroux Marc lui dit qu'il en dira plus le moment opportun. Depuis lors, plus de contact».

«Fin juin», il y a donc de fortes chances que cela concerne l'enlèvement de Julie et Mélissa. Car les propositions antérieures faites à Y par Dutroux concernent précisément des enlèvements d'enfants et Y avait failli y être entraîné en juillet 1993. Et le rapport de se terminer: «A notre connaissance, les deux informateurs ne se connaissent pas. Nous pouvons donc en conclure que deux personnes différentes ont reçu les mêmes propositions de Dutroux concernant des enlèvements d'enfants».

De nombreuses recherches seront effectuées par la Gendarmerie sur les revenus, le patrimoine immobilier et les voyages en Slovaquie des époux Dutroux-Martin. Le couple sera également placé sous observation. Normal puisque, selon un procès-verbal daté du 23 août 1996,dans lequel les gendarmes de la BSR Grâce-Hollogne se justifient face au juge d'instruction Doutrewe, «dès la réception du fax du 7/7/95 de Charleroi, nous avons pris très au sérieux les informations qu'il contenait. Cette information était une des plus sérieuses qui nous parvenaient à cette époque». Pourtant, les gendarmes n'adresseront aucun procès-verbal au juge d'instruction. Ils reconnaissent l'avoir mise au courant verbalement «après (..) la réunion organisée (...) par le BCR à Charleroi», donc vers la mi août. Cela ressemble à s'y méprendre à une couverture des sous-officiers qui se rendent compte à l'époque que le BCR les entraîne dans un jeu dangereux.

Car pourquoi ne pas prévenir, par procès-verbal, la juge d'instruction ? Sous la classification «secret», le rapport concernant les contacts avec les deux informateurs carolos souligne dès le départ qu'«étant donné la précision des informations relatées ci après,nous demandons qu'actuellement, elles ne soient pas utilisées opérationnellement afin de pouvoir garantir la sécurité des informateurs». Dans un autre rapport «secret» transmis cette fois le 22 août 1996 au ministre de la Justice Stefaan De Clerck par le général Deridder, commandant de la Gendarmerie, ce dernier reprend l'argument de la sécurité des informateurs.

Pour rappel, selon la Gendarmerie, Dutroux est un «vrai truand (...) dont il faut se méfier». Est-ce pour cette raison que la Gendarmerie, voulant éviter toute fuite, garde l'information «interne»?

- Pas du tout. Le 25 août 1995, un rapport de la Gendarmerie est remis au parquet de Charleroi. Sous l'objet Opération Othello, il contient les éléments à charge de Dutroux, en évitant soigneusement les précisions qui permettraient d'identifier les deux informateurs. D'autres rapports concernant l'opération Othello arriveront encore au parquet de Charleroi les 1 er septembre et 29 novembre 1995. Ces informations ne seront jamais transmises par le parquet de Charleroi à son homologue de Liège.

PROTECTIONS?

- En novembre 1995, la question de la protection de Marc Dutroux par les milieux judiciaires de Charleroi doit aussi être posée. L'opération Othello est en cours lorsque se déroulent le 5 novembre des faits d'enlèvement et de séquestration de trois personnes liées à un vol de camion. Parmi les suspects, Marc Dutroux. Ce dossier qui amènera l'inculpation de l'inspecteur de la PJ de Charleroi Georges Zicot. Mais le 22 novembre, à Obaix, une gamine est victime d'un viol avec tentative d'égorgement. Premier sur place, un gendarme de Thuin qui a déjà enquêté sur Dutroux dans les années `80. Pour lui, pas de doute, les faits sont signés Dutroux. Mais en fonction de la répartition des tâches entre services de police, le juge d'instruction Somville confiera l'enquête à la PJ. Le lendemain, l'inspecteur Zicot et le commissaire Van der Haegen (lui aussi inculpé par Neufchâteau) rendront visite à la gamine à l'hôpital. Le 24 novembre, le parquet de Charleroi avait donc sous la main trois dossiers (Othello, la séquestration suite au vol de camion et Obaix) dans lesquels Dutroux était suspect. Il faudra hélas attendre le 13 décembre pour que la première perquisition ait lieu chez lui. Sans résultat. Si la perquisition avait eu lieu immédiatement après la tentative d'égorgement d' Obaix au domicile de Dutroux, les enquêteurs auraient retrouvé sans difficulté Julie et Mélissa. C'est en effet Weinstein, le complice de Dutroux, qui était alors enfermé dans la cache, les deux fillettes se trouvant temporairement retenues au premier étage du 128 route de Philippeville à Marcinelle.  Mais l'enquête sur le viol et la tentative d'égorgement d' Obaix, qui n'a pas abouti à l'époque, révèle encore de bien curieux éléments. Au moment des faits, un jeune témoin signalait à trois policiers en civil qu'il avait vu l'agresseur. Mais il n'avait jamais été interrogé. Réentendu en septembre dernier par les enquêteurs de Neufchâteau qui ont repris le dossier, ce témoin a reconnu Marc Dutroux sur photo comme étant, à 70%, l'agresseur d'Obaix. De même, deux suspects ont bénéficié d'un non-lieu grâce à une prise d'empreinte génétique. Le 6 décembre 1995, on prélevait un cheveu lors de l'interrogatoire du suspect Dutroux. Le test génétique n'a jamais été effectué. Voici deux mois, les enquêteurs de Neufchâteau retrouvaient ce cheveu dans le tiroir d'un bureau de la PJ de Charleroi...

- On sait qu'un gendarme de Dinant a aussi été inculpé dans le cadre de ces protections. Sur son sous-main, les enquêteurs avaient retrouvé l'inscription «NihoulLelièvre, ne pas toucher» en liaison avec un trafic de drogue. De même, on a retrouvé chez Dutroux une liste de cafés de la région de Charleroi avec, en regard, des indications sur le fait que le patron était un «indic» de la police ou que le café était fréquenté par des policiers en civil.

MANQUEMENTS, TOUJOURS

- La commission pourra aussi constater d’autres manquements concernant le traitement des informations sur Marc Dutroux. Ainsi, en juin dernier, deux fax émanant du Service Général d'Appui Policier (SGAP) revenaient encore sur ce suspect carolo. Le premier, daté du 18 juin, était adressé à la PJ de Liège dans le cadre de l'enlèvement de Julie et Mélissa. Le second, plus complet, est daté du 20 juin. Il était destiné à la Gendarmerie de Tournai, dans le cadre cette fois de l'enlèvement de Sabine. Dans un cas comme dans l'autre, ces renseignements n'ont pas été exploités. Certes, il était dramatiquement trop tard pour An et Eefje comme pour Julie et Mélissa. Mais cela aurait pu mettre un terme aux souffrances de Sabine et éviter l'enlèvement de Laetitia.

pourquoi ?

- Au-delà des dysfonctionnements et des protections, il reste à expliquer la curieuse attitude de la Gendarmerie dans le dossier Dutroux. Si, comme tout le laisse penser, la juge d'instruction Doutrewe a été mise hors course lors de la réunion du 9 août 1995 organisée par le BCR, il s'agirait d'une décision de l'Etat-Major de la Gendarmerie. Cela expliquerait quelques incongruités comme ces informations du député Decroly et de la sénatrice Milquet sur la destruction de certains documents du BCR.

