vendredi 16 octobre 2009

Année noire et Marche Blanche( « LE SOIR » samedi 28 décembre 1996 )


L'année 1996

Année noire et Marche Blanche

« LE SOIR » du samedi 28 décembre 1996

Trois cent mille personnes ont défilé en blanc pour se solidariser avec la peine et le courage, mais aussi pour exorciser une faute collective qui a permis l’existence de Dutroux et de sa bande

Suite de « QUI A TRUQUÉ LE DOSSIER DI RUPO ? »( « Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996 pgs 34 et 49)


Suite de « QUI A TRUQUÉ LE DOSSIER DI RUPO ? »

« Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996

Pages 34 :

……l'existence du dossier traité par Deleyn. Marnette fonce chez ce dernier et chez le patron de la PJ de Vroom pour le récupérer.

L'excitation est à son comble. Georges Marnette de noter dans son rapport en date du 2 octobre:

"L'agent de contact doit insister pour retrouver le plus vite possible la trace de Trusgnach via son informateur »

- Le 10 octobre, l'informateur, Karim Hammani donc, donne de nouvelles informations concernant des cassettes vidéo pédophiliques. Avec l'accord du commissaire en chef de la PJ de Bruxelles, on établit donc un procès-verbal initial à charge de X.

« Monsieur le procureur du Roi de Bruxelles entérine cette proposition et le but sera d'obtenir un mandat de perquisition à l'adresse ».

La fin du mois d'octobre sera particulièrement agitée. Le 20, en effet, Oliver Trusgnach revient en Belgique et se rend à la gendarmerie dans le Limbourg le lendemain 21 octobre. Marnette l'apprend immédiatement par le biais de Karim Hammani qui, lui même, le tient de Roger Souvereyns.

« Nos informations faisaient aussi état de ce que l'intéressé (ndlr: Trusgnach) avait fait une déclaration importante à ce sujet » (ndlr: les cassettes pédophiles et Elio Di Rupo).

Que s'est-il exactement passé ces 21 et 22 octobre? On ne le sait pas encore avec précision.

OCTOBRE ROSE

Mais la journée du 22 commence très fort. Grâce à une fuite, le procureur du Roi de Bruxelles est mis en difficulté. Le procès-verbal du 15 septembre, selon lequel Benoît Dejemeppe serait intervenu en faveur d'Anne Bouty dans le dossier Nihoul-Dutroux devient public.

A Hasselt,la Gendarmerie interroge pour la première fois Trusgnach qui parle en long et en large de

Jean-Pierre Grafé mais qui ne mentionne qu'une seule rencontre avec Elio Di Rupo dans un club de Bruxelles dans le courant de l'été 1994. Trusgnach avait alors 20 ans.

« Il ne s'agissait pas à proprement parler d'actes sexuels mais plutôt de baisers, d'attouchements ».

Mais Marnette veut à tout prix « rentrer » dans le dossier de Hasselt. En début d'après-midi, il téléphone au substitut qui a ce dossier en charge dans le Limbourg. Elle relate ce coup de fil de Marnette.

Selon ce dernier, manifestement bien au courant, Trusgnach "aurait fait ce jour une déclaration qui pourrait être importante dans une enquête en cours à Bruxelles. Il y aurait depuis le 6 septembre à Bruxelles un dossier fermé relatif à des pratiques de pédophilie mettant en cause le ministre Di Rupo. Depuis hier, 21 octobre 1996, le dossier a été rouvert et selon les informations obtenues, des cassettes accablantes pourraient encore être retrouvées".

« DIFFICULTÉS ADMINISTRATIVES »

Aussitôt son coup de fil terminé, Georges Marnette se met à la rédaction d'un nouveau rapport. Il y explique qu'un informateur encodé (Hammani) lui a appris qu'un certain V. est en possession de cassettes à caractère pédophilique. Le même informateur dit que Trusgnach pourrait fournir des renseignements.

Et Marnette de conclure: « Demandons à Monsieur le Procureur du Roi de Bruxelles l'autorisation de nous rendre à Hasselt afin d'y entendre l'intéressé ». Le 23 octobre, il part donc à Hasselt en compagnie de

Grégory Antipine et d'un péjiste flamand, Struys. Mais « les difficultés administratives rencontrées ne nous ont pas permis de procéder à cette date à une audition sereine susceptible de nous faire progresser. Après avoir rencontré le détenu Trusgnach dans un des parloirs de la prison de la ville, nous avons convenu avec lui que son audition détaillée serait actée le lendemain ».

Le lendemain, 23 octobre, Antipine et Struys rencontrent effectivement Trusgnach qui commence à charger Di Rupo. A la fin du mois, devant la Gendarmerie cette fois, Trusgnach se lance alors dans un véritable délire, nuancé cependant par la fin de son interrogatoire: « Je n'y ai moi même pas assisté mais il m'a été rapporté (...) Cela m'a été rapporté par des membres de la police judiciaire. Ils semblent manifestement…..

Page 49 :

…… intéressés surtout, dans leur enquête, par Di Rupo en raison de sa position actuelle ».

Mais à Bruxelles, les choses tournent mal pour Georges Marnette. Quelles ont été les « difficultés administratives rencontrées »? Difficile d'obtenir une réponse précise. Absence d'apostille lorsqu'il se rend à Hasselt, apostille biaisée,...? Toujours est il que Georges Marnette doit se justifier dans un rapport.

Son patron Christian de Vroom, dans deux rapports adressés au magistrat national André Vandoren et au procureur général près la cour de Cassation Éliane Liekendael, lâche son subordonné: « Ce rapport me semble tardif mais a, selon M. Marnette, été couvert par Monsieur le procureur du Roi de Bruxelles ».

Ou encore « A la demande du commissaire principal de première classe Marnette s'occupant, selon ses dires,

«d'une affaire délicate » sans autre précision, cette enquête (ndlr: sur le vol) lui a été abandonnée».

AU REVOIR

Fin octobre, Georges Marnette claque la porte et fait savoir par voie de presse qu'il part en vacances pour un mois. Il reviendra ventre à terre lorsque le dossier explosera à la mi-novembre.

Car, début novembre, certains journalistes sont mis en possession de larges extraits de documents du dossier de la PJ provenant d'une part des rapports de l' informateur « encodé » du début septembre 1996 et de l'interrogatoire de Trusgnach par l'inspecteur Grégory Antipine du 24 octobre.

Mis sous pression par la presse, l'appareil judiciaire bruxellois est contraint de perquisitionner dans l'urgence dans le volet cassettes pédophiliques du dossier monté par le commissaire Marnette.

Au cours d'une réunion fort tendue, il est décidé de transmettre ce dossier à la 3ème SRC qui travaille pour le compte de Neufchâteau sur les dossiers de pédophilie et de se passer de l'aide de Georges Marnette. On sait par ailleurs ce qu'il est advenu du dossier Trusgnach. Interrogé le 28 novembre dernier par le conseiller de la cour de Cassation Francis Fischer, Oliver

Trusgnach a déclaré: « Après ma première déclaration, la police judiciaire est venue m'entendre en prison. Les enquêteurs m'ont dit que si je les aidais, ils pouvaient arranger quelque chose avec le juge à Hasselt.

Le lendemain (...) ces enquêteurs m'ont laissé entendre que j'aurais pu avoir été plus jeune lors des faits que ce que j'avais déclaré au procès-verbal initial rédigé par la Gendarmerie (... ) M Antipine (...) m'a dit, en outre, après avoir recueilli ma déclaration: En réalité, nous savons que vous étiez plus jeune au moment des faits, mais pourquoi ne l'avez-vous pas déclaré ? Il a en outre émis l'opinion que les faits que je lui ai déclarés n'étaient pas punissables ».

DES MÉTHODES DE COW-BOY

Immédiatement, le conseiller Fischer a voulu vérifier cette déclaration. Le lendemain, il recevait la réponse de l'inspecteur Grégory Antipine: « II n'était pas question d'arranger quelque chose avec le juge d'Hasselt mais, dans la mesure du possible, d'éviter une détention préventive trop longue afin qu'il puisse nous apporter son témoignage en toute quiétude en ce qui concerne les faits qui nous occupent. Qu'il est exact qu'à l'issue de la déclaration de M. Trusgnach, je lui ai fait part qu'il m'avait été rapporté qu'il avait entretenu des relations sexuelles avec M. Di Rupo alors qu'il était âgé de quatorze ans ».

Les deux enquêtes actuellement en cours sur les fuites et sur les méthodes de cow-boy du commissaire Marnette et de l'inspecteur Antipine devront déterminer ce qui a motivé les actes étranges de celui qui se considère comme le meilleur flic de Belgique depuis la disparition de Frans Reyniers.

Philippe Brewaeys.

QUI A TRUQUÉ LE DOSSIER DI RUPO ?(« Le soir illustré »mercredi 25 décembre 1996 pgs 32-33-34et49)


QUI A TRUQUÉ LE DOSSIER DI RUPO ?

« Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996 pages 32 - 33 - 34 et 49

Pages 32 et 33 :

Le commissaire Georges Marnette, patron du Groupe de Répression du banditisme de la Pj de Bruxelles, est au centre de deux enquêtes tournant autour du dossier Di Rupo. La première, menée par le Comité Supérieur de Contrôle pour le compte du juge d'instruction Laffineur, concerne les fuites qui ont eu lieu en direction de la presse avant le 15 novembre. La seconde porte sur le trucage du dossier Di Rupo. Elle est entre les mains du Comité P.

Les instructions du commissaire général de la PJ Christian de Vroom avaient pourtant été claires dès la fin août dernier: tous les éléments concernant les dossiers de pédophilie devaient être centralisés au sein de la PJ dans la cellule qui assure la liaison avec les enquêtes de Neufchâteau.

Mais le commissaire Marnette, qui se présente volontiers comme le meilleur flic du pays en matière de moeurs, ne l'a manifestement pas entendu de cette oreille.

CAVALIER SEUL

En effet, le 6 septembre, un de ses hommes, l'inspecteur Grégory Antipine va au contact avec un informateur occasionnel « tenu » par la PJ de Bruxelles depuis qu'il s' est fait arrêter à l'hôtel Hilton un an auparavant pendant le procès du GIA. Il avait demandé une chambre avec vue sur le palais de Justice. Comme il est d'origine nord-africaine, la Brigade Nationale de la PJ, craignant un attentat terroriste, lui avait sauté dessus.

En ce début septembre 1996, dans la foulée de l'affaire Dutroux-Nihoul, les services de police ratissaient large. Et l'informateur de citer le nom d'un homosexuel qui se livrerait à un trafic de cassettes pornographiques, sado-masochistes et pédophiliques. Mais l'homme ayant déjà été entendu dans le cadre du dossier Dutroux, le dossier ouvert est aussitôt refermé.

Quatre jours plus tard, un nouveau rapport de contact est rédigé par l'inspecteur Antipine. L'intérêt est tel pour le commissaire Marnette que l'informateur passe du statut d'occasionnel à celui d'encodé.

INFORMATEUR 224664

Karim Hammani, c'est son nom, devient ainsi l'informateur 224664 de la PJ de Bruxelles. Il fournit les noms d'Elio Di Rupo, de Jean-Pierre Grafé et déjà, d' Oliver Trusgnach. Mais le rapport d' Antipine mentionne une mauvaise date de naissance de Trusgnach qui ne naît plus en 1974 mais en 1979 ! Un rajeunissement de cinq ans qui posera problème plus tard, question majorité. Trusgnach est présenté comme l'ancien amant de Di Rupo, susceptible de travailler avec la police.