- Le 20 août dernier, l'adjudant Gilot de la BSR de GrâceHollogne rédigeait un procèsverbal destiné à la juge Doutrewe sous la qualification «personne disparue, enlèvement d'un enfant». Il y explique toutes les recherches de la Gendarmerie concernant Dutroux et conclut: «Au vu des recherches (..) et des résultats finaux «négatifs», tous ces échanges de courrier étaient internes Gendarmerie et n'avaient pas fait l'objet d'un PV négatif à Mme le juge d'instruction de Liège, conformément aux instructions».

- La commission devra se pencher sur les conditions d'envoi de ce pv au juge d'instruction. Il semble en effet que Gilot, le 21 août, se trouvait au BCR de Bruxelles et ait demandé à un de ses collègues de transmettre le pv par fax au juge Doutrewe. A la lecture de ce pv, il est évident que la Gendarmerie a mené une enquête parallèle en échappant au contrôle du magistrat instructeur chargé du dossier.

- Curieusement, après cette «visite» au BCR, l'adjudant Gilot se met à rédiger, le 23 août, un nouveau pv sur les mêmes faits qualifiés cette fois de «problème social: information-renseignements». Beaucoup plus volumineux que le premier et rédigé dans un tout autre style, ce second pv «charge» cette fois la juge Doutrewe. Il est vrai qu'entre les pv des 21 et 23 août de Gilot, le général Deridder a rentré le 22 août son rapport «secret» au ministre de la Justice et que celui-ci ne correspond pas à la première version des faits présentés par Gilot. Mais même le général Deridder est contraint de constater que la seule trace écrite du volet Dutroux dans le dossier concerne un devoir d'enquête tout à fait périphérique au noeud de l' affaire Dutroux.

- L'attitude de la Gendarmerie, qui a mené son enquête parallèle, a eu pour conséquence de mettre tant l'appareil judiciaire liégeois que la PJ sur la touche. Dans le «simple» cadre de la guerre des polices ou parce que la Gendarmerie se méfiait d'un appareil judiciaire liégeois qu'elle estime fort corrompu?

Philippe Brewaeys

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CONNEROTTE, LE RETOUR

Soir illustré du mercredi 6 novembre 1996 page 32

Viré des dossiers Cools et Dutroux par la cour de Cassation, le juge d'instruction de Neufchâteau Jean-Marc Connerotte a de nouveau le temps de s'occuper du troisième gros dossier qu'on lui a confié, celui du GIA. Et il a frappé fort en arrêtant Kamel Noureddine, un islamiste algérien soupçonné d'avoir participé à l'attentat du RER qui fit 8 morts et 84 blessés dans la station du RER Saint-Michel à Paris le 25 juillet 1995.

• Paris a affirmé qu'il n'y avait «actuellement» pas de lien entre Noureddine et cet attentat. En fait, il semble surtout que l'information se soit retrouvée trop tôt dans la presse, mettant en danger certains témoins.

• Tout a commencé la nuit du 11 au 12 décembre 1995 par ce qui aurait dû être un banal contrôle de police, auquel une voiture tente d'échapper près de Bastogne. Au cours de la poursuite, les fuyards perdent un fusil mitrailleur d'origine yougoslave et balancent une grenade en direction des gendarmes.

Celle-ci est semblable à celles découvertes en mars 1995 dans les milieux proches du GIA à Bruxelles. Suite à l'incident de Bastogne, les enquêteurs arrêtent Ali El-Majda, déjà arrêté en mars 1995 dans le cadre de l'affaire d'Ahmed Zaoui. Mais ils foncent aussi sur des Bosniaques résidant au Luxembourg qui sont soupçonnés d'entretenir des liens étroits avec la mouvance islamiste armée en Europe. Dans la foulée, les enquêteurs démantèlent un trafic d'armes passant par Liège, qui servait à alimenter soit les combattants bosniaques soit les islamistes algériens.

- L'enquête prend alors de l'envergure et les services de sécurité de six pays européens (Grande-Bretagne, Pays-Bas, Allemagne, Luxembourg, Belgique et France) s'y intéressent de fort près.

Car Nusret Jusuvovic, un ancien combattant bosniaque arrêté au Luxembourg, semble être lié à la bande de Roubaix démantelée en mars dernier. Kamel Noureddine, l'homme aux multiples identités arrêté aux Pays-Bas en avril dernier puis relâché et enfin livré à la Belgique en octobre dernier serait, lui, l'une des têtes du GIA en Europe.

Il pourrait avoir servi de relais entre Londres et Paris dans le cadre de l'attentat du RER. A Neufchâteau, on ne chôme pas.

Ph.B.

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GAME OVER

Soir illustré du mercredi 6 novembre 1996 page 33

- Le baron Benoît de Bonvoisin a donc été condamné en appel à 5 ans de prison ferme avec arrestation immédiate à l'audience pour une série de délits de type financier dans la gestion de deux sociétés PDG et CIDEP. La justice a provisoirement - car l'intéressé peut faire opposition à ce jugement puis se pourvoir en Cassation -, mis fin à une procédure entamée en janvier 1979 par une plainte à Genève pour escroquerie.

- Bras droit de Paul Vanden Boeynants à l'époque du CEPIC, de Bonvoisin a ainsi entretenu, grâce à ses deux sociétés, tout un petit monde d'extrême droite pendant les années `70 et `80: le mensuel « Nouvel Europe Magazine », le Front de la Jeunesse,le Parti des Forces Nouvelles ainsi qu'un service de barbouzes militaires, PIO. Il oeuvrait encore au rapprochement entre cette extrême droite et l'aile droite du PSC.

- Si cette procédure judiciaire a mis aussi longtemps à aboutir, c'est grâce aux écrans de fumée lancés par le baron qui visaient à déstabiliser l'appareil judiciaire qui avait l'impudence de s'occuper de ses petites affaires: Sûreté de l' Etat comploteuse, magistrats payés par le KGB,...

- Hasard ou pas, l'un des derniers défenseurs du baron n'est autre que Julien Pierre, l'avocat de Marc Dutroux. Au moment où son client de Bonvoisin en prenait pour cinq ans, l'avocat liégeois s'attaquait violemment au procureur du Roi Michel Bourlet dans une interview à la télévision canadienne, le traitant de poujadiste. Toujours selon le défenseur du baron et de Marc Dutroux, la Marche blanche n'aurait été qu'une gigantesque manipulation de la Gendarmerie sur le thème du rejet du séparatisme

- Le poujadisme et la manipulation, Me Pierre connaît. Il est en effet très (très) proche d'Agir, un groupuscule fascisant liégeois. De même, les avocats de Michel Nihoul, Virgine Baranyanka et Frédéric Clément de Cléty, sont, eux, liés au Front National. Il n'est pas question de contester ici, comme le pensent certains esprits faibles, le droit de chacun à être défendu.

Mais force est de constater que dans le dossier de Bonvoisin comme dans celui de Dutroux et Nihoul, des personnes partageant une même idéologie d'extrême droite utilisent des méthodes identiques: traîner dans la boue des magistrats et des enquêteurs honnêtes, compétents et travailleurs.