Pour Georges Marnette, c'est l'effervescence. Dans un rapport de synthèse qu'il établira le 27 octobre, il signale, concernant les suites données à ce contact du 10 septembre: « De par sa nature et les noms qui y sont mentionnés (... ) nous le faisons reprendre sous le sceau « secret ». Après en avoir référé au dirigeant de brigade, il est convenu avec celui-ci d'avoir un entretien avec le procureur du Roi en personne (ndlr: Benoît

Dejemeppe), qui (...) oeuvrera dès lors comme magistrat de confiance. Ce dossier sera géré à la PJ de Bruxelles et les informations ne seront transmises à Neufchâteau que s'il y a un lien direct.

Et le rapport de Marnette de poursuivre: « Il nous est demandé d'oeuvrer avec la plus extrême prudence, d'éviter les amalgames, de chercher à établir les faits infractionnels et de se montrer attentifs à la discrétion ». Avec trois mois de recul, on croit rêver.

PREMIER COUAC

Cette réunion du 10 septembre s'est-elle déroulée selon les vœux du commissaire Marnette? On n'en sait toujours rien. Mais à la même période, lors d'une autre réunion, le procureur du Roi Benoît Dejemeppe demande aux hommes de la PJ de bétonner….

Page 33

…. leur dossier concernant l'inculpation d'Anne Bouty dans le dossier enlèvement d'enfants ouvert à charge de Dutroux et de Nihoul.

Après quoi, c'est le commissaire Marnette en personne qui serait allé trouver un inspecteur de la 23ème brigade en sous-entendant que le procureur du Roi de Bruxelles faisait pression pour qu'on ne « charge » pas Anne Bouty. Le 15 septembre, l'inspecteur de la Brigade Nationale rédige un rapport à ce sujet et le transmet à Neufchâteau. On en reparlera plus tard, à un moment crucial dans l'enquête Di Rupo.

Mais en ce mois de septembre, Karim Hammani turbine ferme pour tenter de repérer Trusgnach. Il prend ainsi contact avec plusieurs membres du milieu gay de Bruxelles. Il affirme être impliqué dans une affaire de vol de cartes de crédit en lieu et place de Trusgnach. Un de ses amis à la police pourrait lui arranger l'affaire s'il parvenait à mettre la main sur Trusgnach. L'ami, c'est vraisemblablement l'inspecteur Antipine. Celui-ci n'hésite pas à mettre la main à la pâte. Le 16 septembre, en compagnie de son informateur Hammani, il se rend dans une soirée homo où, pour la première fois, on parle d'un lien entre Trusgnach et un restaurateur anversois non encore identifié par la PJ.

Hammani, pour sa part, semble avoir compris qui est ce restaurateur. Il va en effet trouver Roger Souvereyns, le patron du Scholteshof de Hasselt, un des meilleurs restaurants de Belgique.

Il arrive chez ce dernier avec une liste des personnes qui, comme Souvereyns, ont été volées par Trusgnach. C'est ici que les choses s'emmêlent pour la PJ.

DOSSIERS EN PARALLÈLE

Car au début du mois de septembre, deux industriels anversois ont amené un de leurs amis, le commissaire général de la PJ Christian de Vroom, au Scholteshof pour un dîner. Roger Souvereyns lui explique que, début juillet, un certain Oliver Trusgnach lui a volé des objets de valeur pour quelque cinq millions de francs, l'affaire étant traitée par la Gendarmerie de Hasselt. Trusgnach s'étant réfugié à Londres, et le traité d'extradition avec la Grande-Bretagne étant muet sur les vols domestiques, les enquêteurs ne peuvent pas agir.

Christian de Vroom promet son aide au restaurateur et confie le dossier à Roger Deleyn, l'homme qui, à la Brigade Nationale de la PJ, entretient de bons contacts avec les services britanniques.

Au sein de la PJ, deux « branches» travaillent donc sur Trusgnach, l'une pour un vol, l'autre pour des problèmes de pédophilie.

Lorsque Roger Souvereyns voit arriver Karim Hammani avec des renseignements sur d'autres vols commis par Trusgnach, il l'embarque et le conduit à Bruxelles dans le bureau de Roger Deleyn.

C'est ainsi, via Hammani, que l'inspecteur Antipine et le commissaire Marnette sont mis au courant des détails concernant le vol chez Souvereyns et qu'ils apprennent «accidentellement» …..

Suite pages 34 et 49

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BARANYANKA ET CLÉMENT DE CLETY: DROIT DE RÉPONSE

« Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996 page 33

• Monsieur Philippe BREWAEYS, dans un article du Soir illustré du 6 novembre 1996, n'a pas hésité à nous catégorier comme "liés au Front National".

• Poursuivant sur cette voie, il a cru pouvoir affirmer que "des personnes partageant une même idéologie d'extrême droite utilisent des méthodes identiques, traîner dans la boue des magistrats et des enquêteurs honnêtes, compétents et travailleurs".

• C'est intolérable.

• Nous sommes effectivement les avocats d'un élu du F.N., qui est d'ailleurs un élu indépendant, non membre de ce parti. Ce client nous a choisi comme conseils, pour des raisons de crédibilité évidentes, précisément parce que nous n'avions aucun lien avec le F.N. dont nous ne partageons pas les idées.

• Sommes-nous alors également, si nous suivons votre raisonnement, intégristes musulmans parce que nous avons défendu un inculpé dans le procès du GIA, - belle cohérence intellectuelle -, et liés au "milieu" parce que nous avons défendu des voleurs?

• Et que sommes-nous lorsque nous défendons des réfugiés politiques de tout pays, de toute couleur et de toute obédience politique, philosophique ou religieuse?

• Et que sommes-nous encore en notre qualité de conseils de partis d'opposition persécutés, de certains pays du tiers monde, ou de l'association des veuves du génocide du Rwanda?

• Non, Monsieur BREEWAYS, nous ne sommes pas liés au Front National, nous ne partageons aucune idéologie, et une idéologie d'extrême droite moins que toute autre, et nous ne tolérerons jamais que vous affirmiez des choses de ce genre.

• Nous sommes seulement des avocats, épris de justice et de démocratie.

• Nous ne traînons pas davantage qui que ce soit dans la boue, comme vous le faites par ailleurs dans votre article.

• Nous soulevons des moyens de défense. Ne pas le faire est une faute professionnelle grave.