On constatera qu'aucun des autres avocats du dossier Dutroux n'a introduit de requête en suspicion légitime et ne tente de salir la réputation des magistrats et des enquêteurs. Parce qu'ils ne sont pas, eux, d'extrême droite?

Ph. B.

ÉVITER UN « Othello bis » (Soir illustré du mercredi 6 novembre 1996 pages 30 et 31 )


ÉVITER UN « Othello bis »

Soir illustré du mercredi 6 novembre 1996 pages 30 et 31

Semaine chargée: révélations sur deux tentatives de meurtre sur un témoin d'un réseau de pédophilie, départ "en vacances" d'un commissaire travaillant sur ces menaces,...

L'enquête sur l'enquête également secouée: le député Vincent Decroly (Écolo), relayé par la sénatrice PSC Joëlle Milquet, a affirmé que la Gendarmerie avait détruit des documents concernant l'opération Othello. Après le passage à huis clos devant la commission parlementaire de la famille Benaïssa, Serge Moureaux (PS), manifestement fort marqué, parlait d'éléments très graves et oscillait entre l'incompétence de l'appareil judiciaire bruxellois et la protection des réseaux.

Un vent favorable a encore déposé sur nos bureaux une série impressionnante de documents concernant la fameuse opération Othello. Plongée dans les méandres des enquêtes.

- La commission parlementaire d'enquête a du pain sur la planche. La guerre des polices qui fait rage et le développement des enquêtes de Neufchâteau dans des zones à risque provoquent de nouvelles tensions qui pourraient freiner la manifestation de la vérité.

- La situation actuelle est particulièrement délicate. Dans la foulée de l'enquête sur Marc Dutroux, Michel Nihoul et consorts, les enquêteurs travaillant sous la direction des magistrats de Neufchâteau ont recueilli, depuis deux mois et demi, une masse de données qui ont amené l'ouverture de plusieurs dossiers: une dizaine ont été transmis au parquet général de Liège qui doit en assurer le suivi. Certains faits, parfois fort anciens, pourraient être prescrits.

MENACES

- Neufchâteau a conservé quatre dossiers connexes aux activités de Marc Dutroux et/ou de Michel Nihoul. Des dossiers d'une extrême gravité Si plusieurs journalistes, dont nous sommes, n'ont encore rien publié à ce sujet, c'est précisément pour permettre aux enquêtes d'aller jusqu'au bout. De multiples devoirs sont actuellement en cours et il convient de ne pas les perturber par des publications prématu rées. Ces enquêtes concernent effectivement des personnalités du monde politique et des affaires ainsi que des magistrats et des avocats. Selon nos informations, ces enquêtes avancent bien et devraient aboutir dans les semaines voire les mois qui viennent.

- Dans le cadre d'un de ces quatre dossiers, une jeune femme, ancienne victime d'un réseau de pédophilie, a été la cible de deux tentatives d'assassinat les 10 et 14 octobre dernier. Depuis, ce témoin est sous la protection de la police. C'est dire si ces réseaux sont encore actifs et si les faits qui sont mis à jour sont graves. Mais les enquêteurs voudraient surtout savoir comment le réseau a été mis au courant de l'existence même de ce témoin.

Certains relient ces faits à l'agression dont a été victime Marie France Botte le 9 octobre. Cette dernière était une cible potentielle puisqu'elle avait publiquement parlé de remettre au procureur du Roi Michel Bourlet des listes de membres de réseaux pédophiles. Ce qu'elle n'a par ailleurs jamais fait.

CONGÉ

- On sait également que le commissaire Georges Marnette de la PJ de Bruxelles est brutalement parti en congé. A plusieurs reprises, il a essayé de rentrer dans l'enquête Dutroux/Nihoul. Il était chargé de l'enquête sur les menaces dont sont victimes les témoins. Selon nos informations, certains subordonnés du commissaire se seraient plaints de rétentions d'informations de la part de Georges Marnette. De même, la

brigade nationale de la PJ, la fameuse 23ème brigade, qui coordonne le travail des différentes PJ locales dans cette enquête, semblait ne plus vouloir travailler avec lui. On l'a donc gentiment mais fermement poussé vers la sortie. Comme quoi des différends peuvent aussi éclater à l'intérieur d'un même corps. Il en va aussi ainsi à l'intérieur de la Gendarmerie, où la transmission des données entre différentes unités ne se passe pas toujours sans d'énormes coups de gueule. Les magistrats qui pilotent ces enquêtes doivent donc faire preuve d'énormément de psychologie pour éviter que la zizanie ne s'installe entre corps de police différents ou au sein de l'un et l'autre corps qui travaillent ici ensemble.

OTHELLO

La commission parlementaire d'enquête est amenée à examiner l'échec de l'opération Othello de la Gendarmerie ainsi que les éventuelles protections dont Marc Dutroux et ses complices auraient pu bénéficier. Dans le contexte d'affrontement ouvert entre la Gendarmerie et la Police Judiciaire, ce n'est pas aisé: chaque service tente d'exploiter les fautes de l'autre pour essayer de lui mettre la tête sous l'eau.

Les intoxications et les exagérations sont nombreuses. Les membres de la commission doivent également déterminer précisément les responsabilités des échecs pour éviter de démobiliser les policiers de base dont le travail concret sur le terrain est à cent lieues de ces guerres d'appareils qui ne profitent qu'à la criminalité. Le travail de la commission est d'autant plus complexe qu'il faut éviter d'analyser ce qui s'est passé hier à la lumière de faits aujourd'hui connus.

- L'opération Othello trouve son origine dans un fax envoyé le 7 juillet 1995, deux semaines après l'enlèvement de Julie et Mélissa, par la BSR de Charleroi à celle de Grâce-Hollogne. «Nous vous transmettons ces renseignements pour information dans le cadre de la disparition des deux enfants pour laquelle vous enquêtez». Il s'agit d'éléments recueillis en 1993 et 1994 à Charleroi dans l'opération Décime qui visait déjà Dutroux.

Le 21 octobre 1993, un informateur avait signalé que Marc Dutroux «était occupé à faire des travaux dans les caves d'une de ses maisons (...) dans le but d'y loger des enfants en attente d'être expédiés à l'étranger.

Une série de perquisitions ont été effectuées dans le cadre des dossiers de vols et recels de marchandises volées, (...) des travaux ont été constatés dans la cave. Mais aucune trace de présence d'enfant n'a été révélée».

- «L'enquête des vols a duré plus d'un an (...) rien n'a été relevé concernant des problèmes avec les enfants (... ) L'intéressé a fait un long séjour en prison suite à une condamnation pour des viols sur des enfants qu'il enlevait avec son épouse». Ces renseignements, récoltés un à deux ans plus tôt, s'étaient donc révélés négatifs. Mais ils intéressaient manifestement les gendarmes qui enquêtaient sur l'enlèvement de Julie et Mélissa. Ceux-ci semblaient même prêts à fournir les renseignements au juge d'instruction liégeois puisque le 28 juillet 1995, la BSR de Seraing demandait à la BSR de Charleroi «de procéder à diverses recherches de renseignements en cause de Dutroux Marc (...) Les renseignements que vous pourrez nous fournir détermineront d'éventuelles actions ulté rieures, notamment mandat de perquisition de notre part».