• Par ailleurs que penserez-vous si un jour vous êtes en procès avec votre voisin ou votre propriétaire, et que vous apprenez que la veille du procès votre voisin a dîné avec le juge?

• Et pourtant, ce ne sera qu'un contentieux locatif ou de voisinage, pas un dossier tragique comme celui de Neufchateau...

• Nous avons la faiblesse de penser que la dignité de notre profession implique que nous puissions défendre "n'importe qui", mais dignement, conformément à notre serment professionnel.

• C'est ce que nous estimons faire, et nous sommes de ce point de vue en paix avec notre conscience, mais également en parfait accord avec nos autorités disciplinaires.

• Le droit d'un inculpé à un avocat est un droit fondamental, il n'implique pas que l'avocat puisse plaider n'importe quoi.

• De même, la liberté de la presse est également un droit fondamental, il n'implique pas, Monsieur BREWAEYS, que vous puissiez écrire n'importe quoi, et certainement pas tenir des propos calomnieux.

• Pour cette raison, nous avons faix choix d'un conseil afin de vous assigner en responsabilité devant le tribunal de première instance.

V. BARANYANKA - F. CLEMENT de CLETY

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L'orthographe n'est pas celle de la rédaction. Liés au Front National, disions-nous. Les deux avocats sont les conseils non pas d'un mais d'au moins deux élus de ce parti d'extrême droite dans une procédure qui visait à les destituer de leur titre de conseiller communal à Molenbeek.

A cette période, le bourgmestre de Molenbeek, Philippe Moureaux, ancien ministre de la Justice, a constaté à plusieurs reprises que Me Baranyanka n'était pas seulement le conseil des deux élus tricheurs mais qu'elle affichait sa présence ait sein dit groupe des sympathisants du FN lors des conseils communaux alors qu'aucune procédure n 'y visait son client.

De même, au sein dit Front National, plusieurs personnes affirment que si Mes Baranyanka et Clément de Cléty sont devenus les avocats des élus néo-fascistes, c'est par l'entremise de Daniel Féret, le président dit parti.

Une très large majorité des avocats, qui interviennent dans la procédure Nihoul-Dutroux, n'ont pas suivi Mes Baranyanka et Clémént de Cléty dans leurs discours incendiaires et dans la procédure de dessaisissement du juge Connerotte.

Il est de notre droit le plus élémentaire de critiquer les méthodes de défense utilisées par certains avocats, dès lors qu'elles mettent en cause le fonctionnement des enquêtes.

Les droits de la défense ne signifient pas la possibilité de dire n'importe quoi.

Martine Doutrèwe : « On m’a caché ce qu’on savait sur Dutroux ! »(« Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996 pages 30 et 31)



Martine Doutrèwe : « On m’a caché ce qu’on savait sur Dutroux ! »

« Le soir illustré » du mercredi 25 décembre 1996 pages 30 et 31

L'enquête sur l'enquête a pris un tournant essentiel avec la longue intervention de Martine Doutrèwe. Elle a accusé la gendarmerie d'avoir voulu «jouer cavalier seul» et d'être ainsi à l'origine du drame. Séance tendue, riche en révélations et règlements de comptes, devant des parents et des commissaires abasourdis. Étonnant jeu de la vérité: qui ment ?

Quelles sont les causes du mauvais déroulement des recherches sur Julie et Mélissa ? Aurait-on pu éviter le drame? Et qui doit-on incriminer, de la gendarmerie, de la P.J., ou de la juge d'instruction chargée de l'affaire? A cette épineuse question, Martine Doutrèwe a apporté un argumentaire cinglant tout au long d'une journée qui restera dans les annales de la commission d'enquête. Critiquée de toutes parts, vilipendée par les parents, torpillée (c'est elle qui l'assure aujourd'hui) par la gendarmerie, suivie par le comité P qui s'intéressait à sa vie privée, la juge d'instruction a exposé, avec une détermination remarquable, un point de vue qui en dit long sur

les divisions de tous ceux qui, en principe, devaient unir leurs efforts pour retrouver les fillettes... vivantes !

D'entrée de jeu, Martine Doutrèwe a défini le cadre et les moyens d'action de l'enquête: s'échanger loyalement les infos, rédiger un P.V. sur tout élément important, ne pas en rédiger sur des vérifications mineures non significatives. Mais aussi s'intéresser aux «suspects moeurs» géographiquement proches. Julie et Mélissa disparaissent le 24 juin 1995. Le dossier arrive à l'instruction le 26 juin, un samedi après-midi. Martine Doutrèwe «lui accorde, dès le lundi, toute son importance». Et c'est vrai, qu'au vu de toutes les initiatives prises, on peut estimer que c'est le cas. Martine Doutrèwe rédige une centaine d'apostilles, 2100 P.V., voit régulièrement les inspecteurs, reçoit les parents.

Elle réfute les reproches d'instruction « passive et d'amateur ». Elle la diligente même, dit-elle, avec «une logique intellectuelle» ! Enquête de voisinage, sur les familles, les proches, les familiers, surveillance des lignes téléphoniques, des communications GSM, vérification du carnet intime de Mélissa, d'une cinquantaine de suspects moeurs, d'une foule de témoignages en Belgique et à l'étranger, appel aux services de radiesthésistes, deux survols en hélico de Grâce-Hollogne avec caméra infra-rouge

pouvant relever la présence de corps, contrôle de 2000 Peugeot 205 suite à un témoignage d'une vieille dame elle-même évaluée par un géro-psychiatre, contrôle des voitures flashées sur autoroute ou volées, des dépannages de Touring Secours, des fiches d'hôtel à Liège et Huy, surveillance trois samedis de suite des lieux de la disparition, battues, appels à témoins, auditions des deux mamans sous hypnose, vérifications bancaires des cartes de crédit et de paiement sur les restoroutes et dans les stations d'essence. La liste est longue et non exhaustive: on a ratissé de nombreuses pistes, la juge a ordonné de nombreux devoirs

d'enquête, cette démonstration appliquée se résumant finalement en une phrase: « On n'attendait pas, on allait au devant dans une réelle dynamique d'enquête ».