Dans le chef des gendarmes «de base», il est donc clair à la fin juillet 1995 que l'action judiciaire se fera sous la houlette du juge d'instruction de Liège Mme Doutrewe, même si celle-ci est partie en vacances. Deux nouveaux fax internes à la BSR, partant le 4 août 1995 de Charleroi vers Grâce-Hollogne, confirment l'intérêt qu'on porte à Dutroux. D'une part, l'informateur d'octobre 1993 a été recontacté et confirme les éléments fournis; et, d'autre part, on signale qu'un proche de Dutroux utilise une voiture qui pourrait correspondre à celle qui aurait servi à l'enlèvement des deux fillettes. La cible est un client sérieux: «Dutroux apparaît comme un vrai truand, n'ayant pas froid aux yeux et dont il faut se méfier». Et le 7 août, Seraing signale à Charleroi qu'«il serait intéressant de monter un dossier concernant les intéressés» Dutroux et son épouse Michelle Martin.

REVIREMENT LIE AU BCR ?

C'est deux jours plus tard, le 9 août 1995, qu'une réunion est convoquée par le Bureau Central de Recherches (BCR) à Charleroi. S'y retrouvent les B S R de Charleroi, de Seraing, de Thuin (elle avait mené la première enquête sur Dutroux à la fin des années `80) et de Namur. C'est ici que les choses semblent avoir dérapé. Si le 28 juillet 1995, la BSR de Seraing parlait «de mandat de perquisition de notre part» impliquant l'intervention du juge d'instruction liégeois Doutrewe, le rapport de la réunion convoquée par le BCR le 9 août montre qu'on a quitté cette voie normale: «Nous maintenons l'hypothèse retenue lors de la réunion: à savoir, sous le motif de vols,

(Suite pages 32 et 33)

LES CINQ MENSONGES DE L’AFFAIRE DUTROUX( Suite pages 28 et 29)



LES CINQ MENSONGES DE L’AFFAIRE DUTROUX

Suite pages 28 et 29

……..les gendarmes avaient déjà décidé de travailler sur cette affaire en dehors du dossier d'instruction "disparition" instruit à Liège. C'est donc volontairement que la gendarmerie, qui avait déjà travaillé en catimini jusque-là sur Dutroux, décide de poursuivre par le biais d'une 'mise sous observation" demandée au parquet de Charleroi.

Il s'agit là d'un élément capital - mais non reconnu publiquement par la gendarmerie - parce que les moyens d'enquête sont très nettement différents quand on travaille dans le cadre d'un dossier d'instruction ou dans le cadre d'une "mise sous observation". Certes, en choisissant la seconde formule, les gendarmes se donnaient la possibilité de prendre Dutroux en flagrant délit ou de découvrir une infraction qui leur aurait permis d'obtenir l'ouverture d'un nouveau dossier "Dutroux" qui leur serait attribué et partant, des mandats de perquisition. Dans ce cas, n'auraient-ils pas été considérés comme des héros qui ont trouvé la vérité en dehors de l'instruction menée à Liège sous la direction d'un membre de la Pi?

Mais ce choix est aussi celui d'apprentis sorciers, car la mise sous observation, à la différence d'une enquête menée dans une instruction, ne permet pas d'obtenir de réquisitoires d'un juge. Que ce soit par exemple pour vérifier des comptes bancaires - or l'on sait aujourd'hui que les renseignements relatifs aux comptes de Dutroux sont très parlants - ou pour mener une perquisition. En résumé, on se prive volontairement de la possibilité d'aller voir ce qui se passe chez Dutroux, alors qu'il a pourtant urgence, et on préfère observer ce qui se passe devant sa porte!

A la décharge de la gendarmerie, on relèvera pourtant cet argument évoqué dans le procès-verbal déjà cité plus haut, des gendarmes Lesage et Gilot: "Nous avons eu avec Mme le Juge d'instruction Doutrewe des réunions régulières en son cabinet. (...) Lors des premières réunions (...), nous avions fait part à Mme Doutrewe du fait que de nombreux services de police et gendarmerie rédigeaient d'initiative des procès-verbaux relatifs à des agissements de suspects commis sur d'autres arrondissements judiciaires. Mme le Juge d'instruction Doutrewe et M. le Premier Substitut Hombroise du parquet de Liège nous ont prescrit verbalement d'inciter les services de police à transmettre leurs dossiers, via leurs parquets respectifs, au parquet de Liège qui, après en avoir pris connaissance, l'aurait transmis en communication à Mme le Juge d'instruction Doutrewe s'il jugeait nécessaire.

Le but était à la demande de Mme le Juge d'instruction Doutrewe, de ne pas encombrer le dossier de faite n'ayant pas trait, à première vue, avec l'enlèvement de Julie et Mélissa. (...) Il avait été déterminé par Mme le Juge d'instruction Doutrewe qu'il n'était pas réalisable de commencer à contrôler les suspects moeurs, géographiquement éloignés de la région liégeoise. Si une vérification d'un suspect lointain devait être faite, elle le serait par un service de police local. Ce dernier rédigerait un procès-verbal si cette vérification s'avérait positive ou du moins si elle était sujette à d'autres vérifications. "

Voilà qui remet la balle dans le camp de Mme Doutrewe. Mais cette défense de la gendarmerie Fait fi du fait qu'aucun magistrat n'a le droit d'empêcher un enquêteur de rédiger un procès-verbal et de demander un mandat de perquisition s'il le juge nécessaire. Or, à aucun moment dans les quatorze mois d'enquête, la gendarmerie n'a jugé nécessaire d'entrer dans le dossier "Julie et Mélissa" instruit à Liège par un tel procès-verbal. Pourtant, on imagine mal un magistrat instructeur refuser un mandat de perquisition dans un tel dossier sur un suspect "très intéressant". En admettant même que Mme Doutrewe n'ait pas été "très chaude" à propos de la piste Dutroux, pourquoi les gendarmes ne l'ont pas mise au pied du mur en lui transmettant ces informations par écrit?

La réponse est sans doute que, décidément, la gendarmerie pensait pouvoir résoudre l'affaire dans un dossier qu'elle aurait elle-même initié par le biais de son opération Othello décidée lors de la réunion du 9 août. En témoigne d'ailleurs la demande de mise sous observation rédigée par le capitaine Legros à l'attention du parquet de Charleroi, le 25 août 1995. C'est là le second mensonge de l'affaire Dutroux, un mensonge par omission, cette fois.

2 ème mensonge : autour du rapport du 25 août 1995

Au vu de ce qu'on sait aujourd'hui, le libellé de cette demande est beaucoup trop imprécis: "Cadre généra Dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains, il apparaît que certaines rumeurs persistantes font état du comportement suspect d'un habitant résidant sur le ressort du district de Charleroi. Ces rumeurs se sont amplifiées depuis la disparition de Julie et Mélissa."

Étonnant "cadre général" en effet, alors qu'on l'a vu, les documents internes de la gendarmerie mentionnent carrément pour objet "Disparition de Julie et Mélissa". Explication probable? Les gendarmes enfermés dans leur logique de délocalisation de l'enquête à Charleroi, leur demande de mise sous observation ne peut être trop limpide. On laisse donc supposer au magistrat qui lit le document - en l'occurrence le 1er substitut Robert - que l'opération Othello n'est pas directement liée à la disparition des petites martyres de Grâce-Hollogne. On l'inscrit donc dans un cadre beaucoup plus large: la traite des êtres humains en général. Et pour rendre les choses encore plus confuses, il est aussi question dans cette demande de suspicions en ce qui concerne un trafic international de voitures volées. La demande en question n'est pas "complète" et "Fidèle" comme l'exige la circulaire ministérielle du 24 avril 1990 sur les "techniques particulières de recherches' qui réglemente les observations. Elle néglige en effet de mentionner plusieurs éléments concernant Dutroux qui sont alors connus par les gendarmes et qui ressortent de différents rapports internes.