AUCUN P.V. SUR DUTROUX

Ayant enfin l'occasion de répondre à toutes les attaques, Martine Doutrèwe a ensuite concentré le tir sur la gendarmerie. Dire qu'elle s'est livrée à une attaque en règle serait en dessous de la vérité: elle a carrément mis « les pieds dans le dossier » en se disant écartée de l'enquête.

Après la fâcheuse impression laissée par l'adjudant Michaux, qui rate sa perquisition malgré les chuchotements des fillettes, suite aux graves accusations de la P.J. de Charleroi indiquant les manoeuvres de la gendarmerie pour accaparer toutes les données, la « philippique » de Martine Doutrèwe prit une résonance terrible.

Marc Dutroux ? On ne l'évoque que brièvement, oralement, en août 95, puis plus rien jusqu'à la délivrance de Sabine et Laetitia. Tout le désigne pourtant comme un client sérieux. L'explication réside ailleurs: dans le jeu personnel voulu par l'état-major de la gendarmerie et le B.C.R., le Bureau central de Recherches, en particulier.

La gendarmerie soutient qu'elle m'a donné toutes les informations en sa possession. C'est faux et contraire à tout ce que révèle le dossier, assène Martine Doutrèwe. On parle de Dutroux avec très peu d'insistance, à la limite de l'anecdotique et sans établir de rapport précis avec Julie et Mélissa. Or, la gendarmerie possède sur Dutroux des renseignements de première importance et d'extrême gravité. Elle sait qu'à Charleroi, il aménage des caves pour abriter des jeunes filles. Je suis laissée dans l'ignorance, je n'ai jamais eu connaissance de ses antécédents. Dans le même temps, on rédige des P.V. sur des suspects qui n'ont pas le 10 ème des charges de Dutroux!

Sûre d'elle et de ce qu'elle avance, Martine Doutrèwe donne enfin le coup de grâce, en rappelant au passage n'avoir pas été associée aux données possédées par la gendarmerie de Grâce-Hollogne. Celle-ci était pourtant informée, affirma le major Decraene du B.C.R. dans une confrontation publique redoutable, «c'est elle qui n'a pas transmis les renseignements nécessaires».

La gendarmerie a voulu jouer cavalier seul et elle a commis une grave erreur de jugement en se privant de moyens d'investigation essentiels.

Marc Dutroux serait passé aux aveux face à des policiers de talent, rompus à ce genre d'interrogatoire, et j'en avais à disposition!, a tranché la juge.

Une fois de plus, la mésentente une somme de carences collectives et individuelles, corrigent certains commissaires - se double d'une méfiance réciproque, de calculs inqualifiables, voire d'hostilité savamment entretenue.

On dissimule, on se met des bâtons dans les roues, on retient ou on freine la diffusion d'informations capitales. Au passage, l'opération Othello en prend pour son grade. L'heure est aux explications sans pitié. Martine Doutrèwe assume, sous l'oeil vigilant des époux Lejeune et Russo, et dans le silence nerveux d'une

salle consternée de découvrir que Dutroux l'insaisissable le fut surtout par la faute de luttes d'influence P.J.-Gendarmerie magistrate et de défiances intestines.

Mis en cause, le commissaire Daniel Lamoque de la P.J. de Liège, les adjudants Gilot de Grâce-Hollogne, et Lesage de la BSR de Seraing, ont répondu le lendemain. Le premier a confirmé les dires de Martine Doutrèwe.

Manifestement mal à l'aise, peu affirmatif, voire même évasif, il eut cette appréciation révélatrice: La gloire que la gendarmerie aurait pu retirer d'une issue heureuse est passée devant l'efficacité. C'est désolant, ce qui s'est

passé est incompréhensible. Il suffisait d'avoir des mandats de perquisition; on s'est enferré dans un système à Charleroi alors que c'était si simple de s'adresser à Liège.

Tout autres furent les auditions de Gilot et Lesage. Le premier fut penaud, timoré et confus. Le second fut plus ferme pour contre dire totalement la version de Martine Doutrèwe. Pour lui, la juge était au courant de la piste Dutroux.

Je lui ai parlé de Dutroux. Dès la fin juillet 95, je lui ai signalé l'existence d'un suspect intéressant, connu pour avoir enlevé et violé des enfants. Elle n'a eu aucune réaction.

Tard dans la nuit, soumis à une confrontation multiple qui devait apparaître comme le moment de vérité, chacun est resté sur ses positions. Marc Verwilghen a pris note des antagonismes et de l'aveu de l'adjudant Lesage, selon lequel il a été briefé par sa hiérarchie avant audition. Une préparation peu démocratique, que les commissaires devront percer à jour, en démêlant le vrai du faux.

Car, manifestement, une des deux parties a menti, en commettant un faux témoignage. La commission n'aura pas trop de la trêve de Noël, jusqu'au 6 janvier, pour mettre ses convictions au clair avant de reprendre ses travaux.

Elle a aussi noté l'escarmouche - peut-être essentielle – autour d'une phrase supprimée ou pas dans le P.V. de synthèse après le drame. Il y est fait mention des soupçons pesant sur Dutroux. La juge liégeoise aurait demandé des explications en ajoutant: «Je ne veux pas vous assassiner, mais j'exige la vérité».

Les deux gendarmes soutiennent exactement le contraire; ils prétendent que la juge a voulu qu'ils retirent cet élément, en leur disant: «Vous allez m'assassiner». Une pièce de plus à verser dans une nébuleuse de questions dérangeantes où dialogue de sourds et cloisonnement des infos brouillent le jugement.

LE WINDOWS 95 EST AUSSI UNE MAMAN

Martine Doutrèwe a également mis les points sur les i dans d'autres domaines, à commencer par ses relations conflictuelles avec les parents. Traitée d'ordinateur, de «Windows 95 avec des ratés», la juge a rappelé qu'elle était aussi une maman.