Bien sûr, le 1er substitut Robert - dont nous avons analysé le rôle dans notre précédente édition - aurait pu être plus finaud et malgré tout relever que les gendarmes devaient plutôt s'adresser à Liège. Mais de leur côté, les gendarmes ne pouvaient ignorer que leur démarche était non seulement très risquée pour retrouver les enfants disparus encore en vie mais en plus illégale. En effet, la circulaire du 24 avril 1990 déjà évoquée plus haut précise que "lorsque l'observation est liée à des faits qui font l'objet d'une instruction", le juge d'instruction concerné doit être prévenu. Cela doit être fait par le service qui recourt à l'observation préalablement à la mise sous observation et par écrit. C'est d'ailleurs ce que la gendarmerie avait fait dans le cadre de la première mise sous observation de Dutroux en 1993, l'opération Décime, visée pour exécution par le juge Lorent de Charleroi. Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait dans le cadre d'Othello? La gendarmerie est-elle en mesure de démontrer que l'opération Othello était totalement étrangère à l'affaire Julie et Mélissa? Poser la question, c'est déjà y répondre.

3ème mensonge : autour des perquisitions de 1993 chez Dutroux

Le 8 novembre 1993, à la suite des premières accusations de Claude Thirault contre Dutroux, cinq perquisitions sont organisées dans ses maisons par la gendarmerie de Charleroi. Thirault avait parlé de travaux dans les caves de la maison de Marchienne-au-Pont où étaient aménagées des caches pour y loger dés enfants. On découvre en effet que Dutroux fait des travaux de terrassement dans la maison désignée par Thirault mais comme ce dernier déclare qu'il "aménage ses caves sans Plus", l'enquête s'arrête là !

Pourtant, à cette époque, la gendarmerie ne pouvait ignorer un autre élément qui crédibilisait les dires de leur informateur. A savoir le fait que Dutroux avait déjà été condamné pour séquestration et viols, notamment d'une mineure d'âge en 1985. Mais bizarrement, Thirault n'est même pas recontacté pour en savoir plus, pour étayer une éventuelle piste vers les activités pédophiles de Dutroux ou ses projets machiavéliques en la matière: il n'est plus question des déclarations de l'informateur jusqu'en 1995... Après l'enlèvement de Julie et Mélissa. Fait encore plus troublant à propos de ces perquisitions: dans le rapport confidentiel du procureur Velu, il fait allusion à une lettre du juge d'instruction Lorent, datée du 11 septembre 1996, de laquelle il ressort qu'il n'aurait pas été informé du résultat de ces perquisitions en ce qui concerne les travaux de terrassement réalisés par Dutroux.

4ème mensonge : autour des perquisitions chez Dutroux en 1995

Après avoir observe Dutroux sans résultats entre août et octobre 1995, les gendarmes se rendent compte fortuitement que Dutroux a été arrêté le 7 décembre 1995 dans le cadre d'un dossier de séquestration et violence mettant en cause également Bernard Weinstein. Avec l'appui du substitut Troch, ils obtiennent - enfin! - un mandat de perquisition du juge d'instruction carolo Lorent dans le cadre de son dossier vols. D'une part, le fait de perquisitionner dans le cadre de l'affaire de vols, plutôt que d'essayer d'obtenir mandat dans le dossier "Julie et Mélissa" était une décision contestable de la gendarmerie: elle limitait en effet les moyens techniques utilisables. Nous avons déjà cité les propos d'un enquêteur rapportés par un gendarme à ce sujet dans le rapport confidentiel du Comité P: "Je tiens à signaler le cadre légal dans lequel nous devions travailler suite aux mandats délivrés par M. le Juge Lorent, il ne nous était pas possible de faire usage de moyens spéciaux (chien pisteur, caméra IR), cette approche n'a donc pas été abordée". Cela aurait été possible dans le cadre du dossier "Julie et Mélissa". D'autre part, Jean-Denis Lejeune, le papa de Julie, a visité les caves en question et pour plusieurs raisons que nous détaillerons dans un article ultérieur, il ne comprend pas comment on n'a pas pu déceler la cache. Enfin, nous versons comme pièce supplémentaire à cet aspect du dossier un nouvel extrait du rapport confidentiel du procureur général près la Cour de cassation, Jacques Velu. Celui-ci rappelle en effet que "lors de la perquisition du 13 décembre 1995 au domicile de Dutroux au 128 de l'avenue de Philippeville à Marcinelle (NDLR: c'est-à-dire là où Julie et Mélissa étaient détenues), deux enquêteurs entendirent des voix d'enfants alors qu'ils étaient dans une des deux caves. Les recherches faites à l'intérieur de la maison pour localiser ces voix ne donnèrent pas de résultat. A l'extérieur, il y avait des enfants qui jouaient. Les enquêteurs pensèrent qu'ils avaient entendu les voix de ces enfants amplifiées par la disposition des lieux". Et apparemment, cela ne les a vraiment guère troublés puisque le rapport Velu révèle que "M. le Procureur du Roi Marchandise et Mme le Substitut Troch (NDLR: qui avait pourtant fait les démarches avec la gendarmerie auprès du juge Lorent pour obtenir les mandats de perquisition) n'apprirent ce détail (sic) que récemment par la presse". Pourquoi ce mensonge par omission?

5ème mensonge : autour de l'éventuelle destruction de pièces du dossier Othello

Le député Ecolo Vincent Decroly a allumé une fameuse mèche dans l'affaire de "la destruction de documents par le BCR" lorsqu'il s'est exprimé à ce sujet à l'émission Mise au point de la RTBF, le dimanche 27 octobre. Pour rappel, Vincent Decroly y affirmait - à l'instar de nos propres révélations (voir les n°3688 et 3689) - que le BCR s'était livré à une destruction ou à une ventilation de toute une série d'informations "gênantes" dont des pièces du dossier "Othello" avec, entre autres choses, un rapport d'observation du Posa Peloton d'observation, de surveillance et d'arrestation) sur Dutroux. Le député a encore eu l'occasion de s'exprimer à cet égard, le lendemain après-midi, lundi 28 octobre, devant la commission d'enquête parlementaire, ce qui a eu pour conséquence de donner une suite judiciaire à l'affaire (outre la plainte contre X déposée par la gendarmerie suite à la parution de notre article): à savoir la désignation, le même jour, d'un juge d'instruction, le conseiller Marique, via le premier président de la Cour d’appel.

D'autre part, le journal « Vers l'avenir » publiait deux articles sur les mésaventures survenues à un gendarme, Willy Holvoet, délégué syndical au SGSG qui avait eu maille à partir avec sa hiérarchie ainsi qu'avec une frange de son syndicat suite à une intervention qu'il avait effectuée lors d'une conférence à l'ULB, le 3 octobre. En effet, il avait notamment critiqué la répartition des tâches entre les différents services de police.

Cette conférence aurait été filmée par des gendarmes en civil. Le lendemain de la conférence... et de la parution de l'article de Télé-moustique, ce gendarme recevait un ordre de mutation qui l'expédiait du BCR vers la bibliothèque où on lui confiait la périlleuse tâche de dépoussiérer les livres et de mettre à jour un règlement...

Pour la gendarmerie, il ne s'agit pas vraiment d'une sanction puisque, dit-elle, cette "mutation", c'est l'intéressé lui-même qui l'avait réclamée.

Faux: si Holvoet a effectivement demandé sa mutation (suite à une proposition de sa hiérarchie), il la demandait vers la cellule "disparition". Et non en dehors du BCR où désormais il ne pourra plus mettre un pied. L'intéressé est donc suspecté par sa hiérarchie, après dénonciation interne, d'être la source de Télé-moustique - ce que nous ne confirmons pas.

En ce qui concerne notre informateur, nous lui maintenons notre confiance pour des raisons très précises connues de la rédaction.

Et nous relevons que la sénatrice Joëlle Milquet (PSC) a fait de récentes déclarations dans lesquelles elle affirmait que trois gendarmes lui avaient fait, dès fin septembre, des déclarations allant dans le même sens! Alors, où se trouve le mensonge dans cette affaire-là?

Dossier de Michel Bouffioux, Alain Goossens et Frédéric Moser

LES CINQ MENSONGES DE L’AFFAIRE DUTROUX(Télé Moustique du mercredi 6 novembre 1996 page 26 ; 27 28 et 29)


LES CINQ MENSONGES DE L’AFFAIRE DUTROUX

Télé Moustique du mercredi 6 novembre 1996 page 26 ; 27 28 et 29

Pages 26 et 27

Les documents que nous publions cette semaine sont d'une importance capitale pour comprendre les dysfonctionnements de l'enquête Dutroux. Ils démontrent que dès août 1995, la gendarmerie avait décidé de travailler sur l'enquête Julie et Mélissa en dehors du dossier d'instruction de liège. Une décision que la gendarmerie n'a pas avouée à ce jour et que l'on peut juger très critiquable dans la mesure ou ce choix privait les enquêteurs des moyens indispensables à la libération des victimes de Marc Dutroux.

C'est l'un des mensonges de l'affaire Dutroux, nous en évoquons également quatre autres dans ce dossier.

Par souci de clarté, le rappel de quelques dates-clés.

24 juin 1995: enlèvement de Julie et Mélissa à Grâce-Hollogne.

25 juin 1995: Claude Thirault, I homme qui avait déjà informe la gendarmerie de Charleroi en octobre 1993, sur l'aménagement de caches par Dutroux « pour y loger des enfants en attente d'être expédiés vers l'étranger » se manifeste à nouveau parce qu'il voit un rapprochement possible avec l'enlèvement de Julie et Mélissa.

Cette version est en tout cas celle de Thirault lui-même, car si on s'en réfère aux rapports produits par la gendarmerie, ce témoignage est recueilli au début du mois d'août.

7 juillet 1995: un fax de la gendarmerie de Charleroi vers Grâce-Hollogne témoigne du fait que les pandores ont fait le rapprochement entre l'enlèvement de Julie et Mélissa et un suspect potentiel: Marc Dutroux.

17, 27, 28 juillet 1995: différents actes d'enquête sont encore posés par la gendarmerie qui n avertit toujours pas Martine Doutrewe, la juge d'instruction chargée du dossier à Liège, de soupçons pesant sur Dutroux.

4 août 1995: un fax de la gendarmerie de Charleroi témoigne de ce que Thirault a confirmé ses dires de 1993 en ajoutant notamment que Dutroux « lui avait proposé 150.000 francs par enfant enlevé ».

7 août 1995: l'adjudant Lesage, de la BSR de Seraing, faxe le message suivant à l'adjudant Van Rilaert du BCR de la gendarmerie à Bruxelles: « L'intéressé (NDLR: Marc Dutroux) et son épouse (Martin Michelle) sont connus pour viols, séquestration d'entants. Il serait intéressant de « monter » un dossier concernant les intéressés. »

8 août 1995: le BCR faxe aux BSR de Thuin, Seraing, Namur et Charleroi: « Dans le cadre de la disparition de Julie et Mélissa (DUTROUX) vous êtes invités à une réunion organisée le 9 août 1995 à 10 heures dans les locaux de la BSR de Charleroi. »

9 août 1995: la réunion de coordination du BCR a lieu à Charleroi. On peut lire à ce sujet dans le rapport confidentiel du procureur Velu que « cette réunion avait conduit à désigner Dutroux comme suspect potentiel dans le cadre d'enlèvements d'enfants »

1er mensonge : autour de la délocalisation de l'enquête Dutroux à Charleroi

Arrêtons provisoirement notre chronologie. En effet, cette date du 9 août 1995 apparaît aujourd'hui comme le tournant de l'enquête. Il y a alors moins de deux mois que Julie et Mélissa ont disparu. En travaillant dans son coin, la gendarmerie a déterminé que Dutroux est un suspect crédible et par conséquent, il est tout à fait envisageable que les petites soient détenues dans l'une des maisons du monstre. La réaction logique serait donc d'en avertir au plus vite le juge d'instruction chargé du dossier "Julie et Mélissa" à Liège, à savoir Mme Doutrewe. De dresser un procès-verbal et demander un mandat de perquisition pour aller voir ce qui se passe vraiment dans les maisons de Dutroux. Mais ce n'est pas ce qui se passe, malgré le tait qu'un second informateur de la gendarmerie de Charleroi confirme, dès le 10 août 1995, les dires de Claude Thirault.

Que se passe-t-il en Fait?

On lit ceci dans le P.-V. n'101471/96 rédigé le 23 août dernier par l'adjIudant Gillot de la brigade de Grâce-Hollogne et par l'adjudant Lesage de la BSR de Seraing:

« A une date ignorée mais que nous situons après le 09/08/95, soit après (... la réunion organisée à notre demande par le BCR à Charleroi, nous avons fait part verbalement à Mme le Juge d'instruction Doutrewe qu'une enquête était menée par nos collègues de Charleroi. Nous lui avons cité le nom de Dutroux. Nous lui avons précisé que nous maintenions un contact avec nos collègues de Charleroi afin de vérifier s'il n'existait pas de lien entre ce suspect et la disparition de Julie et Mélissa. Ces renseignements ont été communiqués au magistrat en présence du commissaire Lamoque de la Police Judiciaire de Liège. Madame Doutrewe nous a demandé de la tenir informée de l'évolution du contrôle de ce suspect. Elle ne nous a demandé aucun écrit pour confirmer l'existence de cette information. »

Dans le rapport du Comité P, l'organe de contrôle des services de police, concernant l'enquête sur l'enquête, on peut lire le compte-rendu de la gendarmerie d'une conversation téléphonique, datant du 17 août 1995, de l'adjudant Lesage avec un de ses collègues du BCR, l'adjudant Van Rilaert:

« Hier, a eu lieu une réunion avec Mme Doutrewe, Lesage et Gilot. (...) Doutrewe n'est pas chaude à l'idée que l'enquête sur Dutroux soit diligentée depuis Liège. »

A cela, il convient évidemment de confronter la déclaration de la juge d'instruction Doutrewe:

« C est fin août 1995, au cours d'une réunion, que l'adjudant Lesage de la BSR de Seraing, dans la série d'informations portées à notre connaissance nous a informé de ce qu'il avait un suspect en matière dé moeurs, un dénommé Dutroux de Charleroi, qui selon une information faisait des travaux dans ses caves pour abriter des jeunes filles. Il nous a précisé que cette enquête était en cours à la gendarmerie de Charleroi. M. Lesage n'était pas particulièrement insistant sur cette information. »

Que déduire de tout cela? Une première lecture de ces informations contradictoires peut se limiter au constat que la gendarmerie informe bien la luge d'instruction Doutrewe des soupçons pesant sur Dutroux dans le courant du mois d'août 1995. Tout le monde est d'ailleurs d'accord la-dessus.