J'ai été horrifiée et j'ai ressenti douleur et tristesse. En conscience, j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir, a-t-elle précisé en préambule.

Plus humaine que le portrait robot dressé par les parents (d'ailleurs peu convaincus par ses efforts), elle a justifié son refus de leur laisser voir le corps de leur fille après les tragiques découvertes.

«Humainement, je ne pouvais pas, le spectacle était insoutenable ». Elle a justifié sa conduite, agissant dans le cadre de la loi, du code d'instruction criminelle, repoussant les demandes de Me Hissel qui, à «situation exceptionnelle», demandait un «sort exceptionnel».

Une approche légaliste qu'on prit pour du désintérêt. Les parents? Elle comprend leur animosité, leurs propos virulents: «J'ai été comparée à une sadique, mais je ne suis pas rentrée dans la polémique. Je ne pense pas avoir été inhumaine. J'ai été juge de la jeunesse, avec des qualités relationnelles, a-t-elle ajouté. Ils ont vu en

moi l'autorité, ce qui a empoisonné nos rapports. Ils n'ont pas accepté de ne pas avoir accès au dossier - la législation devrait changer en ce sens, mais ce n'était pas à moi à anticiper – et puis, ils ont mené leurs propres investigations».

Ses vacances qu'on a présentées comme trop longues et maintenues alors même que l'enquête débutait ? Elle les a prises comme toute une série d'autres juges d'instruction. Mais elle les a écourtées aussi, annulant un voyage en Grèce, s'octroyant quelques jours aux châteaux de la Loire, «où on pouvait toujours me joindre en permanence par GSM car je ne me désintéressais pas du sort des fillettes».

Huit heures d'audition plus tard, au terme d'une journée sévère et dense, Martine Doutrèwe quittait la salle, libérée d'un poids terrible que la commission, aux deux tiers de son mandat, commence à évaluer avec précision dans le chef des uns et des autres.

Les parents ont tenu in fine à rappeler leur souci. «Il ne faudra pas se contenter de, C’est pas moi, c'est la faute d'un tel ou du système,Il faudra dire qui est coupable»... dans ce maquis obscur de dissimulations et de dérobades qui coûtèrent la vie à Julie et Mélissa.

Bernard Meeus.

Les inquiétudes de Michel Bourlet(« Télé Moustique » du mardi 24 décembre 1996 pages 26 et 27)


Les inquiétudes de Michel Bourlet

« Télé Moustique » du mardi 24 décembre 1996 pages 26 et 27

« Je ne trouve pas d'explication raisonnable aux lacunes déjà relevées dans l'instruction relative à l'affaire d'Obaix et qui sont nécessairement le fait de magistrats. (...) Les lacunes de l'enquête sont à ce point graves que j'en viens nécessairement à me demander si elles s'expliquent uniquement par une négligence ou bien si Dutroux bénéficiait de protections tant policières que judiciaires. »

(Michel Bourlet, procureur du Roi à Neufchâteau.)

La semaine dernière, Télé-Moustique révélait les confidences faites par le gendarme René Michaux de la BSR de Charleroi à deux membres du service d'enquête du Comité permanent de contrôle des services de police.

Nous publiions le contenu d'un procès-verbal dons lequel on pouvait lire notamment cette déclaration de M. Michaux: « Si j'avais su que Dutroux était un suspect potentiel dons les faits d'Obaix (NDLR: à savoir le viol d'une jeune femme suivi d'une tentative de meurtre, le 22 novembre 1995), il y avait matière à rechercher des éléments chez les suspects (soporifiques, couteau, etc.), il existait donc un élément infractionnel pour rédiger un P.-V. et demander des mandats de perquisition. »

Cet aveu était jugé « dramatique » par les enquêteurs du Comité P, parce qu'ils relevaient par ailleurs que « selon l'audition de Dutroux, le 23.11.95, Bernard Weinstein a été placé dans la cache de la cave de Marcinelle pendant une huitaine de jours tandis que Julie et Mélissa furent transportées dans une chambre à l'étage (...). Il semble donc qu'au niveau policier, le manque de communication (...) est à l'origine de l'absence de réaction dès le 24.11.95, aux fins d'obtenir des mandats de perquisition pour les immeubles du couple Dutroux, sur base des faits de viol à Obaix. (...) Si les perquisitions avaient été effectuées dans les divers immeubles et dépendances appartenant aux époux Dutroux vers le 24 novembre 1995, Julie et Mélissa auraient peut-être pu être retrouvées vivantes ».

Cette affaire d'Obaix a fait l'objet de nombreux autres commentaires de la part du Comité P (voir TM 3699) et nous pouvons révéler cette semaine que la bizarre gestion de l'affaire d'Obaix tant au niveau policier que judiciaire inquiète jusque dans les plus hautes sphères de la magistrature.

Ainsi, le 12 décembre dernier, dans un rapport adressé à titre « personnel » par le procureur général près la Cour de cassation, Eliane Likendaele, au ministre de la Justice Stefaan De Clerck, on peut notamment lire à propos de divers manquements établis dans l'arrondissement judiciaire de Charleroi: "Vous avez pu constater qu'il y aurait encore de nombreuses enquêtes à effectuer pour tenter de faire toute la clarté sur les différents « dysfonctionnements » apparaissant dans le comportement de certains magistrats ou services de police. Parmi les faits les plus graves, je relève ceux qu'a signalés Monsieur le Procureur du Roi à Neufchâteau Bourlet dans son audition du 29 octobre 1996, concernant le non-lieu intervenu à Charleroi dans le dossier relatif au viol et à la tentative d'assassinat d'une jeune fille à Obaix, le 22 novembre 1995.

Télé-moustique dispose du compte rendu de cet entretien entre Mme Likendaele et M. Bourlet. Et il est en effet très significatif.