En quels termes? Comme un suspect parmi d'outres ou comme un suspect très intéressant?

Les protagonistes ne sont plus d'accord et seuls ceux qui étaient dans le bureau de la juge d'instruction connaissent vraiment la réponse à cette question. Toujours est-il qu'il ressort de but cela que la juge liégoise ne se préoccupe pas de la piste Dutroux et que ce serait cela qui conduit finalement les gendarmes à s'adresser le 25 août au parquet de Charleroi pour continuer leur enquête par le biais d'une "mise sous observation", la fameuse opération Othello.

Mais s'agit-il vraiment de la bonne lecture ? On peut en douter à la découverte d'un autre document en notre possession. II s'agit d'un rapport interne et confidentiel de la gendarmerie rédigé le 16 août 1995 par le capitaine Bal de la brigade de Charleroi. Le libellé de ce rapport est explicite.

On y lit en effet: « OBJET : Disparition de Julie et Mélissa ». Le rédacteur du texte précis qu'il est écrit en référence à la réunion organisée le 9 août par le BCR à Charleroi. Et pourtant, un peu plus loin, au point 3, on lit cette phrase pour le moins étonnante: Hypothèse retenue: Nous maintenons l'hypothèse retenue lors de la réunion en Ref (NDLR: Ref, comme référence), à savoir sous le motif de vols, obtenir des mandats de perquisition afin de s'assurer du passage ou de la présence d'enfants dons une des demeures de Dutroux".

Traduction: dès le 9 août 1995, lors de leur réunion interne organisée par le BCR, avant même d'évoquer « verbalement » les informations sur Dutroux a Martine Doutrewe,

…..Suite pages 28 et 29

Deux heures dans la cave de Marcinelle (Le Soir du mercredi 6 novembre 1996)


Deux heures dans la cave de Marcinelle

« Le Soir » du mercredi 6 novembre 1996

La commission d'enquête parlementaire a jaugé la prison de Julie,Mélissa, Sabine et Laetitia.

Les membres de la commission parlementaire Dutroux sont arrivés hier matin, peu avant 11 heures, avenue de Philippeville, à Marcinelle, dans la maison où Marc Dutroux avait séquestré Sabine et Laetitia, qui ont pu être libérées, ainsi que Julie et Mélissa.

Les parlementaires voulaient en effet se rendre contre de la configuration des lieux. Encadrés par un service d'ordre peu ordinaire, les députés sont descendus dans les caves de la maison maudite, accompagnés des parents de Julie Lejeune, d'experts de la P.J. de Charleroi ainsi que d'une juge d'instruction de Huy, Henriette Hollart, dépêchée par le parquet général de Liège.

L'examen de la cave a été long: les parlementaires, ainsi que les parents de Julie, y sont restés plus de deux heures avant d'émerger, visiblement émus. Jean-Denis Lejeune avait déjà examiné l'endroit.

Cette seconde visite n'a fait que le conforter dans ses certitudes. Quand on descend dans la cave, on s'aperçoit vite de ce que les volumes ne sont pas les mêmes qu'au rez-de-chaussée, la cave est en « L », plus petite, les surfaces ne présentent pas partout le même plafonnage et, du réduit à la cave proprement dite, on entend parfaitement ce qui se passe. Enfin, les résonances lorsqu'on sonde et qu'on frappe sur les murs ne sont pas les mêmes.

Tous ces éléments confortent Jean-Denis Lejeune dans l'opinion qu'il avait que de graves erreurs ont été commises. Le père de Julie s'est dit effarer. Il veut maintenant rencontrer les gendarmes qui ont mené les perquisitions.

Plusieurs perquisitions avaient en effet amené les gendarmes à l'avenue de Philippeville : dans le cadre de l'opération Othello, les 13 et 19 décembre 1995, des enquêteurs, prétextant une enquête sur divers vols, avaient visité la cave.

Le 13 août 1996, les enquêteurs, conduits par le procureur Bourlet et cette fois officiellement à la recherche de

jeunes victimes, avaient également fait chou blanc. On se souviendra de ce que c'est Marc Dutroux qui livrera, le 15 août, le secret de la cave de Marcinelle.

Claude Eerdekens, membre PS de la commission parlementaire, partage entièrement les certitudes de Jean-Denis Lejeune.

Les propos du député PS sont explosifs.

Cette visite fut extrêmement pénible, on est effrayé par l'exiguité de ce réduit, Marc Dutroux était vraiment un monstre. Claude Eerdekens tient ensuite des propos très durs à l'égard des enquêteurs.

Je suis effaré. Je pressentais avant de venir qu'on aurait pu sauver les fillettes, d'en suis maintenant persuadé. Quand on sait qu'on cherche des caches, et c'est clair dans l'opération Othello, on frappe dans les

murs: il aurait suffi de quelques coups de marteau pour se rendre compte que les résonances n'étaient pas les mêmes partout et qu'il y avait donc une cache.

Je pense qu'on aurait pu sauver les fillettes, que la gendarmerie n'a pas bien fait son travail. On dit entendre les gendarmes qui ont mené les perquisitions.

Si Claude Eerdekens est catégorique, on entendra moins les autres membres de la commission. Et pour beaucoup d'enquêteurs qui n'ont pas participé aux perquisitions, par contre, les dés sont aujourd'hui pipés. Ces policiers-là ne sont pas sûrs, en tous cas, qu'ils auraient mieux fait que leurs collègues...

FRANCO MEGETTO

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Des cris ? Ce sont ceux de mon enfant !

« Le Soir » du mercredi 6 novembre 1996

Parmi les nombreux badauds massés près de la maison de l'avenue de Philippeville, hier matin, il y avait Julien. Il a 16 ans, il habite Montignies sur-Sambre, et il a bien connu Marc Dutroux. Il avait 14 ans quand il a fait sa connaissance à la Docherie. Dutroux effectuait des travaux de transformation dans sa maison de la rue Jules Destrée.

Nous habitions alors cette rue, et Dutroux m'a demandé à plusieurs reprises de l'aider, notamment à transporter des linteaux. C'était un voisin sans problèmes, et je l'ai aidé, explique Julien.

Le comportement du pervers pédophile ne lui a jamais paru suspect. C'était un homme comme les autres.