Cette conversation qui porte clairement sur les protections dont a pu bénéficier Marc Dutroux à Charleroi a lieu le matin du 29 octobre au Palais de justice de Bruxelles. Consignée dans un rapport de la Cour de cassation sous la référence 272/11/53-12, elle commence par une sorte de mise au point d'Éliane Likendaele: "J'ai reçu quelques minutes avant votre arrives une lettre de Monsieur le Ministre de la Justice me transmettant copie d'un courrier que vous lui avez adressé le 7 octobre 1996 au sujet, notamment, du rapport de Monsieur le Procureur général baron Velu. Je pense que l'étonnement que vous avez éprouvé en lisant dans ce rapport que "rien ne permet de dire que Dutroux ait été protégé à Charleroi" repose sur un malentendu. II semble en effet que vous ne puissiez ni comprendre ni accepter cette appréciation alors que vous avez connaissance des éléments que vous détaillez concernant une jeune fille violée et égorgée à Obaix, le 22 novembre 1995.

A cet égard, il n'est sans doute pas inutile de relever que ce viol et cette tentative d'assassinat étaient inconnus de Monsieur le Procureur général baron Velu lorsqu'il a procédé aux auditions sur la base desquelles son rapport a été établi. Je crois pouvoir ajouter que ce viol et cette tentative d'assassinat étaient aussi ignorés de Monsieur le Ministre de la Justice quand celui-ci a adressé à mon prédécesseur la lettre reçue le 26 août 1996 précisant la mission. Bien que cette mission concerne principalement le Procureur général près la Cour d'appel de Mons lui-même, elle s'étend toutefois de connexité à d'autres magistrats de ce ressort, ce qui me paraît permettre de justifier que je vous demande de me faire connaître, si vous le voulez bien Monsieur le Procureur du Roi, les renseignements complémentaires dont vous disposez et qui seraient de nature à apprécier le comportement de magistrats dans cette dernière affaire, spécialement donc de magistrats de Charleroi."

Michel Bourlet. – « Outre les éléments repris dans le rapport du 6 septembre 1996 de mon collègue de Charleroi, Monsieur Marchandise, je peux vous informer que mon étonnement concernant la gestion de ce dossier était également basé sur le fait qu'une analyse de recherche ADN avait été pratiquée sur deux suspects qui ont été mis hors cause et non pas sur Dutroux. Or, dans l'audition pratiquée le 6 décembre 1995 à la PJ de Charleroi, Monsieur Dutroux déclare être d'accord qu'on lui prélève des cheveux pour une analyse de ce type. Il faut savoir que lors de l'enquête confiée au Comité "P" par mon collègue de Charleroi tout dernièrement, les enquêteurs du Comité "P" ont trouvé les cheveux dans le bureau de l'officier judiciaire chargé de cette enquête. J'en déduis donc que ce prélèvement n'a jamais été soumis à l'expert désigné par le juge d'instruction. »

"Ensuite, dernièrement, les enquêteurs de Neufchâteau chargés du dossier Dutroux ont mis la main sur un véhicule Ford Fiesta dans lequel des cheveux,selon mon collègue de Charleroi, appartiendraient à la victime l'agression du 22 novembre 1995 à Obaix. Enfin j'ajouterais que les déclarations de Madame Martin enregistrées dernièrement par la police judiciaire d'Arlon démontrent que le jour de l'agression, Dutroux était à Obaix. Je partage donc l'opinion de mon collègue de Charleroi et je m'étonne de la manière tant policière que judiciaire avec laquelle ce dossier a été traité, pour aboutir finalement à un non-lieu, alors que manifestement, tous les devoirs n'avaient pas été effectués."

« Mon étonnement va croissant dans la mesure où actuellement je peux affirmer que la réunion au sein du même parquet du rapport Othello, du dossier "séquestration à charge de Dutroux-Weinstein" et du dossier de l'agression d'Obaix devait immanquablement provoquer une instruction à charge de Dutroux avec perquisition en son domicile à Marcinelle. Cela me semble d'autant plus dramatique que, dans la semaine précédant la mort de Weinstein, selon les déclarations mêmes de Dutroux actées dernièrement, Weinstein était séquestré dans la cache située dans la cave de Dutroux et Julie et Métissa enfermées dans une pièce à l'étage. »

« Si la perquisition avait eu lieu entre le 22 novembre 1995, date de l'agressions d'Obaix, et le 25 novembre 1995, date approximative de la mort de Weinstein, elle aurait immanquablement fait découvrir aux enquêteurs la présence de Julie et Mélissa vivantes à l'étage. Les lacunes de l'enquête sont à ce point graves que j'en viens nécessairement à me demander si elles s'expliquent uniquement par la négligence ou bien si Dutroux bénéficiait de protections,tant policières que judiciaires.

Concernant les protections policières, des enquêtes sont en cours dans le cadre de l'instruction numéro 87/96 de Monsieur le Juge Langlois. Ces enquêtes sont notamment confiées au Comité "P", tant à l'égard de Monsieur Michaux de la gendarmerie qu'à l'égard de Monsieur Zicot, de la police judiciaire de Charleroi. Quant aux protections judiciaires, je n'ai pas d'éléments à vous donner et je n'ai pas compétence pour enquêter en cause de magistrats mais je me demande si certains de ceux-ci n'auraient pas bénéficié de certaines voitures avantageusement acquises par l'intermédiaire de Monsieur Zicot.

Je pourrais difficilement préciser- je me borne à m'interroger - et je ne trouve pas d'explication raisonnable aux lacunes déjà relevées dans l'instruction relative à l'affaire d'Obaix et qui sont nécessairement le fait de magistrats. » Fin de citation...

Michel Bouffioux

Légende photo : « La réunion au sein du même parquet du rapport Othello, du dossier "séquestration" et du dossier d'Obaix devait immanquablement provoquer une instruction à charge de Dutroux, avec mandat de perquisition. »

POUR L'ASBL JULIE ET MELISSA, N'OUBLIEZ PAS ( « Télé Moustique »mardi 24 décembre 1996 pg 7)


POUR L'ASBL JULIE ET MELISSA, N'OUBLIEZ PAS

« Télé Moustique » du mardi 24 décembre 1996 page 7

Le numéro de Télé Moustique que vous venez d'acheter n'est pas un numéro comme les autres. Sur chaque exemplaire écoulé, cinq francs du prix de vente seront versés à I'ASBL Julie et Mélissa, N'oubliez Pas. Portrait par l'un de ses fondateurs, Gino Russo, d'une association qui, virtuellement, existait déjà depuis longtemps.

Fondée par Louise et Jean-Denis Lejeune, Carine et Gino Russo, I'ASBL Julie et Mélissa, N'oubliez Pas sera officiellement opérationnelle à partir du 6 janvier '97. Elle est la réponse juridiquement organisée à ce flux de sympathie populaire dont ont été l'objet les deux petites filles, enlevées le 24 juin '95, et leurs parents, soutenus par l'opinion publique tout au long des étapes d'une épreuve qui n'a pas de nom. La naissance de cette association contient aussi l'expression d'une prise de position inédite, celle de membres de la société civile qui veulent - sérieusement et au-delà de toute forme de marginalité - faire entendre leur voix face aux institutions.

Bouger contre les tentations d'immobilisme,parler contre la volonté de faire taire... C'est la philosophie des familles qui, parallèlement, s'intéressent de près à la création d'un Centre national (ou européen?) de recherche d'enfants disparus ou maltraités, calqué sur le modèle américain du National Center For Missing And Exploited Chiidren d'Arington.

« Le centre n'est pas encore sur pied... commente Gino Russo. Mais il faut bien savoir que nous sommes très attentifs aux projets du gouvernement sur sa création, nous avons exigé beaucoup de rendez-vous - avec De

Clerck, Vande Lanotte, Dehaene -, puisque notre souhait est évidemment d'être actifs autour de sa naissance »

- Quelles sont les principales motivations qui vont ont poussés à créer l'ASBL Julie et Mélissa, N'oubliez pas?

Gino Russo. - Pendant la disparition de Julie et Mélissa, nous avons reçu beaucoup de dons spontanés. Ces dons s'accumulaient et nous avons pensé à une manière de rendre, de gérer cet argent, par rapport à un objet social qui, en réalité, résume tout ce que nous avons fait depuis le 24 juin 1995, date de l'enlèvement des enfants.

Nous avons dès lors couché sur papier le but de cette association. Les statuts définissent bien l'objectif: honorer et défendre la mémoire de Julie et Mélissa. Quant aux dons, ils devront, entre autres, servir à engager l'une ou l'autre personne qui s'occupera du suivi au jour le jour.

- D'où et de qui provenaient ces dons ?

G.R. - De partout et de tout le monde. Cela allait du don de cent francs jusqu'à celui de dix mille francs; ils provenaient de toutes les classes sociales et de toutes les pensées politiques.

En ce sens, leurs origines illustrent parfaitement le fait que nous touchons tout le monde, de l'ingénieur au chômeur.

- Au-delà de votre histoire personnelle, l’association est aussi une façon d"'officialiser", d'asseoir publiquement et juridiquement votre discours sur la défense des droits de l'enfant et ceux des victimes d'abus sexuels.

G.R. - Exactement. Pour nous, dans les faits, la création de l'association ne change pas grand-chose, elle va nous servir à continuer à exercer une influence sur des pouvoirs mais elle va aussi nous permettre, dans le futur, d'élargir le cadre en y amenant notre expérience... Alors, oui, ce sera un organe de pression mais qui, en réalité, existe déjà depuis le vingt-quatre juin; aujourd'hui, il a, disons, une forme plus pratique. Il ne faut pas oublier que nous devons déjà gérer tout ce que nous avons déjà reçu depuis des mois...

Réclamer une commission d'enquête publique, organiser la Marche blanche sont deux des choses que nous avons déjà Faites et qui illustrent déjà bien le travail et l'ambition que suivra notre association.

- II semble clair que l'esprit d'indépendance qui vous a animés jusqu'ici sera aussi celui insufflé à I'association.

G.R. - Nous ne voulons pas être subventionnés; si les dons nous permettent de fonctionner en indépendants, c'est notre but. Je crois que la création de cette association ou celle des Comités blancs ennuient les institutions: c'est une façon de canaliser le sentiment de tous ceux qui adhèrent à ce que nous avons fait. En fait, nous avons fonctionné à l'envers. En général, on crée une ASBL, puis on essaie de la promouvoir. Nous, nous répondons à une demande.

Dans cette masse de messages que vous recevez et dont l'association s'occupera, il y a aussi beaucoup de demandes anecdotiques. Tout ce que I'ASBL fera devra, bien sûr, avoir un sens...

G.R. - D'ailleurs lorsqu'on nous demande d'organiser des tournois de belote pour Julie et Mélissa, nous l'avons déjà expliqué, c'est non. Si l'action proposée se résume à aller jeter des tomates sur le Palais de justice, c est non, nous ne donnons pas notre accord. Il faut effectivement que tout ait un sens, nous tenons à ce que rien ne se disperse, que cela suive une logique, celle qui est aussi la philosophie des parents.

- Le disque distribué dans les magasins et les bureaux de poste est donc le premier objet vendu au profit de l'ASBL Julie et Mélissa, N'oubliez Pas.

G.R. - Oui, mais le projet du disque était déjà présent à notre esprit, parce qu'il devait servir a appuyer la campagne d affichage et à sensibiliser l'opinion publique durant les recherches. Des bénévoles y ont travaillé et puis il s'est passé ce qui s'est passé... mais le projet a continué autour d une chaîne de solidarité, un peu sans nous, alors. Nous avons choisi l'un ou l'autre texte, mais il est à la hauteur de l'ambition: le disque traduit le sentiment d'inquiétude, celui du temps qui passe, du temps qui s'arrête, la révolte... et puis l'espoir.

Sébastien Ministru

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Légende encart :

ASBL JULIE ET MELISSA, N'OUBLIEZ PAS!

Rue de l'Hôtel Communal, 48 à 4460 Grâce-Hollogne

Téléphone: 04/231.24.11

Fax: 04/231.20.93

Les dons peuvent être versés au numéro de compte: 240-02828-73

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