Il n'attirait pas l'attention sur lui. 11 était discret, renfermé et ne riait jamais. Il était souvent seul, buvant sa bière, isolé dans son coin pendant le temps de midi, dit iI . Julien précise qu'à l'époque Dutroux suivait des cours du soir en menuiserie à l'université du Travail (UT) à Charleroi. Julien s'est dit très surpris quand il a appris les crimes odieux de Dutroux.

Je trouve cela monstrueux. Je n'aurais jamais cru ça de lui, rien dans son comportement ne le laissait supposer.

Julien ne comprend pas non plus, comme beaucoup d'autres, comment le voisinage n'a pas eu son attention attirée par les agissements de Dutroux avenue de Philippeville.

D'après lui, un professeur de l'UT s'est un jour rendu dans cette maison de la rue de Philippeville dans le cadre d'un travail scolaire que Dutroux devait réaliser.

En buvant une tasse de café, il a entendu des hurlements. Il s'en est inquiété. Dutroux a simplement expliqué que c'étaient les cris de son enfant que sa femme essayait de mettre au lit.

Julien rapporte que Dutroux aurait demandé des conseils architecturaux à ce professeur de technique parce qu'il devait entreprendre des travaux pour relier un souterrain à son garage. (Belga.)

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Démolir les maisons de Dutroux est improbable

« Le Soir » du mercredi 6 novembre 1996

Domicilié avec son fils aîné à Marcinelle, Marc Dutroux possède plusieurs maisons en Belgique. Dans l'attente de la peine qui frappera leur propriétaire, ces immeubles ont été placés sous scellés. Ils le resteront sans doute jusqu'à la fin du procès.

Deux de ces propriétés suscitent un émoi particulier: Sars-la Buissière, où Julie Lejeune et Métissa Russo ont été retrouvées mortes, et Jumet où avaient été enterrées An Marchal et Eefje Lambrecks.

En Grande-Bretagne, la «maison de l'horreur» des époux West vient d'être rasée. Chez nous, une procédure soutenue par la population locale vise à obtenir la démolition du chalet de Jumet et le bourgmestre de Lobbes,

André Levacq, souhaite faire disparaître la maison de la rue de Rubignies, à Sars-la-Buissière, malgré les obstacles juridiques.

Cette maison a été fouillée, trouée, défoncée. Elle ne vaut plus rien. Et je crains des débordements si de nouveaux occupants s’y installent. L a population a été traumatisée. Depuis le 17 août, tous les jours, par tous les temps, des gens, dont les parents Lejeune, viennent y déposer des fleurs et s y recueillir.

Régulièrement, j'enlève les fleurs fanées. Il faut mettre le site à net.

Proche de la place Communale, l'ensemble d'un hectare comprend deux maisons et deux granges où, selon le maïeur, Dutroux avait commencé à aménager des caches.

Depuis 1992, il est la propriété du couple Dutroux-Martin mais seule Michelle Martin y est domiciliée, avec sa mère et ses deux plus jeunes enfants. Dutroux y avait entrepris des travaux et y passait des vacances.

La maison à front de rue est un taudis inhabité depuis longtemps. André Levacq compte prendre un arrêté de démolition, pour des raisons de sécurité, dès qu'il aura obtenu le feu vert de Neufchâteau.

Je veux éviter les squatters, estime le bourgmestre. Il serait malsain que quelqu'un vienne habiter là.

Mais Neufchâteau mènera peut-être de nouveaux devoirs d'enquête dans cette maison.

Une démolition dès lors bien incertaine...

C'est dans le jardin de cette habitation que Julie et Mélissa avaient été enterrées. Le terrain a été retourné sur quatre mètres de profondeur, de fond en comble.

J'ignore totalement ce que ce terrain va devenir, conclut André Levacq. Le garagiste d'à côté, qui l'avait raté de peu quand Dutroux a racheté le bien, sera peut-être intéressé. Il faudrait toutefois éviter d y entre poser des voitures. Et, en tous cas, l'endroit précis où les petites ont été retrouvées doit devenir sacré.

Une stèle à la mémoire de Julie et Mélissa sera élevée aux abords de la maison de Sars-la Buissière. Mais pas trop près de l'habitation, selon le voeu des parents.

Les multiples biens de Marc Dutroux feront l'objet de saisie de la part de ses nombreux créanciers: le ministère de la Justice (amendes et frais de justice), la Sécurité sociale (probables remboursements d'indemnités d'invalidité indûment perçues) et les familles des victimes (indemnités).

Selon toute vraisemblance, seuls les immeubles décrétés insalubres par le bourgmestre de la localité pourront donc être démolis.

MICHELLE LAMENSCH

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On recherche Élisabeth Brichet à Ténériffe

« Le Soir » du mercredi 6 novembre 1996

Le juge d'instruction Guy Coméliau, de Namur, est à Ténériffe depuis dimanche. Il est accompagné de Jean-Pierre Tinant, de la BSR, et d'Annick Jadoul, commissaire à la P.J. Ils vérifient de nouvelles informations dans le dossier d'Élisabeth Brichet.

Les enquêteurs namurois ont pu, cette fois, réagir très rapidement à des informations qui leur ont été transmises par les autorités canariennes.

Une jeune femme blonde, dont l'âge et le physique pourraient correspondre a ceux d'Élisabeth Brichet et qui se fait appeler Eli, a été vue en train de se prostituer dans une galerie commerciale de Ténériffe. Elle est aidée par un individu, connu des services de police locaux, d'origine marocaine ou libanaise. Cet homme serait en séjour illégal en Espagne. Il a été interpellé et a fait l'objet d'une arrestation administrative. Les enquêteurs belges se devaient donc d'intervenir immédiatement. Ils cherchent à retrouver cette jeune femme.

Marie-Noëlle Bouzet, la maman d'Élisabeth, se trouve également à Ténériffe. Elle est sans doute la seule à pouvoir reconnaître sa fille avec certitude. Et si ce n'était pas le cas, elle devrait au moins permettre aux enquêteurs d'affiner les investigations.

Francis Brichet, le papa d'Élisabeth, expliquait, mardi après-midi, qu'une fois de plus les enquêteurs ne l'avaient averti de rien du tout et que, depuis la disparition de sa fille, ce sont les journalistes qui l'informent de

l'évolution du dossier. Il avait dénoncé cette situation en témoignant devant la commission parlementaire d'enquête. Mais cela n'y a apparemment rien changé.

Ce nouvel espoir de retrouver Élisabeth Brichet, qui devrait aujourd'hui avoir 19 ans, est né de trois témoignages concordants de Canariens qui ne se connaissent pas.

Ce n'est pas la première fois qu'une commission rogatoire namuroise se rend aux Canaries. On se souviendra notamment de ce qu'une hôtesse de l'air affirmait avoir reconnu Élisabeth, deux jours après sa disparition, sur un vol charter à destination de ces îles.

Par la suite, un détenu qui avait séjourné dans les milieux canariens de la prostitution y avait emmené, en vain, les enquêteurs. La maman d'Élisabeth qui, depuis sept ans, affirme que c'est dans le monde de la prostitution qu'il faut chercher, s'y était également rendue en compagnie de M. Rogge, détective privé.

Ces précédentes investigations n'avaient apporté aucune certitude, confirmant ou infirmant la présence d'Élisabeth là-bas. Le retour de M. Coméliau est prévu pour mardi prochain.

SABINE DORVAL

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